PRINCE AND THE REVOLUTION – « Parade » - 1986.

PRINCE AND THE REVOLUTION – « Parade » - 1986.
Music from the Motion Picture « Under the Cherry Moon ».

Nous sommes invités chez des amis, c’est la première fois, chez eux.
En inscrivant la date 1986, je réalise... on était vachement jeunes, j’avais donc 26 ans...
« Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ? »...
Je venais de mettre sur K7 le dernier Prince, je crois bien que j’avais flashé sur le clip de « Kiss », surtout pour son solo de guitare et son petit break directement issu de « Papa’s Got a Brand New Bag », mais tellement fun, kitch, léger, souriant, érotique, provocateur, arrogant, eighties, quoi...
J’ai dû dupliquer la K7 pour le couple d’amis, pas difficile à faire, l’album est passé en boucle le long de l’apéro, du repas, du digeo, de la refonte du monde de l’am, du retour à table de début de soirée...
Puis au retour elle a repris sa place dans le radiocassette et a cheminé durant des semaines pendant que l’album emprunté pour être rendu à la médiathèque avec un retard digne du manque de civisme, restait sur la platine vinyle.

C’est là que je suis entré dans l’immense palais de Prince.
C’était, comme tous les palais, chargé de dorures, de trucs rococo, de bric à brac étincelant, de taffetas, de tissus soyeux aux couleurs chatoyantes, de tableaux aux portraits égocentriques, aux natures mortes, retraçant d’héroïques batailles, guitare en guise de sceau, de nus fantasmagoriques.
Il y avait dans cet univers du mystère, des légendes, de la classe, de la hauteur, de la noblesse encanaillée, de la distance, de l’art et de la beauté mais aussi du luxe, de la luxure, du vice, du fétichisme et de la volupté.
Chaque pièce recelait un univers, une aura particulière, une atmosphère chargée d’histoire et de modernisme, de high tech et de passé.
Un bazar sonique, un bordel de luxe, un foutoir kaléidoscopique, une anarchie révolutionnaire.

A vingt-six ans, je ne comprenais pas encore grand-chose à cette brocante multi-sonore.
Ce barda de synthés gicleurs, ces boites forcément à rythmes aux sonorités décuplées, bourrées d’effets amphétaminés, ce manque cruel et volontaire de basses, ces steel drums incongrus, cette outrance de reverses, de pouet pouets, d’acide contre sucré tournaient dans ma tête comme de grands points d’interrogation de bulles de BD.
Armé d’un fostex portable 4 pistes K7, d’un Roland Juno et d’une maigre TR 707, le nez dans les notices et à  fond dans ces appareils pour des projets pédagogiques d’un tout autre monde, je sais avoir cherché des heures à tenter de comprendre par la pratique, le truc, l’astuce, l’axe, la pertinence...
En forgeant l’on devient forgeron...
Les nobles de ce monde sont là pour nous montrer la voie à suivre, le chemin à prendre, c’est leur rôle.
En ce sens, Prince ne m’a jamais déçu...
Duke, Count, Dark Magus et même un Boss et un King non plus d’ailleurs – il est des sceaux gravés qui sont chargés d’évidences.

« Parade » m’a ouvert littéralement aux données auditives du « studio ».
Ses modes d’entrée sont complètement novateurs, révolutionnaires, ils transcendent les idées et avancées d’un  Sergent Poivre conceptuel, ils osent faire danser ce qu’on avait découvert sur une face cachée de la lune, ils instaurent en mode réel le robot humanoïde là où certains allemands évoquaient l’homme machine d’un futur prévisionnel...
« Parade » mélange Broadway, le jazz, le funk futuriste et pourtant imbriqué dans JB, le pop song, le gros slow rock en 12/8 aux relents kitchissimes, Kurt Weil et Berlin, le glam rock déroxydé, détyrannossaurussé et tant de vraies fausse influences qu’un catalogue serait incomplet tant chaque recoin de chaque pièce s’avère complexe et pourtant « évident ».

