LIVE et souvenirs…

 

LIVE et souvenirs…

Entre les épisodes de la saga Herbie, on va plonger dans la chaleur humaine, démasqués et fébriles…
Quelques souvenirs, le partage, l’amour, la communion…

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On va peut-être bien pouvoir revenir sur scène(s) – on en frémit d’avance et repartager collectivement ou presque, la musique.
Après moulte volte faces notre gouvernement qui d’ailleurs n’est pas notre (en tout cas n’a jamais été le mien, d’ailleurs gouverner, se laisser gouverner…), donc disons, le gouvernement avec une Roseline, qui est noyée dans l’incohérence, a réalisé que l’intermittence et un été trop tardif pour espérer remplir un cahier des charges de dates devenu course au cacheton, ne pourra certainement pas se « refaire »…
Ouf…
Mais déjà, ça se demande où est le piège, normal… avec ces zozos-là, y’a toujours un piège.
Calendrier en mains, Roseline a également réalisé que faire reprendre les cours collectifs et autres orchestres d’élèves vers le 19 juin alors qu’il ne restera qu’une poignée de jours de cours et que les familles seront en plein brevet, bac, exams… c’était peut être une … connerie…
Donc après avoir saccagé par des mesures incohérentes et stupides, en considérant les acteurs du secteur comme des abrutis irresponsables, un enseignement artistique déjà largement sacrifié, elle a calmé un jeu destructeur en « autorisant » une reprise le 19 mai…
Orchestres en demi jauge (ah bon ?), cours collectifs, peuvent désormais se bousculer pour une maigre poignée de dates rédemptrices de fin d’année.
Il ne reste que 3 semaines de répèt’…
Faire six mois de taff en trois semaines, ça va être un vrai challenge pédagogique…
Les seuls cours qui n’ont pas manqué c’est peut-être ceux de… FM (pardon, anciennement solfège…).
Là encore c’est le bonheur…
Excusez-moi, je reste sceptique.
Oui c’est bien et tant mieux pour tous mais… avec déjà le constat d’un énorme pourcentage de démission des usagers dû à cette gestion calamiteuse et crétine ce sauvetage de meubles s’il n’est pas assorti de réelles mesures là, rapides, afin non de reprendre la vie d’avant (tu parles) mais de réfléchir à des stratégies afin de rebooster nos métiers, ne servira pas à grand-chose.

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Bon, la musique et Macron, l’art et Macron…
C’est un peu antinomique.

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J’y étais…
Enfin si c’est l’album d’une tournée en tout cas, oui…

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SOFT MACHINE « Alive and Well » - Théâtre Le Palace / place n°005202, prix 25 Fr 09 juillet 1977.

On traine depuis une poignée d’année ensemble avec mon pote Thierry.
Lui est artiste peintre naissant mais déjà bien affirmé, moi je termine mon conservatoire, je joue du free rock dans ce local participatif, juste derrière la gare de Grenoble.
J’ai été engagé récemment en choriste pour des tournées et le pognon m’a permis de prendre un appart en loc’.
On s’offre une grosse semaine à Paris, entre amis.
Au menu, musées, expos, ciné et concerts.
Led Zep a sorti son film avec délires individuels sur prises de concerts au Madison Square, on se retrouve à Pigalle dans un club zic/vidéos music et on se boit un verre en matant ce monument ou Plant et Page s’éclatent sur la déferlante Bonham /Jones.
Je ne m’en suis toujours pas remis…
« Black Dog » résonne encore et toujours dans ma tête.

