JOHN MC LAUGHLIN…

JOHN MC LAUGHLIN…

Trouver le prochain sujet…
Je fouille dans les étagères de CD, consulte l’intégralité de mes HD, prends au hasard quelques vieilles revues, relis quelques articles…
Bof…
En ce moment il est bien difficile de sortir le nez de l’actualité, qu’elle soit sociale, politique, climatique ou encore culturelle… pour autant, la musique reste mon métier et pour beaucoup, chemin d’évasion, alors, faut y'aller....

Là, au fin fond d’un énième étalage (revue Musiq) des 100, ou 200, voire 500 disques indispensables à toute discothèque (stock Ipod, ou playliste deezer/Itube ou encore simplement en carte SD mini au creux du téléphone…) – lettre S (Antoine y arrive en lecture de dico) – voilà Shakti…
Anodin ou passionné, selon les goûts ou l’humeur du jour, la lecture de l’article, resituant l’entrée en lice du groupe préfigurant une forme de « worldmusic »  effectivement peu attendue en ces années où le jazz rock aura faibli et où il sera devenu fusion, me replonge dans les souvenirs…

John McLaughlin…

Voilà bien un de ces musiciens qui a traversé ma vie générationnelle de façon quasi incontournable.
Voilà bien un de ces artistes, un de ces créateurs, un de ces instrumentistes qui auront fait couler encre et passions, au cours de débats parfois tumultueux ou retords opposant tout et/ou n’importe quoi, n’importe qui.
Voilà bien un homme sur lequel on aura collé de trop nombreuses étiquettes, celles-ci oubliant parfois l’essentiel, celle de musicien virtuose certes, avant-gardiste aussi, guitariste, bien sûr…
et pas des moindres mais aussi de grand compositeur, de jazzman accompli, d'innovateur technologique, ce qu'on aurait vite tendance à oublier...

John McLaughlin est peut-être quelque part une sorte d’archétype médiatique représentant idéalement l’image du musicien pour musiciens, du guitariste pour guitaristes, de l’artiste pour public averti ou en mal d’élitisme, ayant profité de cet idiome nommé jazz pour se mettre sur le piédestal de ceux qui connaissent, savent, prétendent.

John McLaughlin est encore jugé par certains de mes amis guitaristes comme le plus véloce, le plus rapide, le plus fulgurant, le plus précis aussi… c’est donc certainement vrai, je ne mettrais pas en doute leurs avis éminemment indiscutables, ce sont des professionnels de l’instrument, donc… John McLaughlin fait partie, ou non, de leur panthéon…
Qu’ils l’aiment, le vénèrent ou que celui-ci les insupportent, ils ne peuvent l’ignorer, et en tout cas ils sont bien obligés, même de loin, de s’y référer.

Nous parlons donc de guitare(s), un instrument que j’adore mais auquel je ne pige strictement rien…
La basse j’arrive encore à capter les mécanismes profonds, mettre le doigt dans la case de la quinte pour une ligne basique et chercher les demi tons inférieurs ou supérieurs pour agrémenter...
La guitare, même sommaire selon Bobby, c’est vraiment un monde, un univers, une dimension qui m’échappe donc, que je garde en part de "rêve".
J’approche l’objet avec modestie et me contente avec les guitaristes que j’admire de ne parler que… de musique.
La guitare et les guitaristes, c’est un peu comme avec les batteurs, une fois qu’ils commencent à causer matos, accords, tablatures, ras, flas, kick et autres double pédales, c’est un peu comme débarquer en haute école de chimie, avec son lot de terminologies fascinantes et incompréhensibles.
Ce qui me rassure c’est que je crois bien que quand on se met à parler claviers, le regard de mes amis guitaristes ressemble au mien face à certaines tablatures.
La seule façon de s’en sortir de part et d’autre reste donc simplement de parler musique…

Seulement, ce n’est pas si simple qu’il n’y parait, car bien souvent l’instrument cache l’essentiel et le langage qui va avec ferait presque oublier que celui-ci doit être mis au profit justement, de ce seul objectif… réaliser de la musique.

John McLaughlin possède lui tous ces langages, qu’ils soient de ceux qui lui permettent de créer une musique tour à tour visionnaire, créative ou de pur plaisir en jammant avec des amis de sa trempe, ou encore de ceux qui lui permettent d’appliquer sur son instrument tout ce que lui dicte sa pensée éminemment agile et aiguisée.
Il fatigue parfois, lasse aussi, peut souvent sembler démonstratif – l’admettre est évident et voir au-delà, en certaines circonstances n’est pas spécialement aisé, car, justement l’image du guitariste digne du grand prix de F1 est et reste là, en bien des occasions.

Invitez des amis à un repas délectable, Mercurey à l’appui et passez en musique de fond « Jazz Jungle » de l’album « The promise »....
J’en ris d’avance…
Entre Michael Brecker et John, mais aussi le staff qui là n’a plus du tout le statut d’accompagnateur c’est presque à qui gagnera ou arrivera le premier à la fin du titre...
John et Michael se tirent une bourre entre potes digne de celles de de Schumacher/Hill pour le grand prix...
Dennis Chambers n’est pas loin derrière et les talonne de peu, tandis que Don Alias et James Genus assurent le bitume de la piste et l'arrêt au stand – tant que possible et quand ils y pensent (à s'arrêter)...
Voilà un peu l’image qui vient à l’esprit trop souvent quand on écoute l’éminent guitariste...
Il faut suivre et on est vite fatigués... de tant de ce que l’on croit être démonstratif.

Si je parle bagnole c’est que quelque part j’imagine un peu la chose suivante : John McLaughlin c’est un peu comme le gars qui a une Maserati...
Il peut rouler pépère, profitant de l’habitable et certainement de la sublime créature assise à ces côtés mais de temps en temps, il se fait un coup de fun et fait chauffer la machine...
Il en a les capacités et les moyens alors, se refuser un petit plaisir ?
Ce serait vraiment dommage...

Allez, je vous file une Ferrari de base au sortir de votre Seat Ibiza ou de votre Clio et on va bien voir quelle idée, à part vous taper un bon 150 mini et faire crisser la gomme sur l'asphalte, vous vient à l’esprit, de prime abord...
Le seul bémol qui vous fera rester « raisonnable » est votre capacité réelle à mener l’engin sans sortir de la route, dans la mesure d’un contrôle (autre que celui des képis) incluant réflexe, anticipation, acuité, maîtrise technique de ce type de conduite à laquelle vous n'êtes évidemment pas habitué...

John McLaughlin, quand il empoigne le manche de sa guitare a devant lui toutes les options possibles... normal, il maitrise parfaitement tous les sujets de l’instrument et peut se permettre pointes de vitesse, dérapages parfaitement contrôlés ou simplement balade admirative du paysage.
Et il embarque avec lui ses amis, leur proposant selon son envie, de le suivre dans ces multiples possibilités, qu'ils courent ou qu'ils maraudent.

