(PRAHA – Noël 2024) ...

 

(PRAHA – Noël 2024) ...

Ce n’est pas nouveau, quelques petits jours (2 en tout) dans notre ville fétiche, avec mon épouse, Prague.
Quatrième escapade tchèque en capitale, la première en visites des points phares, la seconde en visite des musées et autres lieux plus symboliques (Kafka, Quartier juif et son cimetière séculaire où les familles du monde entier viennent chercher un ancêtre, une filiation et se recueillent), troisième ciblé quartier où Mozart composa son grandiose Don Giovanni, donc un séjour axé sur la musique, principalement.
Et tout cela se fit en été.
Cette fois, on a opté pour l’hiver.
Noël s’espérait à Prague sous la neige, mais - sans accuser un réchauffement climatique dont tout à chacun ne cesse de parler pour ne rien dire ni faire et qui est récupéré chez nous par un penchant gauche afin de politiser une profonde alerte qui n’est d’aucun bord mais de simple sens commun – nous avons eu un temps ensoleillé et les pulls et autres gants sont restés en valises.
Noël à Prague comme tout à Prague, quelle que soit l’époque de l’année, c’est toujours et systématiquement- même si la ville en plusieurs années a muté et s’est concrètement européanisé (en gardant tout de même sa monnaie, la couronne tchèque – diviser le prix affiché en Cr par 21 pour obtenir le montant en Euros, excellent pour le calcul mental) – une plongée dans la tradition, l’attachement aux valeurs, la représentation délibérément nationale mais aussi la ferveur religieuse inébranlable.

En deux jours pas eu le temps d’aller au concert, mais de toute façon à Prague la musique est partout, il suffit de se laisser guider.

Prague c’est aussi la ville européenne où l’on consomme le plus de bière (en général la Pilsner) et, puisqu’on parle boissons sans déraison, le vin de Bohème est particulièrement dense et fruité, idéal pour accompagner les plats traditionnels qui, copieux, permettent en peu de jours d’augmenter sensiblement le chiffre de votre balance vers des sommets inattendus.
Goulash, Choux Rouge, Canards et autre Jarrets de Porc sans parler du célèbre Trdelni’k qui est à la ville ce que la crêpe est à la Bretagne.
Quant au chocolats…
Bon j’arrête là, ça me donne faim.

Noël à Prague c’est aussi l’occasion de montrer aux enfants des écoles, tous affublés de gilets jaunes ou oranges (mais ils ne manifestent pas – ça c’était plus violent et avant, certaines traces de ce passé sont encore vivaces d’ailleurs), les métiers artisanaux et manuels encore en vérité.
Comme l’atelier du maréchal ferrant, où chacun y va de son marteau sur enclume.
Des classes sages, disciplinées, organisées et attentives à l’interlocuteur … sans commentaire supplémentaire …

Prague est une ville paisible, peu de voitures (un peu plus qu’auparavant mais avant tout des taxis et autres Uber locaux comme chez nous peu scrupuleux…) et une infrastructure de transports en commun qui laisse pensif tant elle est au service des praguois.

Bon, Prague, en une bonne décennie de visites au nombre de quatre a évolué mais n’a pas profondément muté comme d’autres cités européennes.
Cette ville reste une destination dépaysante, reposante et captivante tant humainement que culturellement.
On apprend beaucoup des praguois et des tchèques en général.
On est confrontés à la courtoisie, le respect, l’accueil, l’organisation et la discipline et en même temps ville truffée de jeunesse, on y fait la fête à longueur de temps.
Les seuls fêtards exubérants ne sont pas praguois, ce sont des touristes.
Le praguois est fêtard mais sait rester discret.

