HERBIE HANCOCK – « Mr Hands » - (Saison 1)
HERBIE HANCOCK – « Mr Hands » - (Saison 1)
De récents échanges entre blogueurs (tiens donc je m’y remettrais ?) m’ont
fait réaliser que même si j’ai chroniqué de temps à autres Herbie Hancock (ici
peut être comme dans l’ancien blog, ça c’est sûr), je ne lui ai jamais consacré
réellement de temps ni d’article.
Pourtant, de mes quatre fétiches mains de Miles, il est certainement celui que
j’ai le plus suivi, adulé et abordé – c’est peut-être pour ça.
Chick n’est plus et j’ai pu largement exprimer tout le bien que je pense de
lui.
Joe lui aussi a quitté la sphère terrestre pour aller jammer certainement en
parfaite symbiose avec Jaco.
Keith ne jouera plus.
Le temps passe et la rubrique de ces quatre prend de l’âge, alors
effectivement, je vais laisser une place de choix à Herbie.
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Herbie Hancock…
Rien que prononcer son nom me fait frissonner de bonheur, oui de bonheur car
c’est en fait ce qu’il dégage immédiatement à mon sens.
Herbie c’est un peu le croisement entre l’étudiant intellectuel premier de
promo, cérébral à souhait et capable d’aller vous démontrer que l’accord du
Sacre tellurique et un autre de Rachmaninov sont le point de départ de tous les
possibles pour improviser et en même temps c’est le mec le plus funky, le plus
roots et le plus organique qui soit. Il lâche son attaché case rempli de
notices de synthé, de logistique Cubase, de paramétrages M.I.D.I et part faire
la fête avec des potes bien populaires, bien freaks, bien DJs et il
s’encanaille quasi-rap avec eux.
Herbie aura -t-il la gueule de bois à l’issue de cette orgie orgasmique où le
corps prend le dessus sur un cérébral qui se décloisonnera ? Hmm… pas si
sûr, en tout cas ce ne sera pas de substances, non Herbie a en lui cette
hypnose du groove en mode répétitif duquel se sortir est impossible une fois
qu’on y entre. Cette drogue sonique où ses mains agissent dans des rythmiques
hyper fédératrices desquelles giclent clavinets, rhodes wahwahtés, DX énervés.
En soit, ça suffit à décoller et partir dans des sphères en vaisseaux spatiaux
bien kitchs et robotisés, où la direction humanise le métronomique, où le
paquet de potentiomètres offre des voyages vers des planètes festives
chatoyantes, vers des sons jubilatoires, vers le plaisir, tout simplement.
Herbie m’est toujours apparu comme le gars simple, courtois, poli, cultivé et
humainement très abordable.
Il est aussi représentatif de l’artiste sans limites, prêt à tout et osant, non
l’expérience – car d’emblée même dans l’extrêmement nouveau il dépasse
instantanément et naturellement ce stade – mais le nouveau, l’improbable,
l’incongru, la surprise, l’inédit.
En cela Herbie est certainement et ce sans fanfaronnerie de sa part, toujours
en parfaite humilité musicale et artistique, l’un des plus formidables
défricheurs musicaux du XXe siècle.
On le réalisera un jour – je le sais depuis toujours, ou du moins ce jour où un
jaillissement de notes à la présentation tant différente que nouvelle est
apparu au détour d’un album pour le moins synthétique et funky à souhait qui
m’a mis directement sur la quête de sa musique.
Il s’agissait de « Secrets ».
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Herbie enfin, m’a toujours fait penser à mon ami pianiste Jacky, ce gars à
l’aise dès qu’il pose ses doigts sur les touches de n’importe quel clavier
qu’il soit un Steinway ou un Ensoniq, DX7, capable en une poignée de seconde
d’en sortir la substance, de tirer de tout son le meilleur et de lui donner un
véritable sens.
Avoir bossé des années avec un gars de cette trempe, comme batteur, m’a appris
à aborder le(s) clavier(s) et d’abord en parfait « copieur »
connaissant non son jeu, mais son approche, me détourner de la batterie pour
m’engager dans l’univers des touches blanches et noires au-delà de ce piano
classique qui me collait à l’éducation fut non simple, mais en tout cas posé
sur un référentiel mental de haute volée.
