SOUL PARTY 2 - Compil'

SOUL PARTY 2 - Compil'

C'est paru là, comme d'hab : Les Cadeaux des Lecteurs: « Soul Party II  | «Les rubriques en vrac du rock
Et curieusement je me retrouve dans la même page qu'un de mes plus fidèles détracteurs...
Ce depuis les lustres où j'ai commencé à blogguer. 
Vous savez bien, de ceux qui dès qu'on s'écarte de leur espace confortable qu'ils imaginent vaste mais qui en fait pensent et affichent qu'ils sont "étanches à la non musique" (je le cite), tout ça parce que la minimale déviance hasardeuse leur bruisse les ouïes...
Il est vrai qu'ici je ne présente que des écoutes bizarroïdes, dérangeante, abrupte et certainement, quel "gros mot", intellos... 
Vous aviez remarqué ça ?
Moi aussi...

Alors on va se remettre un peu de ces pendules de débourrage de crâne certainement trop plein de musique(s) de tout ordre... je vous propose donc cette compilation initialement proposée dans ce blog participatif et comme d'habitude je vais décliner un peu plus le sujet.

Pour la première mouture de l'idée de soul (compil soul party 1) j'avais directement et instinctivement opté pour le feeling vocal.
Cette fois, je me suis posé la question du jeu avec âme, parfois pris moi même à cette sorte de grace qui tombe comme ça, sans prévenir, au moment où l'on joue...
Peu importe d'ailleurs... ce que l'on joue.
J'ai encore ressenti ça plusieurs fois cette semaine, ce n'est pas une illusion et même ça touche les gens là où soi même l'on n'y aurait pas vraiment cru.

Pour cette compil' j'ai aussi puisé dans nombre de titres et d'artistes que je connaissais mais aussi dans certains que j'ai découvert récemment du fait de suivre des disquaires de par le monde qui ont la bienveillance de partager leurs pépites sur les réseaux.
Avant de passer à la musique, je voulais aussi expliquer que (sans aucun intellectualisme à la clé) j'ai organisé cette compilation autour du titre "my people... hold on" qui, suite à la version reliftée de Billy Valentine, m'est apparu comme éminemment fédérateur si l'on veut parler d'âme et de puissance expressive, populaire, sociale et politique.

Format habituel de la vieille K7 en deux faces pour une 90 mn.

Face A

"MY PEOPLE... HOLD ON"  - Eddie Kendricks / "Keep on Truckin' - The Motown solo albums Vol 1 " - Motown 1972.

Un groove pesant, un afrobeat tenace, des chœurs en transe et le lead qui surfe sur ce socle.
Une bardée d'effets inédits pour l'époque surtout dans cette esthétique.
Hypnotisant...
Captivant.

"IF IT'S IN YOU TO DO WRONG" - The Impressions / "Finally Got Myself Together" - Buddah Records 1973.

J'ai toujours aimé ce côté falsetto kitch sur tapis de cordes...
Ici c'est un délice surtout quand c'est contrasté de la sorte avec cette rythmique (et cette intro de drums) bien trempée funky.

"I'M GONNA LOVE YOU" - Howard Bomar "I, who have nothing" - Sudazed Music.

Carrière éclair, titres sortis en 45 tours dans les années 70, rythmique de Memphis, bref ce titre a bien inondé certaines pistes de danse dans les seventies, une influence très JB est à l'évidence.
Il parait que ses albums vinyles totalement et pratiquement introuvables peuvent constituer un sacré patrimoine... s'il savait...

"UNWIND YOURSELF" - Marva Whitney / "It's my thing" - UMG 1969.

Cette ancienne choriste de la JB revue est ici produite par JB lui même, ça saute aux oreilles...
Le staff JB est donc là, en background pour cette performance vocale en quasi mimétisme, mais au féminin du maestro.
Originale l'entrée juste sax baryton qui se fait la ligne de basse avec drums, puis dès l'entrée des cuivres on est en terrain conquis et connu.
Certains penseront à Bette Davis, ils n'ont pas tort.

"THINK" - Jimmy McGriff / "The Worm" - Solid State 1968.

Il est bien entouré le soulman de l'Hammond...
Grady Tate, Mel Lewis, Bob Bushnell... Blue Mitchell...
Il a tellement fait ronfler son orgue en sessions que celui ci est limite de saturation ce qui confère cette énergie qui prend aux tripes.
Les arrangements cuivres sont écrits tels une section derrière vocal et là pour cette reprise du tube d'Aretha ça envoie direct upercut.