L’hiver on part , pour Prague, côté aéroport, dans le sud, depuis Marseille.
Cet aéroport est le plus bordélique, sale et désorganisé qui soit.
Mon épouse a besoin d’une assistance médicale pour se déplacer.
A Marseille on l’oublie dans les couloirs, on la trimballe avec un matériel médical digne d’un achat à 5 € dans une brocante de village, etc. ce malgré un personnel attitré des plus sympas et gêné de la situation qui pourrit leur quotidien professionnel.
Ne nous leurrons pas, c'est toujours le personnel qui trinque ...
A Prague, aéroport reluisant, service immédiat dès la sortie de l’avion, bref, le jour … la nuit …
Départ de Nice, différent, mais l’été seulement.

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Prague ou tout autre voyage d'ailleurs, s’accompagne forcément de musique en ce qui me concerne.
Aussi je vais vous partager, simplement, la B.O qui m’a accompagné pendant ce court séjour.

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HAYDN 2032 – VOL 16 – « The Surprise ».
Symphonies 98, 94, 90 par Il Giardino Armonico ou le Kammerorchestra Basel dir. Giovanni Antonini.
+ La Scala di Seta – Sinfonia de Rossini.

J’ai déjà chroniqué cette formidable initiative du chef Giovanni Antonini consistant à mettre en catalogue, d’année en année et d’œuvre en œuvre, jusqu’en 2032 le patrimoine musical de Haydn.
Ce nouvel opus avec l’emblématique Symphonie dite « La Surprise » au célèbre coup de timbales qui éveillait les assoupis des concerts londoniens, s’avère tout aussi remarquable que les autres.
Giovanni Antonini, arrivé à un 16e volume connait à la perfection le sujet musical (et forcément biographique) du compositeur qui a tant apporté pour réformer structurellement la musique et sa forme.
Chacune de ces trois symphonies est à écouter soit dans l’enchaînement proposé qui s’organise avec une grande logique, soit pour elle-même dans le cadre d’une plongée plus spécifique, un choix à faire qui, pour le premier se conclura par cette Sinfonia de Rossini issue de son opéra « L’échelle de Soie » afin certainement d’engendrer une réflexion quant à une influence certaine, une forme de filiation, etc.

Direction, prise de son, qualité et précision de l’interprétation sont au rendez-vous – d’autant que j’ai écouté la musique pendant ce séjour, au casque.
Bref, avec l’ambiance, l’architecture, la vie de Prague, ce répertoire du viennois (bien que certaines appartiennent au cycle londonien) s’assimile parfaitement à la vie praguoise et plus généralement à l’idée sociale de l’époque du compositeur.

L’album s’ouvre avec la Symphonie N° 98  en Si bémol Majeur et son introduction Adagio en unissons dramatiques qui ensuite va jouer sur les contrastes avec ce jeu de clair/obscur en vogue, suivie d’un superbe second mouvement Adagio, oscillant entre écriture choral et balancier harmonique qui va se dramatiser en mode mineur…
Puis ce sera le Minuet au pas marqué, renforcé et presque martial, avec là encore ce jeu de contrastes de nuances mais pas que avant de conclure par un Finale/Presto enlevé à souhait jouant sur les pupitres et s’imposant à grand renfort de cors.
En second la fameuse Symphonie N°94 en Sol Majeur dite « La Surprise » qui va jouer elle aussi des contrastes, mais de nuances avec de forts accents, de souples mélodies à évocation champêtre, tout cela joué avec un caractère enlevé, tonique, vivifiant. Et comme toujours un second mouvement, cette fois Andante, somptueux et à l’écriture où les contre chants ont le part belle – chez Haydn a musique est un tableau aux multiples plans et détails.
La Symphonie N°90 en Do Majeur, quant à elle s’ouvre de façon quasi martiale, imposante, pour s’alléger rapidement en toute dentelle puis l’Allegro Assai entre en lice progressivement là encore en jeu de contrastes, ce mode d’écriture suscitant l’attention et le jeu d’interprétation récurent chez le compositeur. Cordes détachées qui s’arrêtent sur un point d’appui, le phrasé suffisant à lui seul pour l’expression, ruptures avec courts arrêts afin de « respirer », soutien en accents toniques, jeu de pupitres et de timbres (les cors et les flûtes, chez Haydn, tout un modèle d’école). Tout l’orchestre a « la parole », une équité qui, là encore sous couvert d’usages qui aujourd’hui semblent acquis, n’était pas spécifiquement fréquente alors.
J’aime toujours les seconds mouvements de symphonies, celui-ci n’échappera pas à cette règle d’appréciation personnelle, c’est là que l’émotion s’invite, que les sentiments s’expriment, que la beauté intérieure de l’œuvre transparait.
La symphonie va s’achever comme il se doit par un mouvement rapide – Allegro Assai. Un moment volubile où là encore les timbres se répondent allègrement sur fond de puissantes timbales, le tout auréolé d’accents permettant des diversions rythmiques et des contrastes d’accompagnements fulgurants.