On aura donc parlé et rendu hommage au prince guitariste qui effectivement avec une désinvolture et une aisance presque indécentes peut en une mini cocotte, une poussée de pédale wah wah et une fulgurance pentatonique reléguer au placard nombre de besogneux de l’instrument placés en haut du podium des guitar heros...
On aura parfois évoqué sa voix, dont j’adore le falsetto genre midinette faussement choquée de tant de soft vulgarité susurrée, dont j’adore le timbre tant nasillard que profondément crooner. Prince sa voix, comme la guitare, il en faisait ce qu’il voulait.
Comme pour le reste, au piano, des compos qui sous les doigts coulent comme le plus beau des standards de jazz, aux drums genre prince du beat...
Bref, le touche à tout instrumental, on connait... Lenny essaie bien, lui aussi...
Mais ce que « Parade » m’aura prouvé, au-delà d’un « Purple Rain » dont on nous rabat les oreilles depuis jeudi, comme si Prince n’était qu’un artiste empourpré, c’est que l’esprit créatif, quand il dispose, en plus, des moyens tant techniques (la technologie des années 80 ça a quand même sacrément permis l’autoproduction de génie, preuve princière en est...) que de touche à tout instrumental, n’a de limites que sa propre intelligence et capacité à œuvrer.

Ce que j’aurais avant tout retenu de cet immense artiste est sa capacité créatrice « no limit », car ne se limitant pas lui-même.
Visionnaire quand il en avait l’envie, commercial quand bon lui semblait, immense récupérateur de tout ce qui l’entourait pour le fondre dans sa personnalisation créatrice, avide de tout ce qui pouvait transcender soniquement son propos, caméléon de l’esthétisme, Prince n’avait à mon sens aucune limite, car sa capacité à absorber, à ingérer toutes les cultures non pour les mimer mais pour les additionner à son imaginaire créatif dépassait de loin m’importe quel artiste de dimension populaire de la planète.
On se sera fixé sur son funk tellement jubilatoire qu’on en aura oublié d’aller écouter chaque recoin de chacun de ses albums.
Cette immense capacité de langage créatif et ce génie de la propagande commerciale lui aura permis à coup de tubes bien formatés et laminant tout sur leur passage à leur sortie, de générer au fil de ses albums parfois fleuves, de nombreuses pépites que le public n’aura pas forcément été chercher...
Il réservait surement ça aux « amateurs », fans inconditionnels...
A lui même ?...
Lui, se tapait des délires forcenés à coup d’overdubs sur idées sorties du chapeau, forçant le trait, enfonçant le clou, osant l’incongru, l’inédit, l’insaisissable, le questionnable, le remarquable, la monstruosité comme la poésie, la bizarrerie comme le simplissime, l’outrance à outrance, la pureté aussi.
L’intelligence, toujours...


Cette semaine et certainement pour quelques semaines à venir j’ai donc remis, en CD cette fois (ayant réalisé que je n’avais que des CD de Prince, sceau marquant d’un passage de génération...) cette monstrueuse « Parade » qui, autour d’un Prince touche à tout fait défiler cordes, cuivres et vents divers, voix de lupanars, grosse machines et Simmons pugnaces, incongruités esthético-humoristiques-déglinguées.

L’immense et incroyable resucée de nos mirifiques Beatles et de leur Sergent Poivre m’est sauté à la tronche dès la première écoute de "Christopher Tracy's parade".
30 ans après, même envie, même idée, même choc, même sensation – tellement de collages géniaux, de contemporanéité, d’audace, de prise de risque dès l’ouverture, de modernisme et pourtant de simplicité et d’évidence (quelle mélodie !)... Ce en juste 2:11...
L'indécence du génie, pour sûr.
Une ouverture permet d’entrer dans un univers, de placer des pions, une atmosphère, un concept, des idées et de pré-familiariser l’auditeur... dans le genre, difficile de faire mieux.
« New position » m’aura forcément réinjecté une dose de funk jouissif sous ses appuis de steel drum.
« I Wonder you » et son univers opaque digne des Residents rehaussé de flûtes sera revenu en symbolique de tout ce qui m’a accroché dans cet album et « Under the Cherry Moon » au beat 12/8 sans aucun apport de hihat et truffé d’amusettes sous son piano jazzy n’aura que confirmé cet adage de relooking neuf avec du vieux.
« Girls and Boys » et sa bien curieuse adéquation bass/drums préfigurant le drums and bass et son sax baryton sexy à souhait ou son petit gimmick bendé, ses chœurs unis et sa touche érotico-frenchy... mais quel pied !
Le joyeux bordel de « Life can be so nice », contrastant avec le poétique, minimaliste et classique « Venus de Milo », comme sorti d’une scène d’amour d’un film hollywoodien chargé de cors, cordes et autres apparats majestueux pour un solo de trompette installé entre Chris Botti préfiguré et Chuck Mangione sublimé, la grosseur du trait rock-faisant de « Mountains » stérilisé et futurisé, densifié et cuivré en riffs breckeriens... voilà bien une glorieuse succession.