Ce, pourtant et justement j’en reviens à Herbie… en toute simplicité.
Je me suis depuis longtemps émancipé de cela, mais il faut un point de départ
et quand une porte s’ouvre pour aller dans un lieu nouveau il faut savoir
s’offrir les conseils d’un guide.
Mon guide concret a été Jacky, mon guide spirituel, culturel et technique a été
et quelque part reste Herbie.
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Je ne pourrais faire la liste exhaustive des albums de Mr Hancock, sans
parler de ses participations auprès de nombre d’artistes, cependant et avec un
souci chronologique variable et sans réelle importance, je vais tenter de me
souvenir, de parler de tel ou tel moment gravé en sillons ou appréhendé en live
où il a traversé ou plutôt s’est installé dans mon quotidien.
Je jette un œil vers mes étagères de disques tant vinyles que CD, ou mes
tiroirs à cassette et je sais qu’il est là, en multiples facettes. Et qu’il a,
en fait, toujours été là.
Et pas qu’à la lettre H, mais avec untel, unetelle, ici et là.
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Après avoir dépoussiéré le piano dans un quintet qui a installé Miles au-dessus
de la mêlée d’une certaine avant-garde, Herbie est convié à une séance par le
Dark Magus.
Il arrive, tout frétillant pour un énième album et entrant dans le studio
demande à Miles où est le piano. Miles le regarde et lui montre un orgue planté
là, au coin du studio…
Il en tirera tout son possible ou l’impossible. Herbie n’a pas encore trituré
les petits boutons et avant de passer à cette étape, il va d’abord passer par
la case Blue Note, remettre en avant tant l’expérience modale chère à Bill et
Miles et retourner à des racines profondément populaires, funky et binaires,
churchy même.
Les potes du quintet vont venir l’épauler – Wayne, Tony, Ron et Freddie Hubbard
sera le pendant davisien, du moins crois-t-on, car il faut bien trouver des
repères, alors que d’emblée ils vont… ailleurs.
D’autres vont passer là, Dexter, George, au gré des sessions, des compos, des
volontés sonores et des croisements de personnalités et de la volonté de
« rendu » du maitre, désormais, du jeu.
En une poignée de compositions et par celles-ci, Herbie va très vite devenir
l’incontournable pianiste tant que compositeur qu’on joue. Il entre directement
dans le top 50 des standards du real book qu’il faut jouer et qui « font »
moderne là où l’on restait enlisés dans un « post bop » et un
« hard bop » omniprésents tant en langage qu’en substance.
« Cantaloupe Island », « Watermelon Man » restent usés par
les groupes, les étudiants, les playlist jazz… sorte de carte de visite permettant
la vulgarisation et la popularisation du jazz.
Sous leur couvert et leur apparence évidente ces deux titres sont bien
représentatifs d’Herbie…
Simples, ils peuvent être joués tels et en lissant toutes les aspérités pour en
tirer la substance minimale, même apprenant et quasi débutant en jazz on arrive
à en tirer un « résultat » …
Le problème c’est que, bien souvent, l’on en reste là…
Pourquoi ?
C’est un peu comme cette petite valse ou mazurka de Chopin, ce début de sonate
au clair de lune de Beethoven, ou ce prélude de Bach, pas besoin vraiment
d’aller l’analyser, le comprendre ou en écouter des versions par Horowitz,
Barenboïm, Rubinstein ou tant d’autres.
On les a… dans l’oreille. Ou du moins on en a l’idée, le survol, c’est dans
notre mémoire collective.
Pourtant…
Qui s’est vraiment penché sur les grooves de Tony ou de Billy Higgins et
en a extrait la réelle subtilité ?
Qui peut dépasser en immédiateté, en pugnacité, en style les solis de
Freddie ? en avoir la seule « conscience »… ou l’âpreté de
Dexter, rauque et churchy…
Qui a vraiment pigé la direction rythmique du maitre du lieu, Herbie, avec
cette petite retenue, ce petit phrasé oscillant entre appui et un léger piqué
qui font toute la différence et insufflent ce groove immuable, imparable,
palpable et si fédérateur.