Lido Music, les Champs… Affiche… Soft Machine, au Palace.
On fouille dans nos porte monnaies et nous voici avec le précieux sésame, petit ticket orangé qui va nous ouvrir les portes d’une soirée imaginée forcément réussie et à graver en mémoire.
Ce le sera.
Ce soir-là, le Soft Machine d’une autre génération sous emprise de Karl Jenkins, avec un John Marshall au sommet de sa forme va nous embarquer vers le futur au travers d’un jazz qui reste encore rock mais qui se barre trop English pour s’assimiler totalement à ce mouvement finalement bien américain.
Une écriture proche du savant, des mélodies d’une rare beauté, des solos débridés, un Etheridge qui s’émancipe de Holdsworth, un Sanders qui est bien loin de nos Lockwood et autres french stars du violon électrifié et bien proche d’un Cross de chez KC et un pilier, Steve Cook.
Jenkins a un attirail synthétique digne de Tangerine Dream et il nous embarquera vers le futur, d’ailleurs en quittant la scène, la laissant aux machines…
Le programme sera un mixte de « Bundles » et de « Softs », ces deux albums que je place très haut dans ma sphère de mémoire d’écoutes usées et il présentera de nouvelles compositions, toutes aussi captivantes que leurs ainées.
On s’est assis, on est restés scotchés et l’idée de briser cela à l’entracte par l’achat compulsif d’une boisson a été rapide, histoire de ne pas louper la reprise de la seconde partie.
Ce concert fut intense, une réelle plongée dans toute cette musique que j’écoutais et tentais de jouer à en perdre la raison.
Le retour, en métro, puis R.E.R, puis à pied jusqu’à cette lointaine rue du bois, au fin fond de Chennevières, chez une amie de la famille qui nous avait hébergés pour cette escapade fut pour une fois quasi silencieux.
La musique avait pris bien trop de place dans nos esprits de gamins.
Puis est sorti « Alive and Well » et je n’en ai pas cru mes yeux, ni mes oreilles…
Mes yeux, car au milieu de la salle, là, sur une photo minuscule je sais que c’est nous.
Mes oreilles car de fugace ce concert est devenu ré-écoutable à l’infini… et pour le réécouter, ça, je l’ai réécouté…

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VAN DER GRAAF GENERATOR « Vital » - 1978.

Grenoble, patinoire, je crois…
Je me laisse embarquer par notre petite équipe d’écouteurs gouteurs de toutes musiques à ce concert.
« Over » a été mon entrée pour le groupe, un album déprimé/déprimant de Peter.
Le genre d’album qu’en mode spleen ado tu passes en boucle dans ta piaule en regardant l’infini plafond, larmes effleurant les joues, pensées tournées vers (déjà) l’idée d’un avenir où l’incertitude de tes choix (musique ? comme métier ?...) ne trouve pas vraiment de réconfort dans ce déballage intime sur fond de rupture du barré du bocal si attachant qu’est Peter.
Il est passé à la TV, habité comme jamais.
Il avait fallu attendre la nuit pour ça mais franchement ça valait le coup.

Alors l’idée de le célébrer en live, avec un nouveau VDGG ça méritait de casser la tirelire.
D’emblée, quand ils sont arrivés, ont empoigné leurs instruments et déchiré le spectre sonore de la salle, je me suis demandé si cela était bien possible.
La portée de cette musique, augmentée des quelques substances que l’on prenait alors afin d’un voyage plus participatif a fait comme un tatouage, c’est resté gravé dans mon esprit, mais aussi dans ma peau.
Peter est devenu emblématique, charismatique, une sorte d’idole, de grand frère habité et montrant un chemin pas forcément à suivre…
Le groupe jouait fort, très fort…
J’en avais vu des groupes de punk, métal et autres, mais aucun n’avait jamais égalé cette puissance, cette masse sonore, cette densité agressive et hargneuse.
Tous ceux là me sont apparus d’un coup de rage de « Ship of fools » comme superficiels, désuets, inutiles – ici VDGG nous transcendait dans une puissance sous contrôle, une volonté de fer et un message impossible à éviter, oublier, zapper.
Une marque au fer rouge, indélébile et quand notre ami Dev’ ressort de son étagère cet album pour vouloir en parler je lui dis que, c’est peut être bien l’un des concerts les plus forts que la vie m’a offert.
D’habitude en sortant du concert on trainassait, on allait boire un coup et on se refaisait le concert.
Je me souviens que chacun est monté dans son trolley respectif, l’horizon était sombre et le poids sonique de VDGG n’était pas prêt de partir de nos âmes.
Un très grand moment…
Oui, très grand…

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BOB MARLEY « Babylon by Bus » - 1977.