Puis il faudrait presque oublier Haydn pour Rossini, lui aussi véritable joueur du contraste.
Pour cette Sinfonia les bois auront la part belle, souples, délicats, élégants … soyeux…
Puis vient le festival de ces cordes véloces qui vont jouer avec le hautbois et alors les contrastes, tel qu’en l’école du grand maitre viennois vont faire figure de résurgence, avec l’humour et l’humeur en sus…
Quoiqu’il en soit cette Sinfonia s’intègre parfaitement dans ce programme, même si elle offre d’autres perspectives.

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MOZART – Piano Concertos N° 20 et 23 / Piano Sonata N°16 – Katia Buniatishvili.

J’ai dit tout le bien à propos de cet album dans une précédente chronique piano pianissimo… je n’y reviendrais donc pas, même si la plongée, au casque, dans cet univers mozartien subliment interprété prend une dimension inédite et surtout une place dans le mental d’auditeur absolument envahissante d’émotions.
Le génie mozartien où vont se mêler buffa et seria sous l’égide du drama giocoso s’expriment et s’épanchent là dans un jeu de rôles théatro-musical-instrumental où le rire, le sourire et l’humour côtoient sur la même échelle, les larmes, la détresse et le soupir affable anticipant ainsi ses futurs grands opéras où le jeu des sentiments se mêle avec élégance, sensibilité et galanterie.
Par ces ouvrages, auxquels Mozart attachait une importance et un soin tout particuliers, le compositeur étant adulé et reconnu comme pianiste était désireux d’inonder la scène viennoise de la reconnaissance à la fois de ce trait instrumentiste, mais surtout, il voulait conquérir par-là et par eux, Vienne, comme compositeur.

Une B.O praguoise impérieuse et impérative avec laquelle la ville s’auréole de toute sa féérie – en plus, de Noël …

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MOZART « Die Zauberflöte – Highlights » - Claudio Abbado/Mahler Chamber Orchestra.

Le décryptage symbolique de cet opéra, le dernier du grand compositeur, a fait couler beaucoup d’encre, soulevé bien des énigmes et des polémiques sous son apparente simplicité quasi naïve et fantasmagorique.
Une nuit et ses forces obscures et la lumière, révélatrice …
Un oiseleur et son double féminin …
Un prince et, forcément, une princesse …
Un univers fantastique peuplé de créatures …
Un mage …
Une symbolique franc maçonnique émergeante …

Et puis, et surtout … il y a la musique de Mozart qui en a réellement bavé pour composer cet ouvrage considérable, aux arias, duos et autres moments absolument somptueux, sommets de son art mélodiste et de la maitrise de l’art vocal, sans parler de ces chœurs d’une telle profondeur d’écriture et d’une écriture orchestrale à un tel niveau de service du sujet que c’en est, Mozart oblige, génial.
Karajan, Boehm, Nezet Seguin et puis, voici Claudio Abbado, parmi d’autres et tant d’autres interprétations.