On joue ces deux titres emblématiques, on les déforme et les extrapole ou on les
réduit à leur plus basique expression, mais en réalité, pour s’estimer capable
de bien les jouer et d’en saisir la vérité, c’est une autre paire de manches,
qu’il va falloir retrousser et sérieusement…
« Maiden Voyage ».
De sus 4 en modal, voilà, là encore ce truc d’école qui « fait
moderne » et sur lequel on s’escrime, s’use, triture et intellectualise.
On aime ça dans l’enseignement du jazz, en particulier en France et dans les
conservatoires.
Tout passe alors par le cérébral. On va t’expliquer, tableau à l’appui quelles ficelles tirer pour faire solo, chercher la petite bête pour se dépêtrer de
cette succession harmonique qui ne se pose jamais…
Pourtant là, derrière, il y a encore ce rythme, cette sorte de pattern/riff sur
lequel il ne faut surtout pas oublier de se poser, comme un tracé, une route,
un axe immuable et déjà, bien entendu hypnotique.
« Dolphin Dance » qui lui aussi ne semble jamais se terminer. Un coup
de génie avant tant d’autres.
Herbie en Blue Note c’est donc un modèle d’école, un passage
jazzman obligé non en détour, mais en patrimoine. Il appartient à la
sacrosainte liste estampillée standard et de fait, bien souvent quand on le
joue, malheureusement, on en reste là.
Pourtant…
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Avant d’aller plus loin ne serait-ce qu’au sein du célébrissime label et sous
son nom, je vais passer faire un détour chez Wayne car Herbie, quand il se met
au service des sessions de ce saxophoniste comptant parmi ses meilleurs amis et
partenaires, il donne comme toujours, le meilleur de lui-même et là, servant
des compositions tant innovantes que géniales, son jeu pianistique part
explorer, hors des sentiers battus. Les équipes se croisent, mais les projets
sont différents et se nourrissent les uns des autres. « Adam’s
Apple » reste l’un de mes albums fétiches.
Les compositions de Wayne y sont remarquables, le jeu de Herbie y est tant
rythmique et groovy qu’inventif et explorant.
Et puis il y a « Etceterra » de Wayne… à ne louper sous aucun
prétexte… et « Penelope » qui dans « Adam’s Apple »
apparait sous le nom de « El Gaucho » en bossa jazz prend ici place
en une merveilleuse ballade romantique… (il faut écouter les grappes
pianistiques qu’Herbie égrène derrière le thème avant de prendre place soliste,
du grand art conceptuel – ou l’art et la manière d’amener son solo dès le thème…)
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Donc tout le monde connait les tubes extraits de « Empyrean Isles »,
« Maiden Voyage » ou de « Takin Off », mais rien qu’en ces
trois albums il y a largement de quoi explorer l’univers déjà bien personnel et
changeant tant qu’ouvert vers l’infini de Herbie Hancock.
Herbie aura donc fait un retour à la case roots, ces quelques tubes extraits
par leur immédiateté en témoignent.
Pourtant Herbie chez Miles c’était certainement le plus barré, le plus
audacieux, le plus free, le plus instantané cérébral, le plus complexe aussi.
Un mélange.
« Quand Miles sortait de scène, il nous laissait faire et on
avait une totale liberté. Puis quand il revenait, on calmait le jeu et on lui
déroulait le tapis rouge, c’était Miles tout de même !... Puis un
jour il est venu vers nous et nous a demandé pourquoi on ne jouait pas comme ça
derrière lui, pendant ses solos… jamais une telle idée ne nous serait venue, il
y avait trop de respect pour faire ainsi. Alors il nous a clairement exprimé
son souhait si ce n’est sa volonté que l’on fasse de même avec lui, qu’on ne le
ménage pas et que même, on le pousse vers d’autres espaces – là le quintet a
profondément changé »
Je résume non textuellement, mais de mémoire une interview de Herbie que je
me suis efforcé de retenir, tant non seulement elle m’a éclairé sur la façon
dont Miles a brisé ses propres frontières mais aussi sur cette incroyable
liberté qui émanait du quintet davisien et qui laissait tant perplexe
qu’admiratif. Une liberté dont Herbie – un des rares pianistes qui avait un jeu
réellement novateur et différent des us de l’instrument – était avec Tony,
finalement, la principale cheville ouvrière. Wayne lui, était l’instigateur en
compositions (annotées sur un petit carnet que là aussi Miles avait repéré) dont
il avait les clés pour improviser dans son « propre » cadre et Ron
s’escrimait à tenir la barre sous le foisonnement juvénile de Tony, tentant de
donner un sens lisible et une compréhension aux improbables voicings et
incartades de Herbie.