Je l’ai découvert avec, génération oblige, le Mahavishnu Orchestra, version primaire.

Mahavishnu Orchestra - 1971 Inner Mounting Flame - YouTube
Mahavishnu Orchestra - Birds of Fire FULL ALBUM HD - YouTube
Mahavishnu Orchestra -- The Dance of Maya [Live (1973)] - YouTube
Mahavishnu Orchestra - 1973 The Lost Trident Sessions - YouTube

Il lorgnait vers Stravinsky dont il avait arpégé la complexe harmonie et dont il avait redistribué la décomposition métrique et il s'était déjà entouré d’un de mes batteurs favoris dont le nom, comme  le sien, fait en légende partie des incontournables et presque indiscutables, à savoir : Mr Billy Cobham.
Jan aura eu peine à suivre l’aventure, préférant mettre ses doigts agilement rock, funk ou soul au profit d’autres aventures moins virtuoses, allant même jusqu'à se poser au bord de Miami pour imiter son ex-boss... avec ses synthés...
Rick aura été la route avec ses balises d'arrêt au stand ou de marquage de la piste et Jerry le potentiel jouteur, mais il était malheureusement parti second, et ce dès le premier titre.
Premier Mahavishnu Orchestra, passionnant, virtuose, énervant quand il s’agissait - que l’on soit guitariste, claviériste ou encore batteur (mon cas) - de tenter l’infime reproduction du nombre de figures instrumentales impressionnantes de maîtrise jetées avec aisance à la mn carrée – voici mon entrée en la sphère Mc Laughlinienne.
Voici quelque part également mon entrée dans ce monde trop facilement étiqueté jazz-rock.
De là, puisque le terme rock - quasi seulement par le fait du critère « d’amplification » et d’une mise en évidence de la guitare - pouvait en pointillé s’autoriser référence, je me suis penché sur l’autre terme de l’étiquette : le jazz.
Pour commencer et en partant de John ou d’autres comparses emplissant à profusion le bac vinylique étiqueté jazz-rock de la Fnac, tels que Herbie Hancock, Billy Cobham, Chick Corea avec son Return to Forever et ses copains échappés (Stanley, Lenny ou Al, l’autre adversaire de la six cordes), mais aussi Joe Z, j’ai remonté le fleuve jusqu’à sa source : MILES...

Le premier îlot sur lequel je me suis arrêté fut « Live Evil » et j’y découvrais un John McLauglin reptilien, habile et retord, inattendu et excessivement inventif, sachant se tirer habilement des déliriums fantasmagoriques d’un Keith Jarrett, celui-ci triturant compulsivement un orgue imposé par le mage noir.
John se débattait ici entre un Miles wahwahté à mort, hendrixien jusqu’au bout de la jam seventies et tour à tour ou ensemble, trois allumés du joujou claviériste, armés de modules divers et variés, Mr Corea, Jarrett ou Hancock... sans compter un Jack DeJohnette (que j’ai découvert également ici), totalement exubérant, mêlant l’expression free avec le concept de la jam session woodstockienne.
Heureusement que Michael (Henderson) était là pour tempérer tout ce bouillonnant personnel – Dave (Holland), lui, ne voulait se résigner à cette sagesse, trop heureux d’empoigner une basse électrique, sa contrebasse il l'avait laissée dans le hall d’entrée du club ou du studio.
Brr...

Miles Davis - Sivad - YouTube

Plus haut je m’arrêtais, devenu inconditionnel du trompettiste défricheur, leader, magicien - et tant d’autres qualificatifs que le fan que je reste ne peut inscrire ici sans tomber dans l’énumération lexicale - sur un titre rendant hommage à celui sans qui ce défrichage davisien d’univers sonique eut été probablement autre et moins direct : « Go Ahead John » (« Big Fun »).
La légende anecdotique qui fit que, à la sortie de l’album, nombre d’acheteurs le ramenèrent, croyant une erreur de pressage tant le triturage sonore de John sur son instrument était inédit, ne fit qu’ajouter à mon admiration pour Miles et... pour John McLaughlin.

Miles Davis - Go Ahead John (1/3) - YouTube
Miles Davis - Go Ahead John (2/3) - YouTube
Miles Davis - Go Ahead John (3/3) - YouTube

L’une de mes dernières étapes avant l’arrêt définitif dans le pays davisien, m’imposant l’investissement (digne de celui d’un propriétaire terrien) de multitude d’albums de Miles, ce, juste pour n’avoir à ne plus quitter ses contrées électriques puis remontant dans le temps, jazzistiques... l’une des dernières étapes dis-je fut l’entrée en la matière de l’album composé de deux titres : « Jack Johnson ».
Cobham en une cymbale et batterie minimale (bien loin de l’équivalent d’un magasin de musique qu’il ne tardera pas en carrière solo à exhiber par la suite, sur scène ) et John - armé d’un simple ampli dont le grésillement des lampes ferait aujourd’hui pleurer les amoureux du vintage -  soutenus par un Michael Henderson à la ligne de basse pompée depuis par tous les afficionados du blues schuffle (et pas que - cf  « Freeway Jam » de Jeff Beck), genre implacable et immuable sont rejoints par un Herbie ayant cherché un piano et obligé de se contenter de l’orgue posé là par Miles.
Ils posent là l’écrin le plus majestueux qu’ait pu rêver le trompettiste en cette période d’entrée en acides substances  chargées d'électricité.
Alors par le truchement d’un accord dont j’ai depuis compris le mécanisme (un voicing de treizième usé en mi comme un dièse neuf puis usité en si bémol comme une treizième), impliquant modes d’improvisation ouverts et cependant fondamentalement bluesys, Miles offrira dans un solo déboîtant tout sur son passage, le sublime, les aigus les plus hallucinants, la pugnacité la plus punchy, l’énergie pure et dure, la hargne et l’engagement du peuple noir.
Miles n’aura pas encore besoin de wahwah, mais il y viendra rapidement...
Le fantôme d’Hendrix (dont on dit en légende que John McLaughlin  a enregistré quelques jours avec lui et dont les bandes sont perdues, disparues et certainement volées) l’aura désormais hanté, le vaudou funky de JB l’aura définitivement habité.