Celle-ci propulsée par le regretté Claudio Abbado possède une approche d’une rare finesse, d’une rare délicatesse et élégance, ce qu’il ne faut jamais oublier quand l’on pense Mozart.
Alors elle irait presque vers mes préférences que ce soit pour la formidable tenue orchestrale du grand chef, toute en subtilité de précision des timbres comme en souci de chaque détail de la partition qui ici s’inscrit dans l’audition, d’une façon extraordinairement lisible, méticuleuse, subtile.
Quant aux solistes les voici dans une légèreté de jeu vocal qui tranche avec les interprétations souvent imposantes, lourdes, appuyées et puissantes dont l’œuvre a été enrobée par d’autres de leurs confrères. Ici la finesse est un rendez-vous qui permet au texte musical mais aussi à cette langue allemande si difficile à musicaliser vocalement (ne parlons pas du français…) de mettre en lumière chaque partie de cet opéra essentiel et grandiose.
La version réduite en highlights permet une vision – avec une organisation des plus pédagogiques – globale, synthétique, résumée … des plus attachantes et l’album va défiler comme un chapelet de merveilles et d’émerveillements à chaque plage.
Dès l’entrée de Papageno et en attendant bien évidemment la performance tant que l’infinie beauté d’une Reine de la Nuit là encore simplement légère, délicate et réellement /follement émouvante, avec au passage le jeu aérien de Tamino ainsi que la puissance sans lourdeur de rôle et de voix de Zarastro, cette version réduite (il faut également écouter celle complète) de cet incontournable monument de l’histoire de la musique et de l’opéra est en tous points … enchantement.

On croit, on imagine, on pourrait penser procéder par étapes dans ce voyage au gré des actes et au sortir il est impossible de s’en détacher et on est surpris d’avoir écouté l’album dans son entier avec curiosité, avidité et passion tant cette interprétation attire l’auditeur.
1h15 environ de pure magie musicale.

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« Qui a assassiné Mozart ? et autres énigmes musicales – E.W. Heine – les éditions du sonneur.

Lire et prendre ce temps pour le faire est malheureusement chose rare et luxueuse.
J’envie encore cette époque d’études et d’enfance parisienne où, pendant mes heures de métro je faisais mes devoirs, apprenais mes partitions, développant ainsi cette fameuse « oreille absolue » avec la seule aide du diapason et surtout, où, tout en fredonnant mentalement ces mélodies acquises, je lisais…
Le futur walkman n’existait pas encore, la K7 en était à ses balbutiements, la musique était comme ce livre intéressant, une « partition intérieure » et la lecture… c’était l’évasion garantie.

Alors en voyage, je lis, détaché de la responsabilité de conduire qui, par contre permet la musique à outrance.
Je lis, avec la non envie de film (inexistants d’ailleurs sur les trajets courts et dans certaines Cie-s), on a ça maintenant quand on veut à la maison.
Je lis,
pas forcément musique, tout dépend de l’envie, de l’humeur, et du contexte.
C’est bien tombé, Jean Marc m’a filé ce livre, sorte de fascicule en mode essayiste, avant de partir.
« Tu liras, ça doit être sympa »…

Voici que je termine les trois symphonies de Haydn, zappe pour plus tard Rossini, désireux de rester avec le maestro viennois et je me décide à sortir le/ce livre.
Là, ce premier chapitre : « qui a assassiné Mozart ? » vient immédiatement me captiver, happer ma curiosité suscitant l’envie d’aller au bout, d’en savoir et imaginer d’avantage.

Dès lors, j’ai su que ces chapitres seraient lus rapidement et avidement avant la fin du séjour, ce qui fut fait.
Au gré de ces énigmes presque révélées et parfois restées en suspens on va – tiens donc – se pencher sur une face cachée post mortem de Haydn, découvrir un très austère et mystérieux tant que charismatique Paganini, se plonger dans une anecdote concernant un Berlioz désespéré bien au-delà de sa profondeur romantique et puis on terminera par la face secrète de Tchaïkovski sous B.O de sa « Pathétique ».
Cela se lit en un rien de temps, cela laisse sur une faim envieuse d’en savoir, qui sait, plus sur tant d’autres compositeurs (et généralement artistes de tous bords) et cela éclaire d’un jour nouveau - au-delà des biographies pesantes - ceux-là mêmes.