Grenoble, vélodrome/patinoire…

Je commence tout juste à apprécier Bob.
Il a envahi les espaces ados, étudiants.
Il n’y a pas un radio K7 qui ne diffuse sa musique.
Il est le compagnon obligatoire des virées en groupes.
l’Ardèche est une destination où camping sauvage, Coccinelle et canadienne font mélange avec le reggae. Bob, Steel Pulse, Third World, Tosh… ont remplacé les groupes rock et il n’y a bien que le punk qui peut cohabiter avec cette déferlante de contre temps omniprésents et hypnotiques.
Le joint est de mise et on en consomme sans limites, cette musique se surdimensionnant dans les esprits en partance.

Bob passe donc à Grenoble.
Il est en pleine gloire et aller à son concert est juste une évidence, une obligation, tout comme je suis allé aux concerts de Police, Patti Smith ou au premier Mont de Marsan…

La fosse est bondée et en petite équipe de potes bien organisés que nous sommes, après quelques joints fumés en attendant l’ouverture des portes, on va tenter la ruée vers l’avant-scène. Ce sera presque possible… En tout cas Bob sera à très courte portée de vue.
Voilà bien un concert impossible à se défaire de sa mémoire…
Le son d’abord – on vantait les compétences des ingés son jamaïcains dans toutes les revues, les truc hifi, etc…
Là on a pu vérifier… ENORME !
D’abord la basse et c’est ce qui m’a le plus marqué.
Cette vibration passant par le corps tout entier, qui te prend des pieds à la tête, qui envahit tout ton être, jamais ressenti ça avant…
Et associés à ce beat de grosse caisse gras, épais, massif et up à la fois ? comment résister ?
Non, se laisser envahir, porter, partir.
Bob, tout de jean vêtu parcours la scène, harangue la foule et prêche son rastafari.
Son message, son charisme…
Les I Threes mènent le bal, Junior Marvin est un guitar hero qui s’ignore…
Oui, il est passé à Grenoble. C’était pour lui une date parmi tant d’autres de cette tournée en bus.
Pourtant comme partout où il a propulsé son message, Bob a laissé une trace ineffaçable.
Ce lieu vraiment pas adapté à la musique et aux concerts a encore vibré longtemps et vibre encore certainement de ces basses enfouies en lui mais restés là.
A chaque fois que je mets cet album je suis d’emblée replongé dans cette foule de bonheur, cette exaltation, ce partage.
Et je relie toujours Bob à ce concert.

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WEATHER REPORT « 8 :30 » - 1979

Vienne nous offre son premier festival de jazz, ou presque – enfin dans le théâtre antique.
A l’affiche Herbie Hancock Quartet avec Wynton Marsallis dé pouponné des Messengers et émancipé de son frangin. Tony, en salopette coloriste fracasse sa Gretsch jaune pioupiou, Wynton encore jeunot circule entre Freddie et Miles et cherche déjà sa propre voie, Ron semble fatigué mais tient en bon capitaine le cap et Herbie est tout au service de cette jeune recrue pour laquelle il force le trait d’admiration. Ils jouent Monk, Herbie, Ron et Wayne (enfin, le Wayne de Miles).
Wayne n’est pas là, pour cause… car juste après…
Inoubliable et un album studio ne pourra pas malgré son énorme qualité faire office de remplacement d’un tel moment…
Puis le staff s’affole.
Une bardée de synthés empilés les uns sur les autres comme un assemblage de Legos est à gauche de la scène, la batterie trône somptueuse au centre, sous les synthés on distingue les micros sur pieds, la place de Wayne et à droite l’espace réservé sent bon le show. Ampli « acoustic » imposant, beaucoup attendent Jaco, d’ailleurs de ce côté de public, je reconnais nombre de bassistes.
C’est… leur soirée.
L’entracte s’étire. La régie s’emberlificote dans ces araignées de câbles et pire, au loin, en ce soir du mercredi 11 Juillet, l’orage gronde puis arrive.
L’ambiance sera donc tant électrique qu’urgente.
Une pluie torrentielle va s’abattre sur nous et tout habitués des bulletins météo qu’est le groupe ils se retrouvent coincés dans cet aléa climatique.
Mais un orage c’est passager et en bons princes qu’il sont le concert chaotique car entrecoupé d’attentes d’incertitudes et finalement d’explosion festive sera lui aussi inoubliable.