« Les enfants qui mentent ne vont pas au paradis »...
L’accordéon musette croise  au gré d’une croisière intersidérale de luxe le jazz, Marlène Dietrich et la ballade jazz au swing fringuant. Un pastiche des Manhattan Transfert vient ajouter une touche rétroïdée au Prince du show emplumé qui ne sait plus s’il s’est travesti à Berlin Paris ou Broadway...
J’ai toujours adoré ce titre...
Il faut se laisser aller parfois...
J’adorerais m’attarder sur « Kiss »... ce titre m’a totalement traumatisé, il provoque une jouissance quasi orgasmique qui prend forme dans son petit break de gratte et qui expurge au solo où la wah wah fait juste ce qu’il faut, sommet de la maitrise de l’érotisme musical où Prince laisse échapper un petit cri de plaisir pur...
Et puis pas ou quasi pas de basse noyée qu’elle est dans la boite dégingandée et pourtant hyper fédératrice.
Cet enchevêtrement de cocottes, de rythmiques, le grand art...
Cette transition Hindouiste, et ce titre impossible à retenir « Anotherloverholenyohead » sur pulse massive et cette fois une basse bien eighties qui n’oublie pas de slapper, normal.
L’art du placement des chœurs... y’a du monde là.
Et puis je me garde au cœur ce meilleur de la fin.
Nous sommes en Avril et effectivement il neige, probablement.
Ces flocons légers emportent avec eux sa musique, sa poésie, cet art qu’il avait de tout mettre en un vrac génial et merveilleux.
Alors j’ai pris mon piano, j’ai égrené ces accords translucides, me suis laissé porter par cette mélodie doucereuse, j’ai laissé planer dans l’espace ces notes comme des flocons légers, aux contours de dessins sublimes et éphémères.
Il ne faisait pas froid, juste finalement ce repos dont on aurait tous aimé qu’il se fasse le plus tard possible et cet éloignement qui me fait réaliser désormais que encore une fois, cette année un pan de légende s’effondre, nous laisse et qu’il laisse le soudain s’amplifier, l’inattendu devenir réel, l’inacceptable devenir obligatoirement acceptable...

A ce rythme-là il ne va bientôt plus rester sur cette planète que des hommes politiques, ce serait la dernière des catastrophes...
Restez encore un peu avec nous mesdames et messieurs les vrais génies, celles et ceux qui font rêver et apportent à nos vies l’envie de la vie.
Prince – tellement d’albums au fil des années depuis cette magnifique « Parade »...
Merci, noble créateur – le temps est venu d’aller jammer avec d’autres compères là-haut...
Jimi t’attend depuis un bail, David en croonait d’impatience, James sourit déjà et t'a installé un bel espace et Miles a rebranché sa wah wha rien que pour toi... 

Commentaires

  1. Finalement, tu vois, c'est utile, me fait penser à cette malheureuse bougie que l'on allume pour symboliser un moment qui nous touche. Et puis on lève les yeux et l'on voit une autre bougie, une troisième et l'on prend conscience soudain que cette lumière qui éclaire actuellement l'espace ce sont d'autres bougies.
    Voilà un joli papier. Il est Lundi 8h et je me suis refait PARADE à ton rythme et je m'émeus (que c'est laid dit oralement) sur ce titre de fond d'album "Sometimes It Snows In April" que j'ai dû zapper, car voyez vous, sur un vinyle, il y a un fond et je me souviens souvent revenir sur "Kiss" et cette dernière chanson était trop délicate.
    Une question, je ne comprends pas trop cette phrase
    "sans aucun apport de hihat et truffé d’amusettes sous son piano jazzy n’aura que confirmé cet adage de relooking neuf avec du vieux."
    Tu fais référence à un style musical particulier qu'il aurait reprit à son compte? le HiHat?
    En te lisant je me disais que sans le chercher volontairement (?) tu démontres l'aspect foutraque de l'album, pas beaucoup de quoi assurer une unité, si ce n'est effectivement ce son aigu, des arrangements parfois bordéliques dont chaque instrument pourtant se détache bien et cette voix.
    Seul sur la fin, j'y ai entendu une petite musique amer... Te faudrait-il un peu de mélancolie à la couleur amoureuse pour trouver, même au politique, quelques qualités humaines? "Toi & Mrs. Jones?"