Right Off, Pt. 1 - YouTube
Right Off, Pt. 2 - YouTube
Right Off, Pt. 3 - YouTube


En fanatique inconditionnel d’un autre de ces batteurs qui m’ont traumatisé, à savoir Mr Tony Williams, j’ai tenté sans réelle capacité d’appréhension, sans clés d’écoute qu’elles soient culturelles ou encore sensorielles d’entrer dans le Lifetime.
La bataille médiatique faisait rage afin de déterminer qui de Miles ou Tony pouvaient prétendre être les premiers dépositaires du titre de l’étiquette jazz-rock...
Tony visiblement horripilé par les journalistes lui rappelant systématiquement ses références honorifiques davisiennes voulait mettre en avant ce projet impliquant John McLaughlin et Larry Young (orgue).
Ils furent rejoints par la suite par un Jack Bruce en mal de recherche d’une nouvelle "crème" à faire monter.
Lifetime, avant-gardiste à l’extrême, fusionnel bien avant l’heure, ouvert et débridé bien au-delà de l’imaginable en ces temps de quêtes musicales absolutistes et politiquement revendicatrices était un de ces groupes éclairs, urgents, immédiats et instinctifs qui heurtaient, laissaient peu de place à la rêverie, car au propos dur et engagé, aux sonorités immédiatement autres.
La véritable alternative du power trio à la JH Expérience ou à la Cream claptonienne résidait là, en ces fougueux chercheurs, déjà emplis d’un « passé » musical incommensurable et d’un réel sens de volonté créative, maladroitement estampillé expérience ou expérimental.
Ces gars-là n’essayaient pas, cela faisait bien longtemps déjà, sur une faible échelle de jeunesse, qu’ils avaient usé de ce terme (Tony avait adhéré au free, ouvert la voix d’un drumming inédit chez Miles en quintet, Larry sortait l’impensable de son orgue, Jack avait réussi à transformer la guitare basse en basse et à mettre ainsi en avant l’instrumentiste bassiste et déjà, bien avant Jaco, lui donner un autre sens. Quant à John, il synthétisait son savoir jazz au langage hendrixien, rien que ça...) – ces gars-là inventaient et ils savaient très bien où ils allaient...
Seulement, encore fallait-il être en mesure pour l’ado que j’étais, ouvrant ses oreilles tout azimut, d’appréhender l’essence de leurs pensées pour y adhérer au-delà de la seule impression de musique en lave fusionnelle brute et brutale.
Même encore aujourd’hui cette aventure du jeune McLaughlin m’impose une mise en conditions, comme si je cherchais encore malgré de nombreuses écoutes, quelque mystère caché, quelque énigme enfouie dans les méandres de l’esprit créatif.

The Tony Williams Lifetime - Emergency! (1969) [Full Album] - YouTube
Tony Williams Lifetime "To Whom It May Concern - Them" & "To Whom It May Concern - Us" - YouTube
Tony Williams Lifetime "This Night This Song" - YouTube
Tony Williams Lifetime - "Right On" (1970) - YouTube
Tony Williams Lifetime - Allah be praised - YouTube
"Turn It Over" by The Tony Williams Lifetime - YouTube

En parallèle j’aime à me plonger sur son historique participation au cultissime « Escalator over the Hill » de la géniale Carla Bley (il faudra que je lui consacre un hommage d’ici peu).

Carla Bley - Escalator Over the Hill (Full album) - YouTube

En fouinant dans ma discothèque vinylique, on y trouve parmi les nombreux albums classés rayon jazz (car il faut bien les mettre sous un état généraliste) un de ceux du grand artiste qui me plonge dans une parfaite perplexité.
Il s’agit de « Extrapolation »... son premier album solo.
On met souvent sous le mot perplexe, une connotation quasi négative, ou tendant comme telle.
Pour moi, cet album me rend perplexe parce qu’il résumerait presque à lui seul (alors qu’il est son premier) l’espace multidimensionnel de John McLaughlin.
Guitariste hors normes et à l’indiscutable virtuosité, systématiquement avant-gardiste et créateur, visionnaire, compositeur inédit, à la fois personnel (mais tout compositeur l’est, par essence, en principe) mais surtout en parfaite connaissance d’un langage sans pour autant l’affirmer référent, juste en user pour créer au-delà de l’habituel, des références, des clichés... et ce si jeune... voilà quelques réflexions qui s'imposent déjà ici.
John Surman, autre visionnaire depuis longtemps, passé rapidement sous label ECM, est un participant non négligeable à ce premier opus...
D’emblée dès l’ouverture avec ce thème « extrapolation » à la ligne de contrebasse imposante, cet exposé thématique à la fois harmonisé merveilleusement entre sax et guitare puis déjà cette gestion des décompositions du tempo sur laquelle l’expression frise le free jazz, on sait qu’on a affaire à « autre chose », à une autre dimension.
Alors de ballade pop (« It’s funny »), folky (« binky’s beam ») en formidables libertés (« Pete the poet ») on ratissera très large... on y est précoce et déjà très affirmé.
La perplexité face au génie – c’est probablement ce qui m’interpelle ici, cette formidable maturité visionnaire résumée là, en un début qui n’est même pas passible du terme de prometteur puisqu’il tient à lui seul déjà largement plus que des promesses.

John McLaughlin - Extrapolation (Full album) - YouTube

Il y aura « My Goal’s Beyond » - hyper plébiscité par la critique et sa reprise du thème sorti de l’univers Mingusien « Good Bye Pork Pie Hat » que ne manquera pas de re-détourner Jeff Beck, alors qu’il commençait à lorgner vers les horizons défrichés par John, lui récupérant Jan Hammer pour quelques aventures/pépites indispensables (« Blow by Blow, produit par G.Martin, « Wired », un live de circonstance et un éclair en guise d’adieu en « There and Back »).
Incontestable que cet album...
Je lui préfère « Extrapolation », pas sûr que ça s’explique, mais comme il m’a fallu du temps pour le comprendre, c’est peut-être là l’une des raisons.

JOHN MCLAUGHLIN, Goodbye Pork Pie Hat (Mingus) - YouTube

Avec la plongée dans l’univers vertigineux et riche (ce malgré les œillères de certains détracteurs) du jazz dit rock c’est d’emblée avec le Mahavishnu Orchestra seconde formule que j’ai pu m’ouvrir vers une certaine approche musicale, instrumentale mais aussi quelque part conceptuelle (en matière de composition et d’orchestration).
Moins brutale et peut être plus réfléchie, moins rugueuse et cependant tout aussi imbibée de Stravinsky, de jazz et d’école américaine, pourtant tout aussi hindouiste tout en restant techniquement pharaonique, peut-être plus diverse et pluraliste, cette seconde version d’un groupe devenu en peu de temps légende, j’en ai commencé l’ascension avec « Apocalypse », ambitieux, généreux, puissant et quelque part majestueux.

« Inner worlds », l'opus 3, aux bizarreries perpétuant le « Go Ahead John » enfonçait, en conclusion de cette fulgurance, le clou par un hommage en retour "Miles out"....
John s’y employait en délires subversifs. Il s'était armé pour cela d’une guitare synthé dont il exprimait que malgré l’attrait sonore qu’il y trouvait, sa satisfaction ne pouvait être pleine, la technologie d’alors (les paramètres de synchronisation certainement), ne pouvant « suivre » correctement sa vélocité naturelle.