Donc prendre ce temps de lecture et lire cet ouvrage.
On en ressort frais, ému … souvent, éclairé et nourri de curiosité enquêtrice policière, pour sûr.

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TONY BENNETT & LADY GAGA – Live at Lincoln Center – 2014.

Hôtel, télé, langues tchèque, allemand, anglais et dans le coin de l'écran, là, YouYube.
Une pause, un concert exceptionnel où le swing, l’art du show, l’émotion et la perfection « à l’américaine » sont réunis.
Big Band, section rythmique de rêve, solistes pile dans le « ton » qui envoient du lourd, tapis de cordes aux arrangements somptueux, public en standing ovation quasi permanent.
Une Lady Gaga qui se surpasse en paillettes, tenues, art du cabaret show mais aussi qui transmet une rare émotion vocale.
Et puis « How do you keep the music playing », signé Michel Legrand et va laisser seul, sur scène Tony.
Il va me faire trembler, pleurer presque, vibrer pour sûr, aimer encore et d’avantage mon crooner favori pour ce qu’il transmet, donne, insuffle et exprime au plus fort.
Il va faire de cette chanson aux connotations et ficelles de composition truffée d’usages de notre Michel Legrand (entre récitatif et apparence mélodique) un immense moment de don musical et là on se sent pris à la gorge, happé, hypnotisé et complètement « avec lui ».

S’il est un grand show, doublé de fantastiques performances tant des deux protagonistes mais également des musiciens, à dévorer sur ce YouTube, c’est bien celui-là.

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Puis la cheminement de la lecture m’a amené au dernier chapitre.
Tchaïkovski…

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TCHAÏKOVSKI – « Symphonie N°6 en Si mineur « pathétique » / Marche Slave » - Chicago Symphony Orchestra / Claudio Abbado.

Je suis donc resté sur Claudio Abbado qui a enregistré tant d’ œuvres du répertoire symphonique afin de compléter cette lecture, rester dans la pâte de sa direction et me pencher sur cette symphonie cette fois éclairée d’un jour nouveau par ma lecture.
J’avais toujours gardé en tête la version de Bernstein, un chef que j’adule en tant que compositeur mais qui en tant qu’interprète me soulève toujours des questionnements quant à ses « choix ».
Abbado m’a indiqué un autre chemin, moins théâtral, certainement plus véritablement romantique et reflétant les affres, les désespoirs et les profonds tourments de Tchaïkovski.

Il conviendra de revenir brièvement sur le terme « pathétique », utilisé désormais fréquemment dans son sens d’extension (cf Petit Robert) : « qui inspire une pitié méprisante » ; mais qui à la base signifie, comme adjectif : « qui suscite une émotion intense (douleur, pitié, horreur, terreur, tristesse) » et comme nom : « caractère de ce qui est propre à émouvoir fortement ».

Face à cette définition qu’il faut absolument prendre en considération (de même que l’éclairage qu’en donne le livre), l’écoute de cette œuvre imposante si ce n’est énorme, chargée de fortes tensions musicales tant qu’instrumentales, de contrastes saisissants et poignants, d’élargissements de tempos, de jeu de timbres accentuant les sentiments qui s’exacerbent et tourmentent, etc, prend tout son sens et impose sa plus poignante vérité.