Peter est une expression du bonheur à lui tout seul, son drumming arrache tout sur son passage et ce jeu issu du Big band fait ici mouche pour renforcer, appuyer et booster l’orchestre synthétique de Joe.
Wayne circule entre écrit et solos hurlants et Joe, flegmatique apprécie, observe, tonifie cette équipe enfin stable qui aura porté le groupe vers la renommée tant méritée et attendue.
Ils sont au sommet de leur forme, de leur jeu, de leur musique aussi.
Jaco inonde la musique, la scène, le son… de sa présence.
Le concert a démarré sur les chapeaux de roue, tel un ovni et jusqu’à la pluie un ruban, un flot ininterrompu de lyrisme, d’impros contrôlées, d’écritures savamment agencées emplit ce lieu antique. « Birdland », « Black Market » … Jaco transcende tous les titres, Wayne s’épanche en émotions, Joe colorise, nuance, pianote en soliste sur son CP Yam et Peter, oh combien subtil dimensionne tout ça.
Mais l’orage gronde et la pluie va interrompre cette magie.
Le staff sous l’œil inquiet de Joe s’affaire à couvrir et protéger de l’eau toute cette électricité et ce matériel qui lui est tributaire. D’autres s’affairent sur la batterie de Peter et Wayne est parti s’abriter.
Jaco prend alors le pouvoir absolu, qu’à cela ne tienne… et, alors que tout ce beau monde grouille sur la scène le voilà qui offre au public, trempé (lui aussi) ce fameux solo qui ici prendra une dimension inoubliable, incommensurable et dangereuse (ça flotte vraiment) …
Il va alors transformer ce concert galère en un moment incroyable, le sauver des eaux, lui donner un relief inattendu et son solo, habituellement placé en performance dans la tournée va ici se transformer et prendre une place encore plus particulière dans la mémoire de chacun.
La façade de la sono est coupée, ses amplis sont couverts et protégés, il va vers eux, les pousse et va en une messe vaudou faire la nique à cette météo qui ce soir là a voulu s’inviter et jouer les trouble fêtes.
Le retour en force du groupe, l’orage passé, sur cette scène trempée pour une poignée de titres n’arrivera pas à effacer cet immense moment de partage que nous a prodigué Jaco, ce soir-là.

On ne peut pas lutter contre la météo – Jaco lui, l’a fait…  
Et même si « Slang » ici recasé dans cet album - où 8:30 n’est autre que l’horaire communément affiché pour les concerts – apparait comme anecdotique, je me rappelle de l’autre « Slang », celui où un théâtre accaparé par des organisateurs volontaires et passionnés s’est transformé de panique en magie.
Il est des moments…

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Bon, prêts ?
Vous avez encouragé commerces, petites entreprises pendant cette crise arrangée et récupérée qui nous a appris à l’autrement.
Il va falloir encourager ce retour de la musique sur les scènes maintenant…
Et c’est pour là, tout de suite, ou très bientôt.
Ou très vite.
On vous attend.







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