Chez Blue Note, Herbie n’a pas laissé de côté cette orientation qu’il avait,
tout jeune, usé chez son boss. Ce jeu, d’ailleurs il l’a toujours gardé et
exprimé en faisant en quelque sorte une « marque de fabrique ». Mais
ces tubes, apparemment bien ordonnés, masquent la forêt tant créatrice que
foisonnante et en broussailles.
Nombre d’autres titres et même d’albums, plus
aventureux et déviants, socle pourtant d’un langage jazz qui sera par la suite
légion, n’ont été qu’effleurés ou mis dans la catégorie
« spécialistes » pour les auditeurs – « élitiste » pour les
zicos osant s’y aventurer, là encore de façon suspecte.
« My point Of View » est un album où l’écriture et
l’arrangement sont mis au profit de compositions, chacune ayant en elle-même de
multiples facettes.
Tony reste l’axe foisonnant mais il se « contraint »
à un respect de forme dans laquelle il tente de s’émanciper « comme
avant ».
Le jeu de Herbie retrouve ses axes libertaires soutenu par des
voicings instantanés qui sont une ouverture vers l’infini.
Ecriture cadrée et presque rigide se confronte avec liberté assumée,
« King Cobra » qui amène un solo de Tony sur pattern rythmique en est
un excellent (tant que précurseur) exemple.
Et cette pochette avec Herbie en petit intello qui regarde l’horizon planqué
derrière son piano en dit plus long qu’on ne l’imagine…
Et même si dans « Blind Man, Blind Man », porté par Grant Green, il
tente la réitération de ses tubes soul/funky, on va et on sait qu’on va vite se
barrer ailleurs, ce dès « A tribute for someone » (Miles ? y’a
des chances…) et que le kaléidoscope ou le puzzle multi pièces a pris sa place.
On ne joue jamais les titres de ces albums… mais c’est vrai que donner
substance à « The pleasure is mine » à l’arrangement retords, ça
demande un effectif mais aussi une autre compréhension du sujet d’écriture…
Afin de parfaire et certainement mieux comprendre le Herbie qui suivra, tel un
gars à la croisée des chemins qui va s’embarquer dans de multiples voies, au
gré des vents, des envies des modes, des courants et même des outils
technologiques, il faut jeter une attention particulière sur « Inventions
and Dimensions » sorti en 1963 alors qu’il n’a que 23 ans… Son solo dans,
par exemple « A Jump Ahead » est vraiment représentatif de sa pâte
tant de ses propres gimmicks, de son oscillation entre points d’impact et de
tensions rythmiques et jets de phrases qui circulent par chromatismes d’octaves
en octaves sur les axes modaux ouverts par quartes justes ce qui ouvre le jeu
vers une modalité beaucoup plus sereine.
Si l’on s’amuse à transposer ou comparer ce solo avec ceux qui suivront dans des
formations aussi variables que le VSOP, le trio avec Ron et Tony ou encore ceux
au Fender dans, par exemple l’album « Thrust » dont je parlerais
après – on ne pourra que constater, que, déjà, Herbie a toutes ses propres clés en
mains et qu’en fait, tant au degré de composition que d’arrangement, mais
également de jeu pianistique de background ou d’improvisation... sa personnalité
musicale et artistique sont clairement affichées, intégralement maitrisées et
autonomes.
Parmi les albums Blue Note qui pour certains artistes ont été un aboutissement,
une référence, mais qui pour Herbie Hancock ont été l’entrée vers son
développement créatif, celui que j’affectionne est « Speak Like a Child »
sorti en 1968.