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    1. Le HiHat c'est la charleston de la batterie.
      Le genre réflexe inébranlable du batteur qui avec la ride (cymbale rythmique) occupe ou selon, enrichit la main droite.
      Peter Gabriel a expérimenté le sans métaux dans ses albums à partir du 3e, ce bruit métallique le fatiguait et il voulait de l'expérimentation en ce sens peaux tribal...
      Ici en place des éternels triolets de charley qu'on est en droit réflexe d'entendre et d'attendre, la boite devient minimale, juste la base, rien d'autre et l'espace s'ouvre vers le reste.
      Encore un coup de génie, donc le vieux cliché éculé du slow rock en 12/8 prend un coup de lifting...

      Je suis par contre désolé, mais même avec un peu de mélancolie amoureuse il me sera bien difficile de trouver la moindre humanité dans l'homme politique d'aujourd'hui - en cherchant bien peut être qu'effectivement...
      Mais j'ai beau chercher... et croire parfois trouver, au bout du compte le même naturel loin de mes aspirations humanistes et artistiques me saute au visage...
      La sphère politique est si loin de la beauté telle que ce dernier titre... et crois moi, ce n'est pas faute d'avoir tenté d'y croire.

      Oui cet album est un joyeux bordel, de celui d'un Picasso, d'un bon Zappa, d'un Ubu, d'un Sergent Pepper, d'un Miro peut être, d'un Stravinsky, d'un Miles électrique...
      Tellement d'idées, de recoins, de plans sur plans, de couche sur couche, de détails que c'en est vertigineux.
      J'aurais pu causer de plein d'autres Prince dont News, Sign o Times ou encore around the world in a day, lotusflower... et diamonds and pearls...
      Mais Parade est vraiment celui avec lequel je suis entré de plein fouet dans l'univers de Prince, ce côté fourre tout génial à cette époque où je cherchais toujours l'inédit, l'expérimental, le novateur, ne pouvait que me plaire et de là, j'ai continué le chemin au fil de ses albums, j'en ai zappé, j'en ai acheté, j'en ai oublié... mais à chaque fois la même sensation, la même claque.
      Merci de ce retour.

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  2. Merci. ..
    Le seul album que j'ai acheté de Prince c'était "Lovesexy ", en K7. ...pourtant je l'ai beaucoup écouté, plus jeune et je me rends compte aujourd'hui de tout ce qu'il me reste à découvrir et réécouter. ...il a beaucoup compte pour moi à un moment et puis moins. ..et maintenant on se rend compte qu'un autre génie disparait. ..et il n'y en aura bientôt plus. ..

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    1. Faire un choix parmi sa pléthore d'albums est compliqué...
      C'est pour ça que j'ai choisi de parler de Parade, l'album qui m'a fait entrer dans son univers.

      Il y a encore des "génies", j'en suis sûr...
      Les formats et les temps, les habitudes et aussi les modes d'expression, d'écoute, de "propagande commerciale" ont considérablement changé, muté et évolué...
      On ne compose plus pareil et les marges de manoeuvre pour le créatif no limit comme j'aime à le faire remarquer ici se réduisent, du moins, dans la sphère médiatique...
      Après l'autoprod, les indépendants, alternatifs et autres proposent de la création souvent intéressante, la notion de génie vient soit d'emblée je crois, soit, sur le tard avec un "recul"...
      Question d'approche...
      Hier un biographe de Y Menuhin le comparait à Mozart... même si j'admire ce violoniste et ce qu'il a apporté à la dimension d'interprète de l'instrument, faut quand même pas abuser... et galvauder le terme de génie...
      Pour moi on ne peut comparer un interprète d'un créateur.
      L'un et l'autre sont des pierres angulaires de l'art, mais à chacun sa place...
      Je garde le créateur sur l'échelle du génie, j'accepte l'interprétation "géniale"...
      Cette nuance a toute sa valeur.
      Prince était un créateur de génie, il n'y a pas de "catégorie" ou "sous catégorie" pour affirmer cela - il suffit juste d'écouter la diversité et l'originalité, la dimension tout comme l'intelligence de son oeuvre pour s'en rendre compte.

      à +
      merci du passage.