"THE TROUBLE WITH TROUBLE" - Sir Joe Quaterman and Free Soul / GSF Records 1973.

Voilà le genre de titre qui installe l'envie, la bonne humeur, le fun, dès son entrée en une mesure chrono...
Le riff cuivres est hyper accrocheur, le beat obsédant, les guitares entêtantes et la voix vers laquelle se rejoignent en tout naturel les chœurs, c'est l'envie garantie.
Simple, direct et oh combien efficace (avec ce petit pont too much).
Pochette enfantine, allez go...

"HORSEPOWER FOR THE STREETS" - Jonathan Jeremiah - PIAS Recordings 2022

J'ai dit le plus grand bien précédemment dans une chronique de cet artiste et de cet album.
Ne pas le faire figurer dans une compilation m'apparait comme désormais impossible, je le cale partout où je sens cela possible.
Cette voix qui t'embarque, cette conviction profonde, cet indicible feeling... ça agit comme une drogue, c'est envoutant, hallucinatoire, indescriptiblement addictif.

"WHEN IT HURTS" - Jake Isaac / "For when it hurts" - Oil and Water 2023.

Un brin r'n'b, une basse grosse comme ça, une voix qui prend soul directement, juste ce qu'il faut d'emballage pour faire entrer dans le jeu et ce background, quelle subtilité...

"ALRIGHT" - Gene Moore / "Introspection" - Capitol CMG 2022.

Ingrédients totaux du funk groove...
Cuivres pêchus, chœurs gospels qui collectivent autour du soliste, breaks typés.
La rythmique envoie son chaloupé syncopé, ça clappe 2 et 4...
Quasiment irrésistible - purée 2022, ouais, ça existe encore... Ouf ! on est sauvés.

"I'M SO GLAD I'M STANDING HERE TODAY" - The Crusaders / "Standing Tall" - UMG VERVE 1981.

Je me souviens très bien quand est sorti cet album.
Depuis "Street life" et le "Rhapsody And Blue" les fans de la première heure jazz des justement Jazz Crusaders devenus promptement Crusaders avaient fâcheuse tendance à faire la moue...
On attendait, les jeunots, comme moi, un troisième aussi inventif, groovy, funky, bref, mêlant le jazz avec ce son fin seventies empreint de funk, de cette binarité qui permettait aussi d'improviser sur ces harmonies issues du jazz, du blues, du gospel...
"Standing Tall" a été plus âpre à prendre en compte, mais comme toujours, un titre, un(e) invité(e), ces gars là ont un réseau et savent choisir le bon guest pour mettre un titre en grande valeur.
On s'attendait pas au grand Joe, mais finalement c'était de toutes façons, une évidence et il inonde ça de son éternel charisme vocal et sensible.

"REVELATION" - Yellowjackets / "Live Wires" - GRP 1991

Yellowjackets c'est l'archétype du groupe de potes requins des derniers studios en vogue, ayant accompagné tout le beau monde qui se réunissent pour faire "leur" musique.
On a appelé ça fusion, car effectivement c'est largement l'après jazz-rock et la multiplicité des influences permet bien ce terme fusionnel.
En live ils sont juste imparables et redoutables et leurs compositions souvent très taillées jazz FM prennent directement cette autre dimension.
Ici pour ce gospel pur jus les voilà qui se sont offert la jam session avec Take 6, ce groupe vocal sidérant.
Moi, ça me fait balancer le clapping direct !

"SWEEPING THROUGH THE CITY" - Bennie Wallace / ENJA 1991.

Le jazz en 1991 n'intéresse déjà plus grand monde...
Il s'est largement électrifié, smooth-isé, banalisé et est passé à la moulinette des labels en mal de perfection sonore et de production.
J'ai largement puisé mon compte dans ces orientations et m'en suis même gavé presque à l'excès.
Bien sûr les puristes, les quelques stars à la Marsallis prônant le retour aux sources, cherchant les racines afin de ne perdre les fondements de tout cela... ont fait un immense travail collectif sur les consciences.
Et puis il a ces artistes, comme Bennie, qui de toutes façons traçaient dans leur coin leur chemin, indépendants mais pas sourds à tout cela, sachant tirer dans leurs sphères relationnelles le meilleur et récupérer les meilleurs.
Là Bennie est allé certainement les chercher au fin fond d'une église de Harlem ces choristes d'un autre âge...
Là il s'est entouré des incontournables de l'époque à savoir John Scofield à la guitare et Ray Anderson l'incroyable tromboniste des Slickaphonics mais aussi un incontournable de la scène free.
Fermez les yeux, vous y êtes... où ? Mais dans cette église, à Harlem.