Cuivres insoutenables, bois inquiétants, cordes tourbillonnantes, intenses, lyriques… dignes d’une inquiétude et de tourments qui feront bon ménage chez Herrmann/Hitchcock, timbales fracassantes.
Le drame dans sa puissance romantique la plus intense.
Le lyrisme mélodique cherchant les plus grands espaces de douleur intime.
Des élans, orchestraux, des chutes inattendues, des contrastes de nuances qui imposent une écoute recueillie, au calme afin d’en écouter les infimes subtilités.
Un compositeur tourmenté à l’extrême, et les raisons de ce tourment menant très rapidement à la mort sont véritablement révélées dans ce livre …
Un premier mouvement qui s’ouvre sur un lugubre basson, un second mouvement qui brise les codes de la valse en étant à cinq temps, un troisième mouvement intense tel une marche véritablement funèbre et funeste, éprouvant, insoutenable et un dernier qui agit comme un requiem et prend littéralement l’auditeur dès son entrée chargée de sentiments cherchés au plus lointain de l’âme.
Un bien funeste programme pour une symphonie globalement « à programme ».

On aura dit que le compositeur avait la peur de la mort, cette « destinée » à laquelle personne n’échappe et que cette symphonie en exprime la vérité, le sentiment et le désespoir qu’il éprouvait face à cette fatalité.
Et…
Deux mois après l’achèvement de celle-ci, il disparaissait.

Funeste destinée ?
Que s’est-il passé ?

Puis, l’album se clôt par cette marche slave qui semble indissociable de la « pathétique » qui s’installe sur ce rythme sourd et inquiétant et prend ainsi des allures, là encore, funèbres.

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Je me suis réservé Paganini et Berlioz pour des moments ultérieurs.
Submergé par l’épreuve de cette « pathétique » et de la « marche slave » lourde, massive et imposante, je suis passé à une autre réalité, le retour effaçant les emboitements image, ambiance, sensations et musique avec Prague.

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LENNY WHITE « Venusian Summer » - Nemperor 1975
BRIAN BROMBERG « Jaco » - Artistry Music 2006.

Quel batteur dans les années seventies, nourri au jazz-rock et au prog-rock aurait pu passer à côté de Lenny White ?
Souvent accolé à l’idée de binaire exemplaire associé d’une technique innovante, Lenny White, en 1975 s’échappe en solo des Return to Forever et part en Heroïc Fantasy pour un programme qui nous embarque sur Venus (la planète ? la déesse tel qu’en atteste la pochette ?).
J’avais déjà largement chroniqué cet album dans mon tout premier blog et mis en évidence la formidable complexité de richesse d’idées qu’il contient.
De longues plages synthétiques orchestrales très modernistes, bien plus proches de la musique américaine contemporaine que d’un rock-prog  cependant tendancieux ou d’une ambient sous titrante.
Un jeu de batterie qui n’est en aucun cas – même s’il est central – l’axe prioritaire d’écoute, mais qui est le chef d’orchestre de ce fatras instrumental nébuleux et ésotérique.
Une aire de jeu pour guitaristes (Ray Gomez, Al Di Meola, Larry Coryell) installés confortablement dans le spectre stéréo.
Une piste à suivre pour les bassistes.
Et au sortir des compositions jouant avec le temps et les mesures afin de s’épancher sur des durées soutenues par des riffs d’une rare originalité, entre funk et rock, jouant sur les ambiances les plus nébuleuses possibles, auréolées des mains des maitres Pat Gleeson, l’un des pionniers du synthétiseur et Jerry Goodman (violon).
« Venusian Summer » au-dessus de la mer de nuages… une bien sublime B.O aérienne.