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    2. je viens me mêler d'un sujet qui me passionne, mon défaut à moi est de penser que les choses sont définies, je ne pousse ps assez loin ma fantaisie poétique. Car qu'y a-t-il de plus impossible à concevoir? Pourquoi avoir inventé le mot génie quand il y a le mot talent. Vous vous souvenez comme Gainsbourg s'énervait sur la notion d'art majeur et mineur, cet esprit si libre et si rigide dans son souci de définition. Mozart est un génie, on sent que l'on ne se trompe pas trop. Pourquoi au fait? Mozart a du talent. Cela sonne petit à nos oreilles? Peut-être que le film Amadeus nous aide, la scène où Mozart reprend une création de Salieri en l'arrangeant à sa sauce, c'est peut-être ça le génie? En commun le travail des talentueux mais s'ajoute ... une facilité à manipuler des abstractions complexes. Tiens pour ajouter du bavardage: Gould qui explique que Beethoven se savait génial et se permettait des choses "simples" qui continuent à nous émerveiller (il cite le début de la 5eme) alors que R Strauss doutait et ajouter des cathédrales de complexité pour se démontrer que il était "génial" et pas que "talentueux" comme on dirait "adroit", avec ce petit côté besogneux. Voilà, c'est ça, sans se fatiguer et écrire l'oeuvre qui marque son temps. c'est ça le génie alors? le compositeur de la "Danse des canards" l'a écrite en un rien de temps... Ha oui, il y a la piste d'innover, Einstein était un génie donc. Après tout peut-âtre que Prince cumulait ces deux talents, facilité et innovation = génie? Même si il y a du déchet?
      Bon je stoppe là ce quasi monologue. (J'aime le truc de la "danse du canard", un reportage passionnant sur la ville de Moucron en Belgique où l'on nous raconte la naissance de "Born To Be Alive" "Brazilia carnaval" "la danse des Canards" dans un petit magasin de disque, c'est bête j'ai perdu le divx... C'était .... génial)

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    3. Un sujet fort passionnant en effet...
      J'ai d'ailleurs hésité à te répondre par un comm' ou carrément me lancer dans un article sur ce vaste sujet, mais ces temps je suis quelque peu occupé alors, l'article de fond est dans un coin de tête qui sait ? Il viendra un jour parmi tant d'autres planqués au coin du HD de l'ordi...
      Ta mise en équilibre talent/génie je m'en suis fait une idée depuis longtemps...

      Le talent est quelque chose que je rencontre souvent, du talent au très talentueux - peu importe à mon sens l'échelle de valeurs, mais elle existe, comme pour le génie d'ailleurs... avec une très grosse dose de subjectivité, forcément, tout comme ce que je t'écris là, qui n'est que mon ressenti sur la chose d'après vécu, faits, mais là encore des appréciations que je me garderais de mettre en avant comme plus valables que cela...

      On peut aussi mettre juste à côté de talent, mais sur un plan différent, compétence ou encore capacité...
      Quand je remplis un bulletin d’évaluation d'élève ce distinguo est de mise...
      Mais il y en a aussi des talentueux et il ne me faut pas longtemps pour m'en rendre compte...
      Quant aux génies, j'en ai croisé là aussi, mais me suis bien gardé de le leur signifier, le temps m'aura prouvé que j'avais eu raison, comme quoi, ça saute aux yeux et aux oreilles...

      Je classe le "génie" avant tout dans la catégorie créative...
      J'ai du mal à me faire l'idée de l'interprète génie, même si son interprétation est géniale, c'est autre chose... mais bon ce sont des débats de mots et certainement derrière ça d'idées...
      Le génie fait avec rien ou pas grand chose, voire quelque chose de commun... un truc tenant du miracle qui te fait dire, une fois la chose analysée, mais... pourtant ce n'est que...
      Hé oui, mon cher, ce n'est que... me dis je à chaque fois, avec le chapelet de mots tous aussi vulgaires les uns que les autres dont je te fais grâce....
      Prends par exemple l'entrée du thème du concerto pour flûte et harpe de Mozart... ce n'est que l'accord parfait de do majeur arpégé descendant (do... sol mi do )puis ascendant (mi sol do...) pour cheminer basiquement vers des degrés tels le V (do si do ré... puis plus loin fa, sol la si ...), vraiment pas de quoi hurler au génie, en soit... sauf que... hé bien, c'est tellement évident et simple qu'on n'y fait même pas attention et que finalement on s'en fout, juste qu'on chante le truc et que si on jour, par manie comme la mienne on se prend à analyser, observer à la loupe on se dit que... et m... c'était donc ça ?
      Tel ami trompettiste analyse un solo de Miles qu'il adore cherchant à trouver le pourquoi du comment ça marche...
      Idem, finalement rien de bien particulier, si ce n'est tout ce qu'il sait faire, a appris, a sur le bout des doigts du piston, mais bon, voilà, avec ce que tout à chacun sait ou se doit de savoir faire en jazz, Miles arrive et, hop, en un trait de quatre notes qui pourtant ne sont pas venues de nulle part, genre pentatonique de base ou encore sur sa fin de carrière l'usage forcené des gammes classiques... il te renverse la vapeur et on est scotchés, par quoi, ce trait de génie, justement...
      Alors tu peux augmenter ça à Picasso, car bien que je ne sois, loin de là, un spécialiste de l'art pictural, je lui trouve, comme Chagall, d'ailleurs ou Miro et encore tant d'autres contemporains, du génie...
      Mais là je laisse les intellos d'arte et france culture se galvauder sur ces sujets, comme pour Shakespeare, à chacun son domaine...