Mahavishnu Orchestra Inner Worlds - YouTube
Mahavishnu Orchestra Miles Out - YouTube
Mahavishnu Orchestra ~ In My Life - YouTube
Way of the Pilgrim - YouTube

Cette ascension m’a mené "à l'envers" vers « Visions of the Emerald Beyond » et avec cet album une addiction totale au jeu monumental de Narada Michael Walden (qui lui aussi passa en invité chez Jeff Beck), associé à Ralphe Armstrong à la basse et une adoration nouvelle pour la « french violin touch » en la personne de Jean Luc Ponty.
Jean Luc Ponty était arrivé à point nommé pour être le véritable alter ego de John Mc Laughlin, un parfait comparse de dialogue, à la technique là aussi ahurissante, au jeu/phrasé resté essentiellement staccato et détaché en solo mais d’un grand lyrisme lors de phrases thématiques au legato parfaitement émotionnel.
Le Mahavishnu Orchestra version deux imposait littéralement deux solistes aux associations, solis et dialogues fulgurants.
Ils  puisaient en langage à la fois dans le jazz mais réactualisaient les imprégnations du classique et s’embarquaient déjà vers les modes orientaux.
Chacun avait sa part égale d’expression mais aussi d’effets (saturation, wahwah, chorus, etc...).
Le violoniste virtuose français faisait lui aussi couler l’encre depuis sa fuite outre Atlantique, ses affirmations jazz en clubs newyorkais et surtout son passage éclair et très remarqué chez Zappa.
Ici John McLaughlin avançait plus encore vers de nouveaux domaines, il revisitait la touche funky, il partait explorer les contrées du quatuor à cordes et re-fracassait, comme dans « Right Off », le joyau du blues.
Ce second Mahavishnu est certainement l’un de mes groupes d’influence et cette fois il l’est au-delà de son vecteur instrumental, mais bel et bien totalement musical.

Mahavishnu Orchestra - Visions of the Emerald Beyond FULL ALBUM HD - YouTube

L’album « Apocalypse » reste une œuvre totale, positionnée dans un socle tellurique et symphonique complètement tributaire de Stravinsky, mais sans pour autant en être pâle copie ou encore récup’ intellectuelle de clichés.
On y entend aussi l’influence de l’école américaine avec une écriture modale et orchestrale novatrice.
C’est une véritable pièce orchestrale, grandiose, grandiloquente parfois, qui agit à la manière d’un concerto à multiples participants, le LSO dirigé par Michael Tilson Thomas y tient une place centrale. Il alterne ou joue avec le groupe pendant que Jean Luc Ponty et John McLaughlin œuvrent en solistes. Gayle Moran à la voix tendant vers le lyrique est à appréhender comme telle et non comme l’on eût voulu la cataloguer jazz ou même pop-rock...
George Martin est le producteur du pavé, ce qui n’est pas peu dire.

Mahavishnu Orchestra Apocalypse Full Album wmv - YouTube

en parallèle à découvrir absolument : 
Don Sebesky "Firebird, Bird of Fire" (from Giant Box, 1973) Mc Laughlin/Stravinsky Mash Up. - YouTube

Je n’ai pas encore abordé Shakti, point de départ de mes pensées anarchiques et désordonnées envers John Mc Laughlin que je réalise déjà à quel point la somme d’actes musicaux dont il est le dépositaire ou encore le contributeur est énorme...
Lifetime, Miles, Mahavishnu, carrière solo marquée de points d’accroche indiscutables...

Dans cette période riche et tumultueuse, il croisera aussi le manche avec Carlos Santana et là effectivement le terme de jazz rock aura une véritable dimension, sans pour autant et c’est justement là l’intéressant de l’objet culte, en avoir les défauts/clichés.
Un album que j’aurais tardé à écouter attentivement, lassé par le trop plein de Santana en ces périodes fin seventies où de « Festival » en « Moonflower », d’énormissime « Europa » en « Samba pa ti », notre échappé de Woodstock était incontournable, inévitable, obligatoire...
Que deux géants se rencontrent en un album chargé de spiritisme et de respect était presque logique, de là à le faire, c’était autre chose, de là à l’espérer c’était surement dans l’air du temps.
De là à ce que le pas de l’intention ou de la rencontre prenne un autre tour que celui de purement commercial, dépassant les attentes, ce n’était pas gagné.
Ils ont pourtant réussi en présentant ce partage musical, humble, spirituel et digne de leur grandeur d’alors. Mais pour cela ils avaient choisi le bon mentor comme moyen d’expression et au-delà d’une attente démonstrative c'est bien  l’argument coltranien qui donna l’axe vertébral de leur amicale fusion.
"LOVE DEVOTION SURRENDER" - tout est finalement, dans le titre...

Santana & McLaughlin - Love Devotion Surrender - 01 - A love supreme - YouTube
Laughlin-Santana - Let us go into the House - YouTube

Je ne parlerais pas encore de Shakti, car là, j’ai déjà fait peu cas de la chronologie et vous l’aurez compris, j’ai abordé le puissant guitariste tout azimut, parfois au fil de la vie avec la sortie de ses albums, d’autres fois en retours sur le gré de sa carrière, ou encore en puisant bien plus tard dans son catalogue riche en toutes musiques.

En passant...
J’aime particulièrement sa pause Mahavishnu, celle qui le fit repartir en solo et au fil de sessions inviter des amis, retrouver le bonheur pur et simple du partage, de la nostalgie de certaines époques, d'esthétiques...

En 78 puis successivement 79 il va sortir deux petites perles « Electric Guitarist » et « Electric Dreams ».
Il sort de l’aventure Shakti et a besoin de reprendre le chemin de l’électricité.
Le casting du premier retour électrique est impressionnant et l’orientation diverse des titres permet la plongée dans les divers univers soit des invités, soit du passé du guitariste.
« Are you the one ? » avec Jack Bruce et Tony Williams sera un titre écouté en boucle...
plus tard je referais de même avec un extrait glissé dans un Havana Jam Festival, Jaco Pastorius aura chipé la place à Jack Bruce...  en "trio of doom".
Pour « Electric Dreams » le casting sera moins vaste et John aura sollicité pour ce melting-pot un peu de Shakti - passé électrique par la suite en ECM aventures (Shankar) - et celui qui arrive ici comme la lumière, David Sanborn.
C’est à partir de là que j’ai certainement (bien que je suivais tout ce qu’il était possible concernant l’artiste) commencé à collectionner, organiser, préciser et détailler mon approche du personnage...