FACE B

"MY PEOPLE... HOLD ON" - Billy Valentine and the Universal Truth / Acid Jazz UK 2023.

Retour à l'idée initiale avec cette version sortie cette année de Billy Valentine, protestataire, engagée, volontaire et impliquée. L'intention reste la même et Billy ne fait que repasser le message.
Oui mais... quel charisme et énergie ! Et ce solo de guitare...

"I'LL BE HOME" - William Bell / "Wow + Bound to Happen" - Fantasy (seventies)...

Là encore un truc improbable, tellement roots au son immédiat qu'on croit rêver tant cela parait, aujourd'hui, n'avoir existé.
Typiquement Stax jusqu'au bout des cuivres c'est là aussi immédiatement accrocheur avec cette guitare en mode tremolo sortie du rock'n'roll.
Lead en mode prêcheur, chœurs  et forcément cet éternel bridge à la JB, bref, les codes (les bons codes) pour que la sauce prenne instantanément.

"GOD BLESS THE CHILD" - The Loading Zone - RCA 1968

Totalement sorti de nulle part...
Mais cette version de la merveilleuse chanson de Billie Holiday permet un pendant largement intéressant à celle que firent les BS&T un peu plus tard.
S'en seraient-ils inspirés ? J'ai tendance à le croire...
En tout cas, entre ces cuivres à l'écriture soignée, cet orgue crépusculaire, cette rythmique simple et efficace et cette voix qui en veut, c'est passé au dessus de ma pile de reprises du titre.

"JUST A STONE THROW AWAY" - Valerie Carter - Sony 1977.

Pour les amoureux de Little Feat et de Lowell George qui ont été les chevilles ouvrières de cet album absolument indispensable qui puise comme le groupe dans tellement de ces racines d'un sud bien ancré, bien profond et bien métissé. A la batterie, un jeune en devenir... Jeff Porcaro... 
Imaginez Little feat avec chanteuse... 
Magique...

"ANGEL IN THE DARK" - Laura Nyro - Concord 2021 (chansons de 94/95).

Il est grand temps de mettre à une juste place cette immense artiste, chanteuse, compositrice et auteure que fut Laura Nyro. Sa façon unique d'interpréter, de structurer ses chansons avec une écriture des plus déviantes pour un format qui pourtant reste de "song".
Elle est finalement culte et a inspiré beaucoup de jeunes artistes.

"SMILE" - David Sanborn "Straight to the Heart" - Warner 1984.

Clapton a dit une fois que le plus grand chanteur instrumentiste était David Sanborn.
Là, en live, porté par un groupe miraculeux dirigé par le jeune Marcus Miller et introduit par ce moment gospel joué par Don Grolnick, David lâche toute la panoplie et donne son maximum, encouragé et soutenu par feu Hiram Bullock à la guitare ils se joutent comme des fous chargés de musique et d'expression.
Immense.

"PEOPLE GET READY" - Curtis Mayfield / "Curtis Live !" - Curtom 1971.

Penser, parler, évoquer soul sans Curtis...
ou Marvin...
Bref, là avec ce titre que je n'ai de cesse d'aimer et souvent (mais jamais assez) de jouer, en live qui plus est, le transport vers les cieux est direct et sans ticket d'ailleurs.

"STRANGE FRUIT" - José James / "Yesterday i Had The Blues" - Blue Note 2015;

Bille, toujours, pour conclure.
José James use du rerecording pour créer un espace de chœurs vaudous envoutants, sa voix prend les inflexions blues les plus caractérisée. Une transe immuable, un texte à frémir, l'âme est touchée en son plus profond.
On doit se souvenir, mais on doit aussi se rappeler que chanter ainsi est une réalité obligatoire quand on porte le message d'un peuple.

Allez, 
bonne soirée
même aux détracteurs.