      je continue...

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    4. Alors le talent, quand tu cites Gainsbourg, que je range au degré des génies et non des talentueux même si de sa bouche il réfutait cet adage (mais on est peu apte à se considérer soi même - même si Gainsbourg était un mec lucide quant à son "niveau" - tiens un autre mot...), à mon sens c'est "autre chose"...
      J'ai parlé de Lenny Kravitz, ici, en comparant à Prince, je crois que c'est une comparaison tangible...
      Il y en a tant.. Le talent est partout même dans les pubs et dans les slogans tels les régions qui maintenant ont du talent...
      Comme avec tout ce que le médiatique nous fourgue comme données dénuées de sens initial, on finit par s'y perdre...
      Je reprends l'hallucinant discours du biographe de Menuhin qui disait "il y a eu Mozart puis Menuhin"...
      J'en suis resté con...
      Comment est-il possible qu'un mélomane puisse être aussi malhonnête dans de telles affirmations...
      Alors Stravinski, Mahler, Berg, Webern et autres Beethoven, Miles, Duke, Monteverdi, Bach, les Beatles... c'est quoi ?
      Menuhin fut et reste un immense interprète... comme feu Rostropovitch, je les vénère et respecte au plus haut point mais tout de même ils ont mis, leur talent, leur niveau, leur savoir faire, au profit de compositeurs géniaux... et ils ont peut être laissé des interprétations géniales, mais ce mot ici n'a plus rien à voir avec le génie, à mon sens, c'est un second emploi...

      J'aime ton recours au besogneux, au studieux, au scolaire, bref, tout ce que je croise sur mon chemin de prof de musique...
      Et le talentueux, que je croise aussi, parfois...
      Quant au génie, je sais où il se cache, mais bien souvent il s'ignore et un jour (ou pas...) il surgit.
      Pour créer il faut d'abord l'idée et c'est bien là que tout se joue, je pense...
      Puis du talent pour la mettre en valeur ainsi que du niveau, des études, de la technique et tout le reste (ouf, je suis en train de justifier ma place sur cette terre...).
      L'idée n'a pas forcément besoin d'être compliquée, complexe, hyper réfléchie, à quoi bon...
      Le reste fera l'affaire...
      J'aime ton rapport Strauss, certainement vrai... mais il a eu des moments digne du génie (Salomé, Zarathoustra, surtout l'intro, sinon pourquoi la connaîtrait-on autant...) - je t'y ajoute Bruckner, même si j'aime...

      Prend l'exemple de "la bonne chanson" - je te cite la géniale "Roxanne"...
      Tu peux lui mettre tout le talent possible à son profit et la traiter comme bon te semblera avec ton niveau, ta technique, tes secondes idées... Jazz, Rock reggae et même pourquoi pas classique...
      "Roxanne" est juste un coup de génie, le reste ne sera que talent, mais au sortir tu retiens quoi ???
      Rooo xanne... point barre...
      Que ce soit la version 1 la grosse claque Police, que ce soit Sting tout seul avec sa gratte en stades pour concerts engagés ou que ce soit la pseudo jazz version de G Michael..., finalement... on retient juste - la chanson...
      Voilà pour moi ce qui caractérise le génie, le trait de génie, l'instant de génie, bref, ce qui distingue du reste...
      On a le droit de ne pas être tout le temps génial, aussi, d'essayer, d'imaginer, d'oser et de se louper...

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    5. je conclue...