John McLaughlin - Electric Guitarist FULL ALBUM HD - YouTube
John McLaughlin - Electric Dreams - YouTube

Un fait intéressant dans sa carrière a été qu’autour de sa rencontre passionnée avec l’une des sœurs Labèque, Katia, John McLaughlin s’est entouré d’un staff de musiciens hexagonaux tant issus du monde de la musique classique (Augustin Dumay, Katia Labèque) que du jazz (Celea/Couturier/F Jeanneau).
Mixant ces rencontres à la fois esthétiques, amicales mais aussi de langage musical avec Tommy Campbell en comparse américain, tout en lorgnant déjà (voir plus bas) sur Bill Evans, il a présenté une œuvre, là encore, inédite, tant en composition qu’en influence/approche musicale : « Belo Horizonte ».
Je sais avoir usé cet album sur ma platine et surtout à partir de là prêté une attention toute particulière au jazz français.

John McLaughlin - Belo Horizonte - YouTube
John Mclaughlin - One melody - YouTube
John Mclaughlin - La baleine - YouTube
John Mclaughlin - Very early - YouTube
Waltz for Katia - John Mclaughlin - YouTube
John Mclaughlin Stardust on your sleeve - YouTube

Pas vraiment anecdotique, il  y invitait Paco De Lucia qui avait permis de cristalliser la tendance hispanisante venue de très loin en Miles Sketches, pour inonder la langue de Chick Corea et revenir s’enraciner chez son  guitariste Al Di Meola (« Mediterranean Sundance »)...

Mediterranean Sundance - Al Di Meola - YouTube
Al Di Meola,Paco De Lucia,John Mclaughlin - Mediterranean Sundance - YouTube

Et justement les voici qui partent s’amuser, jouter, se défier...
Ce combat de coqs en ovation tant du public que de guitares acoustiques va enregistrer un album bien curieusement vendu à pléthore...
Une tournée me permettra de les écouter au Cap d’Agde et de n’en retenir que le fait de les avoir vus, certes, entendus, pour sûr, écoutés, pas si sûr...
Comme nombre de passionnés de ce jazz rock et de ses fers de lance, l’album « Friday Night à San Francisco » au accents démonstratifs plus que musicaux, je l’aurais acheté (tout comme son compagnon similaire en duo Chick Corea /Herbie Hancock), un peu écouté puis vraiment négligé.
A l’heure où j’en parle je ne sais même pas si j’ai envie de le sortir de sa pochette, je lui préfère son suivant, en studio, bien plus « musical » et conceptuellement réfléchi...
Mais on a bien le droit de s’amuser, après tout...
C’est un peu comme prendre un bonne biture entre potes, se refaire le monde, parler pour ne rien dire... ce n’est pas vraiment utile, mais ça fait du bien (et ça remplit le compte en banque).

John McLaughlin, Paco DeLucia, Al DiMeola - Friday Night in San Francisco ( Full Album ) 1981 - YouTube
Al Di Meola, John McLaughlin & Paco de Lucía - The Guitar Trio (1996) - Full Album - YouTube

Au beau milieu de tout cela me voici enfin avec ce qui est plus qu’un épisode : Shakti.

Trois albums, issus d’une volonté du guitariste de se plonger dans la culture indienne, tant musicale que quotidienne et bien entendu spirituelle.
Le premier, jubilatoire et enregistré en public est celui cité dans cet article qui m’a fait me re-pencher sur la carrière de John Mc Laughlin.
Même si je lui trouve un formidable intérêt, de par sa nouveauté et son audace à franchir ainsi le pas de ses choix d’évolution artistique, je lui préfère le second « A Handfull of Beauty », probablement plus soigné, en studio, mais aussi plus réfléchi, plus organisé, plus mur aussi.
« Natural Elements » lui succédera, tout aussi important.

John McLaughlin & Shakti - 1976 Shakti - YouTube

Lady L - Shakti - A Handful Of Beauty - 1977 - YouTube
Shakti- India - YouTube
Shakti - Isis - YouTube

Shakti - Natural Elements FULL ALBUM HD - YouTube

Ce qui me frappe dans cette direction prise en plein milieu des seventies est cet engagement de l’homme et son positionnement.
Être ainsi capable de renverser sa carrière pour creuser vers un horizon qui, il faut le percevoir, se dessinait mais en s’inscrivant dans la globalité d’un langage c’est à la fois honorable, respectable mais aussi admirable.
L’inde et son univers sonore avaient été défrichés par George Harrison au sein des Beatles et son intention réelle à s’imprégner de cette culture fut décisive tant en influence qu’en ouverture d’une génération sur le monde autre qu’occidental – mais si G.Harrison est quelque part resté emprisonné dans le format médiatique des Beatles, cette volonté personnelle d’ouverture honnête n’étant pas perçue de la même façon par ses auditeurs, John Mc Laughlin n’est probablement pas parti  du même postulat.
Le « système » des modes hindous, leur complexité et leur empreinte spirituelle, on sait retrouver ça chez Coltrane, dans sa quête d’absolu tant spirituel que musical.
C’est donc inscrit dans le patrimoine d’un artiste de jazz et quelque part j’aime à penser que chez le guitariste au langage si pluraliste cela était inscrit en moyens d’expression.
D’ailleurs c’est tangible et perceptible dans la plupart des Mahavishnu, influencés jusqu’au terme générique et bien sur ce passage en univers coltranien avec Carlos Santana le prouve.
Attendre John McLaughlin sur de telles contrées relevait de l’évidence, y trouver le latino de « Oye Como Va », a été, soit dit en passant, une sacrée surprise...

Shakti sera donc une décision logique, véritablement étudiante, une sorte certainement de chemin tracé...
Mais entre étudier et oser ainsi se lancer publiquement et installer aux oreilles du public un tel concept, cela force le respect.
On aura donc du temps pour se poser, jambes croisées et se délecter de cette aventure musicale hors normes avec les trois premiers opus.

Puis Shakti fera un retour et là, l’album « Remember Shakti » sonnera à mes oreilles comme une pure merveille, un voyage... une autre dimension  - et Hariprasad Chaurasia n’y est pas pour rien dans cet adage.

Remember Shakti - Mukti - YouTube
Mahavishnu va donc revenir, nous sommes en 1984 et resurgir des cendres d’une pause spirituelle obligée, d’un retour amical à l’électricité, histoire de « faire le point », d’une amusette entre potes guitaristes et d’ une ballade sentimentale française et classique.

On convoque alors un jeune échappé de chez Miles, Bill Evans (au saxophone, l’autre étant désormais en train de jammer au paradis), on appelle Billy Cobham, obligatoire, on eighties à foison les claviers désormais numériques en embauchant le tonique Mitchell Forman et on part à la découverte d’un alien de la basse, sorte de Jaco du futur en la personne de Jonas Hellborg auquel le titre composé par Jaco lui-même (Punk Jazz – chez Weather Report) pourrait être clairement affecté.
Katia Labèque triture le joujou synclavier et Danny Gottlieb, le batteur de Metheny vient bricoler les percus.
John Mc Laughlin a enfin une guitare synthé digne de ses attentes.
Il ne marche pas pour autant sur les contrées de Pat Metheny, ce nouvel arrivant des six cordes qui défriche le terrain en « sons branchés » et qui ne jure que par Ornette.
Ce « Mahavishnu » rajoute à toute cette somme musicale le langage cette fois totalement assimilé, réinjecté en électricité synthétique, de la période Shakti.