Puis, j’ai eu envie de redescendre (et la réalité m’a rattrapé) sur terre avec l’album de ce bassiste que mon ami Thierry m’a hautement recommandé, Mr Brian Bromberg.
Le choix de l’album « Jaco » était dirigé par l’axe Big Band, pour lequel nous avons commencé à travailler des titres du Jaco Pastorius Big Band, afin de me renseigner sur une vision autre rapport au génie de Jaco lui-même.
Il faut que je rappelle que le Big Band de Pastorius m’a vraiment traumatisé quand il a sorti « World of Mouth » - ce n’est pas Bob Mintzer qui dirait le contraire…
Et là…
J’ai été littéralement scotché par à la fois le jeu phénoménal de ce bassiste, contrebassiste, mais également par les arrangements à partir d’un matériau déjà des plus délicats à transcender.
Comme ce « Teen Town » au thème posé en contrebasse avec une lenteur surprenante sur des nappes de synthèse tirées de feu Joe, jusqu’au moment où la basse électrique entre en réponse en arrachant littéralement ledit thème en se superposant sur un tempo de feu augmenté de slaps percutants.
Il y a aussi la remise en forme mesurée de « Three View of A Secret » qui s’aborde ici d’une façon totalement impensable et tellement bien pensée.

Mintzer est là, tiens donc…
Et puis il y a cet inimitable et immense groover qu’est Jeff Lorber, au piano, merveilleusement à sa place dans ce contexte.
Alors « Jaco », même posé sur la piste a déjà fait plusieurs tours de piste et continue encore à tourner…
Replonger ainsi dans la musique de Jaco Pastorius, bien au-delà de son jeu de bassiste est un détour que le vaut … le détour.

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Voilà, j’ai atterri, je récupère mes valises, range mon casque dans le sac à dos, je fouille dans mes affaires pour retrouver le ticket du parking.
Allez, Noël à Prague, même quelques jours ça a été comme à chaque fois un bonheur dépaysant.

 
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PS :
Je n’oublie jamais, à Prague de passer chez mon disquaire favori « Musicland » et cette année j’avais décidé de faire jazz… et praguois.
Aussi j’ai trouvé cette petite merveille : LALO SHIFRIN/VINCE MENDOZA « Dedicated trumpet concertos to Hasenöhrl Jan » avec le Czech National Symphony Orchestra conducted by Krystof Marek (Shifrin) and Tomas Brauner (Mendoza) – Label Out of the Frame.

Deux superbes concertos pour trompette mêlant une écriture savante avec l’arrangement jazz moderne, des œuvres tant captivantes que déconcertantes exécutées de mains de maitres par tant le soliste (à découvrir d’autant que il surfe – un peu comme Marsallis – jazz, classique etc…) que l’orchestre et ses deux chefs.
Prague a inspiré beaucoup de compositeurs ce en tout temps et ces pièces ne font pas exception à la règle.

Et puis, c’est le bicentenaire de la naissance de l’un des compositeurs tchèques les plus emblématiques : Bedrich Smetana et cela doit être l’occasion de découvrir au-delà de son œuvre phare « la Moldau » d’autres pans de ce compositeur au romantisme exacerbé et lyrique.
Alors, c’est parfait pour vous parler de deux albums qui pourront compléter ce voyage :

1/ « Ma Vlast » (cf Ma Patrie) avec le Prague Radio Symphony Orchestra dirigé par le jeune et fringuant Petr Popelka – label Supraphon/2024.
Ce poème symphonique, « Ma Vlast », conclut admirablement le voyage en bohème affirmé par Smetana, mais celui-ci se fait au gré de plusieurs poèmes symphoniques permettant de découvrir ce compositeur riche en jeu orchestral et lyrisme mélodique.
C’est dense, puissant, empreint de nationalisme, émouvant aussi.
2/ Et il faut aussi écouter Smetana en quatuor à cordes avec le Pavel Haas Quartet, ce qui permet d’avoir une vision encore plus riche de la magie musicale et créative de ce compositeur qui reste encore à réellement découvrir. Là encore une musique d’une forte densité, d’une rare puissance que le « format » quatuor peut à peine contenir et faite de saisissants contrastes qui font s’exprimer des mélodies fortement imprégnées de lyrisme populaire.
Avec un premier quatuor musicalement autobiographique.
SMETANA « String Quartets N° 1 & 2 » - Pavel Haas Quartet – label Supraphon/2015.


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