Le changement d’équipe (à part Ron Carter à la contrebasse)
préfigure un célèbre septet, les arrangements et une attention toute
particulière envers le trombone (Peter Phillips) ou encore la flûte (Jerry
Dodgion) démontrent que Herbie va bientôt muter…
« Riot » et là encore son solo avec ces grappes d’octaves (dont il
usera souvent) ou encore le merveilleux titre éponyme (lorgnant vers une bossa
réimaginée au sein de laquelle il opère en toute sobriété) prouvent, d’emblée, que
le jeune vétéran du jazz foisonne de nouvelles idées.
Son mentor, Miles, a commencé lui aussi son irréversible mutation, il n’a pu,
comme tous ses camarades et amis, y échapper.
La pochette est juste sublime de suggestions et il faut voir en ce jeune couple
qui s’embrasse nombre de symboles de même que les titres de l’album qui sont
largement évocateurs.
Herbie ne joue plus, il a passé ce stade depuis un bail, mais l’a enfin réalisé
et il est maintenant plus que mûr pour de nouvelles aventures…
En passant « The Prisonner » que j’ai dû zapper dans le foisonnement de
ses productions, c’est de façon plutôt radicale, tant en conception,
composition, énergie, prise de son et production (Herbie passe chez Warner) et
en s’emparant du Fender Rhodes que l’album « Fat Albert Rotunda » va
me creuser les méninges.
Et, curieusement, c’est par une version de « Tell
me a Bedtime Story » recadrée et remesurée par Quincy Jones (« Sounds
and Stuff like That ») qui sera mon premier arrangement officiel que je vais définitivement
adopter Herbie, son jeu, ses compos, son groove, son immédiateté et ce côté
roots indéfinissable mais qui prend le corps. Chez Quincy, Herbie y tombe une
sorte de solo de sa propre école repiqué et doublé par des cordes – une idée
plus qu’une réelle originalité, un axe pourquoi pas critiquable « à la Quincy »,
bref…
Mais en fusionnant pour la nécessité d’écriture les deux versions et en ne
cessant même encore à ce jour d’avoir la chair de poule dès l’écoute du thème
dans la version originale, je sais que c’est là et de là que j’ai tiré nombre
de mes us d’écriture et d’ouverture en ce sens d’arrangement/orchestration.
Il faut un point de départ – mon passage sérieux et surtout réalisable car j’avais
la possibilité d’un orchestre pour ce faire, fut « Tell me e Bedtime Story »
et je sais que ce titre avec ses facettes et tiroirs multiples tant
harmoniquement que mélodiquement a été bienfaiteur tant que compliqué pour me
servir de tremplin.
A cette époque il n’y avait pas de logiciels d’écriture musicale genre Finale
(que j’utilise désormais en édition musicale), tout se faisait, K7 en platine,
papier musique devant soi et crayon gomme obligatoire… « à la table ».
Se procurer un real book c’était « sous le manteau » et certains, de retour de la célèbre School américaine en profitaient pour en tirer,
photocopies à l’appui, un revenu subsidiaire non négligeable en revendant le
graal noté, du jazz.
J’ai donc, comme par la suite je l’aurais fait avec de nombreux titres et
arrangements, transcrit.
Cette obligation est restée, de toutes façons, tant bénéfique qu’utile.
Puis, le matériau transcrit, l’arranger en se plongeant dans des manuels divers
d’orchestration, en écoutant avidement Gil Evans, George Russell, Count ou Duke
et Miles et surtout en déduction afin de chercher mentalement le son de l’ensemble,
associant les instruments, respectant leurs « obligations » a été
plus qu’un exercice… c’est devenu une véritable passion et le reste aujourd’hui.
C'est aussi devenu un métier et je dis merci à chaque fois, à chaque commande, à chaque envie d'arranger (récemment les fameux Children's Songs de C. Corea, justement, pour orchestre à cordes)... à Herbie et à Quincy.
Aussi ce titre est et reste pour ma part, symbolique et il a embarqué avec lui son
compositeur dans ma vie.