Mahavishnu Orchestra album wydany w 1984 przez Warner Bros Records - YouTube

Arrivé là et sur cet album que j’ai écouté tant par plaisir nostalgique que par attrait musical, je n’ai suivi la carrière de l’artiste qu'en pointillés.
Mais chaque pointillé m’a instantanément attiré et laissé une trace tant musicale qu’affective, émotionnelle ou encore respectueuse.


...

Au hasard de ces points de retrouvailles il y a eu « Time Remembered » certainement l’un des hommages à Bill Evans les plus remarquables, de par le concept (Bill joué par un ensemble de guitare c’est somptueux) mais aussi la sincérité émanant de chaque pièce, véritable écrin faisant relire la musique du grand compositeur que fut Bill Evans.
Si je précise compositeur et non pianiste c’est bien justement l’idée de cet album qui rend hommage ne serait-ce que par son axe instrumental à cette facette que l’on aurait tort de négliger, de l’homme.
Alors l’on va redécouvrir sous un angle sonore différent des compositions passées au degré de standards, interprétées avec finesse, intention, émotion et auréolées d’une écriture d’arrangement à « tomber par terre »...

John McLaughlin - Time Remembered - John McLaughlin Plays Bill Evans - YouTube

J’ai adoré en parallèle les albums des frangines pianistes... les sœurs Labèque.
Le premier « Gladrags » dédié au ragtime avec des arrangements de F.Jeanneau revisitait les classiques de Scott Joplin à deux pianos.
Le second présentait une relecture du West  Side Story...
John McLaughlin m’y est apparu sous un nouveau visage, celui de producteur et tant par la qualité de la mise en espace sonore que de la direction artistique il s’y révèle là encore, pertinent, juste, visionnaire, personnel et authentique.

Gladrags - Katia Labèque,Marielle Labèque | Songs, Reviews, Credits | AllMusic

Overture - Marielle Labeque - Katia Labèque
Scherzando - Marielle Labeque - Katia Labèque
Blues - Marielle Labeque - Katia Labèque
...

Au hasard j’ai pioché « The Promise », conceptuellement semblable à ses retours électriques post Shakti...
Avec une grosse débauche d’invités, dont de nouvelles stars de la pratique instrumentale (Colaiuta, Hymas, De Francesco, Beard, Chambers) mais aussi quelques bons potes bien choisis (Sanborn, Brecker, Sting, Jeff Beck et un flash Shakti) voilà le genre d’album qui s’écoute comme un carnet de voyages "multidimensionnellement" musical...
Il va ratisser les vieilles contrées, va flirter avec les nouvelles, taper le standard (Django et aussi une version à fleur de peau de the Peacocks), japoniser...
Kaléidoscope pas si anecdotique que cet album, mais plutôt bien représentatif de John...

John McLaughlin & Jeff Beck - Django - YouTube
John McLaughlin 'Jazz Jungle' - YouTube
John McLaughlin - Thelonius melodius - YouTube
John McLaughlin ~ The Peacocks - YouTube
Tokyo Decadence - John McLaughlin

John Mc Laughlin Trio enregistré en 1989 avec Trilok Gurtu et Kai Eckhardt est un de ces live de pure jouissance et rien que sa vision du « Blue in green » de Miles vaut le détour vibratoire...
Le jeu acoustique du guitariste est là encore d’une précision tant de son que de langage rappelant à certains jeunots qu’il est encore là et toujours aussi vivace...
Il y arbore également une nouvelle guitare synthé, côtoyant les rivages d’un autre géant (Alan Holdsworth) prouvant là encore son ouverture et son intérêt pour la nouveauté technologique.

Le retour de Shakti (« The believer » - « Saturday night in Bombay » - « Collection ») pourra me fasciner comme m’agacer après ce Remember inoubliable... selon les plages et l’humeur on se laissera porter par l’admiration (dispensable) face à la virtuosité obligatoirement de retour et l’on trouvera des espaces méditatifs.
Indispensable ? Dispensable ? à ce stade je vous laisse juge.

Bell'Alla - YouTube
Giriraj Sudha - YouTube
Luki - YouTube
Shringar - YouTube

Finding the way - YouTube
Remember Shakti - Maya - YouTube
Remember Shakti - Lotus Feet - YouTube


Il me reste à conclure avec cet opus magistral : le « Mediterranean Concerto ».
Le LSO y est de retour, M Tilson Thomas a repris la baguette, l’atmosphère y est joviale, tonique, percutante et précise, incisive, lumineuse.
On oublie le jazz, le jazz rock et il faut passer toutes les barrières d’étiquettes pour se plonger avec juste le terme de délice dans cette musique post classique merveilleusement écrite, orchestrée, composée.

Concerto For Guitar And Orchestra "The Mediterranean"/I. Rhythmic - John McLaughlin
Concerto For Guitar And Orchestra "The Mediterranean"/II. Slow & Sad - John McLaughlin
Concerto For Guitar And Orchestra "The Mediterranean"/III. Animato - John McLaughlin

John McLaughlin: The Mediterranean Concerto (1990) - YouTube

Embrasser d’un jet d’article la carrière d’un tel homme, d’un tel monument musical n’est pas simple.
A l’étiquetage multiple qui comme je l’ai signifié, masque parfois la vérité artistique, moderniste, classiciste, tour à tour électrique, synthétique ou acoustique, toujours abouti, jamais expérimental, systématiquement réfléchi, parfois cérébral mais au jeu également instinctif jouissif, guitariste, compositeur, producteur, arrangeur... John Mc Laughlin se doit de figurer parmi les immenses représentants de ce que cette fin de XXe siècle et ce début de XXIème en termes de ce que totalité artistique et créative, instrumentale et musicale ont pu produire.

Il a génialement touché à tout, s’est impliqué dans les mouvements musicaux (et sociaux/politico-culturels) émergeants en les anoblissant dès son intrusion en eux, il a ouvert le champ musical en de nombreux domaines, guitaristique d’une part - car il a su pousser les limites des instruments (acoustiques, électriques ou synthétiques) au-delà du concevable de par une faculté de jeu mêlant virtuosité et approche musicale - mais aussi esthétique en puisant dans LA musique, sans frontières, sans barrières, sans limites de genre.
John McLaughlin est donc un musicien au sens le plus large du terme, l’écouter et le considérer comme tel, au-delà de son image médiatique de guitariste virtuose m’est apparu comme valeur à repositionner, alors qu’au détour d’un Shakti, mentionné comme indispensable dans un numéro de feu Musik m’est revenue en l’esprit l’immensité de son chemin créatif.