      Mais prends "Kiss" de notre Prince...
      Le génie y est à mon sens partout.
      Commercial, récup' de JB, solo, traitement du sujet (le son, pas de basse, le synthé en pseudo echo et tellement d'infimes détails qui font... la différence), le clip ?, le cri orgasmique que tout le monde a envie de pousser pile là, tant c'est bon, etc, etc...
      Là où d'autre eussent fait un truc talentueux, lui a juste créé un truc génial... en y mettant tout le talent la compétence, la niveau...

      Bon tu vois, c'est vaste et forcément sujet à égarement, dialectique et aussi désaccords, normal...
      J'aime la subjectivité...
      En ce moment je crois bien que je croise le génie chaque semaine... mais chut... je me garderais bien de le clamer.
      Il y a quelque temps j'ai croisé un artiste peintre qui gagne bien sa vie et qui argumente que la technique est l'axe essentiel, le niveau, etc... en place du génie...
      A côté de lui, une artiste naissante qu'il a eu le courage de placer de par sa notoriété sur l'avant scène...
      Un état brut relevant du génie et qui touche l'âme dès le premier regard... alors que lui n'éveille que l'observation du détail...
      Pourtant leurs "techniques" sont effectivement incomparables si l'on se réfère à une simple idée de "niveau"...
      Mais je sais avoir décelé le génie chez l'une là ou l'autre n'a qu'expérience et technique...

      Allez, bonne journée sur ces débats passionnants qu'a fait naître notre génial, je réitère... Prince.

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  3. Superbe évocation, de Prince mais aussi de nos jeunes années, chanceuses d'être bercées par un tel bonhomme.
    Parade est tout ce que tu en dis. Incroyable d'une liberté que l'on croyait disparue avec les 60's.
    C'est un peu sous le coup de l'émotion, sans doute, mais je pense sincèrement que tous les albums de Prince sont à connaître, aucun n'est facile, négligé ou négligeable.
    Je suis très fan de Lotus Flower (ce Crimson and clover mêlé à Wild thing entre autre beautés. Et ce second disque qui revient à l'électro dépouillé de kiss), The Gold Experience aussi est indispensable. Et Dirty Mind (parce que When you were mine fut mon premier coup de cœur pour Prince, mais surtout parce qu'il est parfait de bout en bout).
    Et puis...tous. La preuve, cette après midi c'est 3121 qui m'a sidéré.
    Merci pour tes mots finement choisis.
    Hugo

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    1. Merci de passer ici.

      J'ai de fait réécouté moi aussi depuis jeudi nombre de ses albums...
      une mine d'or...
      à tel point que je pense proposer un hommage en projet élèves l'an prochain, je crois que la nouvelle génération ne peut passer à côté d'un tel phénomène, aussi une sorte de mission culturelle parait de mise.
      Chaque titre et album que j'ai écouté m'a de suite interpellé et fait réagir positivement, tant professionnellement (j'ai déjà filé un max de partitions à bosser à l'ensemble de mes élèves (1999 par exemple pour des très jeunes... Cream évidemment, Sometimes it snow, etc...), qu'en auditeur de plaisir ou d'analyse.
      Cet été il va aussi nous falloir lui rendre hommage en le jouant et même si Kiss et Purple rain sont au répertoire depuis des lustres on va se pencher sur la question de réinjecter du "moins entendu"... on est "dessus"...
      Bref, je pioche parmi mes CD et hop, je trie je réfléchis, je choisis et du coup je réalise ce que je savais mais confirme...
      Génial !...
      Et puis, en claviériste j'adore ces sons kitch, pouet pouet, minimaux, énormes, acides, rugueux, etc...
      Tout ce qui fait vivre un synthé et que personne n'ose utiliser ou rarement... Lui en a fait sa pâte... chose que j'adore.

      Merci d'être venu commenter ici.
      à bientôt, j'ai un autre hommage sur le feu...

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  4. Le parallele avec Zappa est frappant. On est en effet dans une musique de style, rococo? (puisque baroque a un autre sens), où la luxuriance dépasse les codes du funk habituel, ou l'on est tour à tour scotché par un gimmic ou une ritournelle désarmante de simplicité mais si addictive, surpris par l'intérêt et l'utilité dans la progression du morceau de la complexité et l'originalité des arrangements, ébahi par la qualité du guitariste et du showman, largué par des envolées qui nous font perdre tout repère. C'est un générateur de beau, de viscéral, de sensuel et aussi de mystères, d'incompréhensible,d'explorations. Plus qu'un génie , je dirais que c'est un artiste, au sens vrai du terme, quelqu'un qu'on recherche, admire, mais ne comprend pas toujours, et c'est un peu aussi cela qui fait sa force et qui donne une réponse à Gainsbourg, oui la musique est avec certains un art majeur.