En connaitre chaque recoins, chaque détour, chaque angle m’aurait presque fait
oublier l’incroyable virage qu’est l’album dans le chemin que prit Herbie
arrivé à ce carrefour de choix multiples…
Je réécoute cet album et j’y trouve tout ce que j’aime chez Herbie, ce très
cher Herbie qui désormais tant affectueusement que budgétairement (il cassera
souvent ma tirelire et je chercherais avidement ses-ces imports japonais en collectionneur
compulsif de l’artiste) sera tant mentalement que concrètement, dans ma vie.
« Fat Albert Rotunda », impossible d’y résister…
Et c’est là que je mets la touche « pause » afin de préparer la suite…
Herbie a donc droit ici à plusieurs épisodes.
La saison 1 s’achève avec ce pur joyaux, le Fender Rhodes est installé, les
cuivres riffent funky, les solos sont maintenant groovy et s’installent dans
les rythmiques qui bientôt vont s’émanciper vers pianet ou clavinet et la
guitare est venue s’additionner en cocottes, rythmiques, sorte d’adjonction
entre axe percussif et riffs sous hypnose, giclées de wahwah et interjections
bluesy.
Les solistes doivent gueuler pour se faire place au milieu de cette électricité.
Le drumming s’est schématisé, alourdi, binarisé de façon funky sans détours,
avec breaks cadrés en place de souplesse féline et libre… associé à une basse
obligatoirement électrique qui va s’inventer des lignes là où sa copine était
en promenade (parfois ça s’apparentait plus à du jogging… dans Central Park
bien sûr).
Miles a tout pigé et part avec « In a Silent Way » vers une
exploration qui va faire exploser les schémas, tout remettre en place et faire
beaucoup réfléchir.
Herbie va non suivre, mais faire à sa façon…
Mais ce sera pour la saison suivante…
En attendant Blue Note a de bien beaux épisodes à suivre et-ou à se refaire pour
ceux qui les connaissaient.
Si tu veux , je peux proposer les albums d'Herbie Hancok de 1971 à 75 sur notre blog. Cela fera ainsi écho à ton article et à celui de de DevantFS sur le funk. Peut-être pas tous, mais un ou deux. Je ne saurais pas trop quoi dire parce que je ne connais pas grand chose techniquement et je ne les connais pas à fond pour avoir une relation aussi intime avec que toi, mais je trouve l'idée intéressante de faire revivre une petite communauté de blog avec des approches complémentaires.
RépondreSupprimerDis-moi si ça t'intéresse.
Complètement !
SupprimerOui bien sûr, en effet, avoir des approches complémentaire et rebooster ainsi qq blogs c'est une très bonne idée...
71 à 75 ... le grand cru funk de herbie... des tas de pépites, une obsession wonderienne et l'arrivée des synthés analos à gogo...
Ce sera aussi ma série 2, forcément...
THX
Hello Chris,
RépondreSupprimerPas eu le temps de te répondre hier - j'étais ... au piano ... et je suis rentré tard ...
c'est vrai que face à de telles discographies on s'y perd et on a peur de faire un choix rédhibitoire...
Sur cette première saison (la suivante est en cours d'écriture) "Takin off" sera l'entrée la plus évidente avec son tube, mais s'embarquer sur "Empyrean Isles" c'est un peu comme le Valérian du jazz...
Et puis "Fat Albert Rotunda" pour transition.
Enfin, bref, ils sont tous tellement excellents tant que divers ce Blue Note de HH que franchement, je ne sais que te dire de mieux... Alors essaie le chronologique...
Et puis "EtCeterra" de Wayne, album oublié et non sorti à l'époque de son enregistrement et sorti quasi 20 ans plus tard avec le titre "Barracudas", là tu touches à ce jazz sublimé...
bon dimanche.
Marrant, la proposition de Audrey... j'ai au la même idée, poussé par ton papier feuilletonesque et par un article dans le bouquin FUNK qui me sert de fil - j'y ai pêché le M. Clinton - du coup après t'avoir lu, j'ai été voir si il y avait une entrée pour Herbie Hancock, Hoooo que oui, un chouette chapitre consacré à "Headhunters" qui sera probablement dans ton prochain épisode? Album jugé comme THE JALON Soul Jazz Funk... du coup, pour vous/te suivre, je m'écoute "Fat Albert Rotunda" & "Headhunters"
RépondreSupprimerEn tout cas par ton intervention et en multipliant les lectures, je prends conscience de la taille du bonhomme. GEANT!! à suivre
Et oui, le bonhomme, géant...