Prenez donc le temps, l’envie et l’audace de puiser dans l’immense réservoir musical qu’il laisse – il y a là de quoi largement satisfaire le plaisir sensoriel de chacun.


   







Commentaires

  1. Je reviens après lecture plus attentive
    Superbe ( et instructif ) billet
    Je m'aperçois, à te lire, que je ne connais qu'une infime partie de sa carrière et donc de son oeuvre .....et de ses différentes facettes......et de toutes ses influences musicales.
    Et en plus tu nous fais piocher à droite et gauche vers d'autres univers musicaux : Stravinski, Miles, Bley, Tony Williams...etc...
    Bien apprécié le passage "bagnole" : image parlante
    Merci

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    1. J'aime conduire et plus jeune j'aimais conduire vite...
      une sorte de fantasme... inexplicable...

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  2. Sacré historique, dis donc. Je ne me rendais pas compte combien j'aimais de disques de John MacLaughlin, et au nombre auxquels il participa en quelques années. Son travail avec Miles Davis est exceptionnel, il est de loin son meilleur guitariste, même si Miles en eu de très bons à ses côtés. Mahavishnu première mouture est exceptionnel, mais le disque symphonique m'a moins plu. Ceci étant, je suis très ouvert au Jazz en ce moment, je vais le réécouter attentivement. Quant au Tony Williams Lifetime, pfff. ... c'est exceptionnel, sidérant. Shakti, les disques des années 80, j'ai un peu de mal, il me manque quelque chose. ...
    Si tu ne connais pas déjà, je ne saurais trop te conseiller l'album de Jack Bruce intitulé "Things We Like" de 1970, avec notre héros à la guitare, Dick Heckstall-Smith au saxophone et Jon Hiseman à la batterie. C'est du Jazz -Rock pur, et je le trouve très bon. L'album était un retour d'ascenseur de MacLaughlin après la participation de Bruce au Tony Williams Lifetime. La prise de son est très direct. J'aime ce choc entre le Rock Blues et le Jazz furieusement électrique de MacLaughlin.

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    1. merci de ton passage, j'ai cet album de Jack Bruce dans mes "archives" - il me faut absolument le ré-écouter.
      Shakti a été le point de départ de cet article, il en faut bien un...

      J'ai toujours aimé cet engagement artistique de McLaughlin, mais sûr que quand je me tombe avec le son l'entrée de Eternity Breath, c'est puissant et ça m'électrise !...

      Le Lifetime est une ligne d'horizon de Tony Williams, mon idole de drummer...
      En fait son tout premier album, une sorte de jazz proche de la liberté totale sans être vraiment free s'intitulait ainsi, il précédait Spring...
      Et là encore, au parallélisme de Dolphy, l'ami Tony était immense...
      Avec les albums que je cite et auxquels a participé J MCLaughlin, ton engouement est véritable...
      Pff... exceptionnel !... c'est on ne se peut plus juste.
      Dire que je n'ai pu apprécier cela que (trop) tard... et pourtant j'étais déjà dingue du Lifetime version New Tony Williams Lifetime avec Holdsworth... cet autre alien de la six cordes...
      bref, pour qui vénère comme nous Miles, Mc Laughlin est incontournable...
      Un peu comme Herbie-Tony-Wayne-Ron avec le quintet bis et évidemment Trane et Wynton ou encore Bill avec le premier...
      Puis l'électricité en rythm fonction avec l'immense et peu mis sous les projos Reggie Lucas, ce rythmicien hors pair qui fit des derniers opus avant renaissance de Miles se positionner la gratte rythmique comme un art, un crédo... écoutes pangea rien que la gratte et alors ça s'ouvre encore plus !
      on a pas parlé des bassistes mais j'ai cité Michael Henderson qui reste à mon sens la clé de voûte de tout cela...
      Bon bah, merci d'être passé si vite et bonnes écoutes attentives.
      à +

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  3. J'ai pris beaucoup de plaisir à te lire, il y a deux-trois trucs qui ont fait resurgir des souvenirs...je crois bien que j'ai découvert John McLaughlin par Pat Metheny, dont on était devenus fans avec mon père après un voyage en Amérique... je lui avais offert deux albums de McLaughlin, je crois qu'il y avait "The Promise" et l'album avec Paco De Lucia et Al Di Meola (il aimait beaucoup la guitare...)... et si mes souvenirs sont bons, il me semble qu'on l'avait vu en concert au Nancy Jazz Pulsations avec Trilok Gurtu, moi j'y allais surtout pour Gurtu et mon père pour McLaughlin...:)

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    1. tu me dis ça et de suite des époques resurgissent...
      trilok gurtu !... j'en étais fan et bien sur autour de j mc laughlin.
      il est d'ailleurs le percu du west side par les soeurs labèque... autre dimension, autre espace pour son immense talent.
      ah tu aimes metheny ?
      bon tu imagines bien que j'en suis carrément fan - lui aussi mériterait un tour d'horizon comme ici...
      je vais y penser.
      l'album studio des trois compères est géant et m'a remis les pendules à l'heure rapport à celui en live...
      mais s'amuser est un droit plus que légitime... et je crois qu'ils l'ont bien fait en ce trio digne de ces battles médiatiques.

      bon l'amérique...
      ça y est je suis jaloux, mais bon, je me suis promis d'y retourner... on en reparlera.
      il parait que le festival nancy est référence, je n'y suis jamais allé, ceci dit il est vrai que juste en parlant jazz on a ici (et quand j'étais en rhone alpes) de belles initiatives en ces domaines de festivals...
      pourtant ces temps ils ont eu la vie subventionnée très dure...
      l'autre débat de la culture selon nos clowns dirigeants...
      on en reparlera :(

      le w end arrive alors, guitare ?
      merci de ton passage et d'avoir pris le temps de lire...
      (plus de photos, le minima, que du texte avec deux trois lien... donc pour les courageux...)