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    1. Quel beau commentaire !...
      Merci, ça résume tout.
      à +

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  5. Une nouvelle fois à retardement.. mon cerveau s’est laissé vautrer dans les filets de Murat et j’en sors à peine. Pour Prince, j’y suis venu très très tard. Vaut mieux… en 2009 avec la disparition de Michael et ma grande en vrac, je me suis mis à longer son affection pour ces musiques là, lui et son « rival » officiel. Du coup, avec la découverte de Bad (oui oui..mieux vaut tard) et « Dangerous », je suis parti avec plus de faim sur Prince avec sur les starting block « 3121 »..puis en bibli des live « officieux ».. et là ce fut une grosse baffe, ou plutôt une flagellation de ne pas avoir été curieux plus tôt. J’ai suivi, j’ai approfondi et puis ma tète a tourné tellement y’avait de la nourriture de partout. Et voilà « Lotus Flower » qui tombe et je suis toujours à écouter ce brûlot blues jazz funk pop r’n’b ..en boucle. (je parle du 2ème album de cette trilogie). J’ai tout vu dedans, de Hendrix à … pfff .. une foule d’artiste géniaux… du talent et de génie partout.. D’où le débat juteux des fibres artistiques qui en ont .. J’aime l’idée du don.. qqchose qui nous est donné à la naissance, un don pour qqchose.. à savoir quoi ?? un talent en tout cas sûr.. et les génies .. autodidacte ou travail.. ou surtout les deux… je suis tjrs paf devant les dons, les talents et le génie

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  6. En parlant de paf et de don pour qqchose.. je me permets de t'envoyer un lien.. la première vidéo de mes 2 grands, bricolée dans la chambre ;D https://www.youtube.com/watch?v=apivYcNupfA

    J'ai qq Prince près de moi, je vais continuer l'exploration, l'embarras du choix.. j'ai un peu de mal à retrouver mes repères, je cherche des morceaux que j'aime un peu partout.
    A++

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    1. je crois que c'est tj un peu compliqué de découvrir avec retard...

      ça m'a fait ça avec Alice Cooper par exemple - tu connais sans connaitre, puis un jour tu te penches sur et là, c'est un pan complet qui te saute à la figure et tu tentes de rattraper sauf que... les retards d'années et le côté coup de coeur fan et tt et tt bah, c'est donc râpé...
      Alors tu te retrouves à 55 balais avec school's out et tu regardes l'année tu te dis que dans les boums tu étais en genre ok, bon, d'ac... avec ton roxy sous le bras histoire de faire la nique, etc, etc... mais c'est tellement... loin, de chez loin...
      si je découvrais prince (j'en découvre d'ailleurs pas mal de lui car c'est assez pantagruélique comme oeuvre...) là, ou comme toi, depuis peu, j'avoue que ce serait compliqué...

      je me mets donc à la place de mes élèves ados qui, par ex, découvrent zep.
      moi j'ai grandi avec zep, c-a-d qu'12/13 ans j'ai découvert black dog à sa sortie...
      idem avec cet album de prince, choc dès sa sortie.
      le rapport n'est donc pas le même, tu accroches, pas de recul, tu es happé et le VRAI recul se fera plus, tard, un jour peut être ou pas... mais cette découverte au moment de la sortie d'album s'inscrit avec des tas de trucs comme souvenirs, génération, anecdote, etc, etc...
      m'en détacher reste parfois dur, normal...
      on associe souvent une accroche musicale à une tranche de vie... s'en défaire c'est bien la pbtique de ces life sensations in music...

      don, talent ou génie...
      oui, ça laisse pantois...
      les déceler est important, les maintenir en vie créative est capital, les mettre en valeur est primordial...
      c'est dans mon métier plus qu'un fait c'est ma philosophie pédagogique et tu la mélanges avec ceux qui n'en ont pas forcément mais qui doivent eux aussi, se faire plaisir et profiter de la musique comme une "chance éducative"...

      pour les vidéos, je te répondrais par mail.
      tu m'en diras plus que j'ai des données afin de t'en parler.

      prince, déguste le grand Sign o the times... le gros gateau avec la chantilly en plus...
      pour gourmands...
      merci de ton passage, moi aussi j'ai du retard d'écoutes, c'est la période...
      on s'y remettra sérieusement et paisiblement avec l'été arrivant.

      à +

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