SupprimerEt pour les headhunters et cette période synthé-robot funk c'est effectivement dans la saison suivante... car Herbie, ça mérite effectivement plusieurs épisodes...
Content que ça te branche !
à très vite donc...
merci du passage !
La période jazz/funk de Herbie et ses Headhunters là encore c'est la partie visible de l'iceberg... et la proposition d'Audrey est très intéressante... que va-t-elle sortir de cette foisonnante poignée d'années... ?
SupprimerAllez, on joue... je sais que t'aimes ça.
Tiens, je te donne un indice et une énigme à résoudre - dans un des albums bien grassement funk de H.H il y a un titre hors cadre, hors norme et comme tj chez H.H, qui te dit "attendez les gars, c'est pas fini, on va bientôt passer à autre chose..." donc, dans lequel et dans quel titre Adrian Belew tient-il une place tant inhabituelle vu le contexte qu'inédite, mais bien sûr réussite totale... ? ? ?
Allez, à toi de jouer... et t'as le temps car ce sera certainement dans la saison 3 ici...
Bon allez hop, H.H et apéro ...
à +
Avec Adrian Belew? C'est une seule réponse avec deux indices?
SupprimerPas encore fait ma recherche, je reviens juste dire que l'écoute "Fat Albert Rotunda" a été très convaincante, à conseiller car pas trop dans l'avant garde ou l'exploration, c'est bien simple, j'ai de suite pensé à des albums de Quincy Jones et par rebond, je me suis replongé dans les albums BLAXPLOITATION qui pourrait faire l'objet de mon lien avec ton post.
Supprimerà suivre
Au fait si je te dis "Magic Windows" et un papier de Mai 2018?? Hein, Hein!! Je brule? Un papier de ... de... car je garde ce qui m'a incité à télécharger.
c'est bon, t'as plus qu'à donner le titre...
Supprimeroui quincy mais aussi les BO de shiffrin, toute une époque.
à +
Facile... mais il faut écouter jusqu'au bout ;-) C'est bien simple je me suis jeté sur la date de "REMAIN IN LIGHT" des Talkinh Heads. Finalement il y a comme une oreille à la DAVID BOWIE, pas pour le style mais pour cette faculté de s'approprier les exploration du moment et les faire sienne. Le reste se place très bien mais le TWILIGHT a dû dérouter j'imagine. Sur les pistes de danse, la boisson était à échanger
SupprimerThe Twilight Clone...
SupprimerLa période où Adrian Belew sort de l'ombre...
Il est effectivement partout T.Heads, KC, Zappa et bien sûr Bowie qui le repère très vite.
Ce jeu si particulier, cette pâte, cette façon d'explorer le son avec la guitare qui sort des usages...
H.H ne pouvait qu'imaginer une telle rencontre, encore fallait-il oser la provoquer et écrire le titre adéquat... Comme si les rockers du futur rencontraient le funk...
J'ai écouté ce titre en boucle... et même tenté avec notre groupe de l'époque de nous embarquer dans cette voie (je dois avoir des vieilles K7 d'enregistrement de ces sessions qq part) - comme quoi ça interpellait et créait une émulation créatrice...
Le groupe n'a duré qu'un été de sessions et le guitariste/bassiste a ensuite été repéré par P.Gab lui même... donc on était sur la bonne voie.... ;)
Bon t'as gagné un verre de rosé (plusieurs, selon ?) quand tu viendras dans le sud, si toutefois on arrive à refaire des concerts (c'est mal barré...) - on choisira du bon, bien entendu, j'ai des a priori à modifier...
Ha ha ha je suis dans le "grand" sud je vis depuis de nombreux mois à Menton chez Pascale. Retour à Paris un peu beaucoup? Juin Juillet... Tu me tiens au courant pour voir si Menton c'est près ou pas, "nous" avons une voiture A+ Et vive le rosé (pas trop vif!!)
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