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    2. C'est le texte qui est important, pas les photos...
      Il me semble que tu as été à NY, non? là c'est moi qui t'envie...;) Moi j'avais 20 ans, c'était un voyage en famille, la Géorgie, Louisiane (que New Orleans), régions que j'ai beaucoup aimées, surtout New Orleans, comme dans les films....
      Eh oui j'aime beaucoup Metheny, je l'ai vu à Antibes en 1998 je crois, c'est un des rares concerts de jazz que j'ai faits, à Nancy j'ai du voir Petrucciani, Wynton Marsalis et Dee Dee Bridgewater... disons qu'il y a souvent du beau monde (mais je ne m'y connais pas trop!)...moi j'y vais surtout pour voir le reste: Emilie Simon, Suzanne Vega, Brigitte Fontaine, Ben Harper, Massive Attack, Pascal Comelade, Yann Tiersen....:)

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    3. ah ne me branche pas su NY !...
      qu'une seule envie... y retourner et vite !
      mais il y a tant à voir aux states... et rien que lire nouvelle orléans...
      on parlera de metheny promis (orchestrion tu connais ?) - période ecm, que j'adore mais aussi le reste... et cet album où il triture ornette...
      les artistes que tu cites je les ai vus en concert, marsalis magique, dee dee en hommage elle, c'était à pleurer de respect et michel p, immense, vraiment immense !...
      bon, je te laisse je file à mes cours.
      à plus...
      merci

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  4. Ha te voilà bien de retour. Sinon, qui allait me pousser vers ces contrées que je fréquente peu, besoin d'un guide et de ses conseils, important le guide: ne buvez pas ou n'écoutez pas n'importe quoi sinon vous risquez etc...
    je me suis (re)plongé avec délice sur les débuts de Mahavishnu, j'y ai retrouvé mon compte, même phénomène que ces musiques qui ne vous disent rien jusqu'à ce que la mémoire retourne la compréhension.
    Tu sillonnes tellement de point que je ne m'arreterai que sur certaines parties.
    Vivement ton article sur Carla Bley, ça c'est un point.
    C'est par ton article enfin que j'écoute le "Visions of the Emerald Beyond". Toujours passé à côté car les critiques l'ignorent au mieux où ne sont pas tendres aujourd'hui. Mais c'est enfin pour moi l'occasion d'entendre avec attention sur la longueur JL Ponty. Dont j'ai du m'écouter cent fois sa participation chez Zappa dans "50-50". Donc je me suis attardé sur un disque qui si il est jugé dépassé alors moi j'ai su retourner dans ce passé. Il plait bien, il plait vite? C'est ce qu'on lui reproche? il y a quand même quelques trucs bien jouissifs "Cosmic Strut" et ce chant dans "If I Could See" et cette grandiloquence que j'adore.
    Ensuite? Je vais découvrir SHAKTI, que je ne connais pas du tout, j'ai écouté "Natural Elements" puis t'ai écrit ce commentaire. Plus rapidement rentré dans le tableau depuis que j'avais suivi le périple Afrique proposé par VIBRATION. et son long arrêt au MALI, Diabaté et Sissoko (Jeu de Kora) marrant comme connexion qui ne semble pas être une référence pour SHAKTI, qui est plus "excité" moins apaisé et pourtant mon cerveau a relié les deux!!??
    Voilà, un univers où je n'insiste pas mon écoute, j'attendais probablement ton retour.
    Pour finir, une phrase qui m'a fait bien marrer:
    "C’est un peu comme prendre un bonne biture entre potes, se refaire le monde, parler pour ne rien dire... ce n’est pas vraiment utile, mais ça fait du bien (et ça remplit le compte en banque)."
    Où prend-on des bitures qui remplissent le compte en banque? J'en suis!! (mais nan, j'avais bien compris)

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    1. Ah te voilà donc là aussi de retour !...
      je commence par la fin - c'est sur que quand je prends une biture entre potes (ceci dit de plus en plus rares car avec l'age...) c'est plutôt nos comptes en banque qui sont mis à l'épreuve, donc on "programme"la chose...
      bon eux ont d'autres avantages que les nôtres, mais je ne vais pas jalouser leurs succès, car chacun en ce monde semble être à sa juste place à y bien réfléchir... mais je m'égare...

      Carla Bley est un sujet énorme à traiter ...
      Aussi cela va venir, mai il me faut du temps, un temps que je n'avais plus le temps de prendre en anciennes lifesensations et que cette fois je compte bien positionner. écouter la carrière de C Cley, tu te rends compte le boulot !... pff, mais je me dois de la faire, sorte de devoir respectueux envers une artiste que j'ai surécoutée et dont je crois avoir piqué, puisé, tenté d'assimiler quelques degrés d'écriture d'arrangements.

      Ponty à travers Zappa et ses débuts carrières solo jazz rock, tellement critiqué.
      Ponty méritera comme Carla Bley, que je lui consacre du temps, car entre tous, il est et reste un fantastique précurseur et parfois pousser un bon gros cocorico en dehors de la médiatisation de coupe sportives en sports médiatisés ça doit être fait.
      Et m...
      chez nous y'en a un paquet de bons, grands, géniaux...
      un blog qui leurs seraient consacrés toutes catégories confondues ne serait pas vain et qui sait s'il était lu par notre Pellerine nationale, elle pourrait croire qu'en territoire hexagonal, à part combattre le téléchargement et trouver des stratégies pour endormir son fléau nommé l'intermittence, défendre et juste réaliser que la culture (musicale et autre, mais restons en à notre fer de lance commun) est juste normal, citoyen et hautement légitime.
      Ponty est parti, lui, preuve à l'appui que notre hexagone avait du mal à le contenir en clubs étriqués et B.Vian-nés...
      La récup' intello du jazz en France aura permis au rock de s'établir envers et contre eux - elle aura ouvert les portes de Magmas incandescents et d'Eltronfous fous fous... et d'anges pas si angéliques que ça.
      un mal pour un bien peut être.
      intellectualiser l'instinct, un vrai mal franco français...

      Ponty en open mind, en Cosmic messenger, en visites récentes chez return to forever, en zappa king kong, en trio purement frenchy 's jazz avec Eddie Louiss et Daniel Humair (HLP trio), Ponty tout court et toutes catégories confondues, le grand homme et compositeur que voilà !

      Shakti a ouvert quelque part (Hassell, Eno/Byrne aussi ceci dit, mais sous d'autres angles, moins "primitifs") la world music et l'accès à "d'autres" cultures.
      Mc Laughlin est là et toujours précurseur visionnaire, un parfait disciple de Miles...
      Tous ces artistes passés chez lui ont retenu la leçon de la recherche, de l'avancée, du dépassement de soi.
      Chez nous Miles c'est Magma et toute une sphère hexagonale de musiciens ayant plongé dans cette lave aventureuse.
      Si je les cite c'est parce que derrière Ponty on met de suite Lockwood et on n'a pas tort et avant lui on pense Grappelli et... on se goure, du moins c'est pas si évident... donc on pense violon... et là, c'est vraiment école française. jazz de surcroît.

      les premiers mahavishnu sont de véritables pierres brutes, les seconds des diamants parfaitement taillés.
      Stravinsky (quelle complexe référence !) y est là,
      et puis de toutes façons écouter j mc laughlin c'est parcourir l'histoire, du moins comme avec Miles, un sacré pan de notre histoire générationnelle de la musique... ce n'est pas rien !...

      allez, bon dimanche d'automne, bonnes échappées en shakti-mode et belles plogées saturées en stravinsky revisité.
      merci d'être passé là et d'avoir lu, écouté, commenté.
      à +

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