SI VOUS AIMEZ LE JAZZ … (03).

SI VOUS AIMEZ LE JAZZ … (03).

Allez, on a rembobiné, on a rangé la K7 et on met la suivante, c’est parti pour deux faces de 45mn.
Walkman avec bonnettes rouge ou orange de sortie pour ceux qui connurent ça…

PLAYLIST 05.

CHET BAKER « House of Jade » - Album « Chet Baker meets Space Jazz Trio – Little Girl Blue » / Philology 1988.

L’un de ses derniers albums studio que ce « Little Girl Blue », si ce n’est le dernier.
Il l’enregistre avec une équipe italienne (les italiens sont d’extraordinaires musiciens de jazz) : Pieranunzi/Piano, Pietropaoli/Basse, Sferra/Batterie.
C’est rare que ce thème de Wayne Shorter soit repris, alors par Chet, c’est forcément intriguant , rien qu’à la lecture du titre, qu’imaginer comment il va aborder ce sujet.
Un sujet qui va jusqu’à s’épancher au centre du thème sur un seul accord, en continu, en suspens, chose délicate à emmener mais qui, si l’on sait insister sur ce fait, amènera la suite avec encore plus d’intensité.
Le tempo est bien plus up que l’original qui est une délicieuse balade.
La qualité de la composition de Shorter va passer ainsi d’une sorte de méditation initiale à une entrée swing impeccablement poussée par nos amis italiens qui aident Chet pour un solo empreint de verve et d’une douceur cuivrée remarquable.
Enrico Pieranunzi part à son tour et va chercher dans les retors harmoniques chers à Shorter de quoi donner le change. Et il insistera en toute logique sur ces mesures en suspens puis, d’une évocation de thème afin de signifier que son solo est terminé, il passe enfin la balle à Chet qui va user du thème, en réinjectant des bribes de son solo (ça c’est du grand art que ce sens de « l’idée ») dans l’exposé.

Belle ouverture de playlist, non ?

02.
BILLIE HOLIDAY « Solitude » - Album « Solitude » / Columbia 1956.

Ah Billie…
Ah Duke…
Ah ces accompagnateurs d’une luxuriance ultime pour enrober cette voix à l’interprétation réellement blues unique (la rareté de l’approche vocale de la fameuse « note bleue », tierce hésitant entre Majeure et mineure, ce qui posera le fameux #9, un accord qui mélange les deux tierces dans un voicing de treizième)… Oscar Peterson, Barney Kessel, Ray Brown, Alvin Stoller ou JC Heard et Charlie Shavers avec Flip Phillips…
Ah ce moment unique où elle prend tout l’auditeur à la gorge, à l’âme, tout en douceur, sans heurt, insistant sur chaque mot afin d’en appuyer le sens, glissant entre les mots afin de toucher encore plus de ses flèches d’émotion …
Qui mieux qu’elle pouvait prendre un tel titre et l’emmener vers un tel paroxysme d’expression ?
Même Oscar Peterson, est ici touché par cette grâce et joue avec une sobriété qui lui est plus que rare.
Ah Billie…
(et notez la qualité du son pour un enregistrement de …1956… ça laisse rêveur).

03.
BILL EVANS-TOOTS THIELEMANS « Sno’Peas » - Album « Affinity » / Craft 1979.

On ne va pas se mentir, même si je reste un adorateur du Bill Evans dépoussiérant l’harmonie du jazz vers un espace que l’on qualifierait aisément d’impressionniste (en référence à Debussy, pour le même « travail » sur les consciences auditives), même si le pianiste Bill Evans communément en trio avec ou sans les bruits live de fourchettes du Vanguard a toute mon affection (et admiration), c’est là, avec Toots à l’harmonica sur corde sensible que Bill me renverse, littéralement.
Marc Johnson œuvre en ce sens, associé à Eliot Zigmund dont la participation ici ne l’aura malheureusement pas fait passer d’obscur à légendaire et contrebalancé par Larry Schneider sax et flutes, s’inscrivant parfaitement dans ce moule d’hypersensibilité.

Le jeu sur ce titre, en retenue pour provoquer le frisson instantané tant que le dodelinement du swing, est d’un swing impassible, laissant les solistes (le solo de Bill, encore un exemple supplémentaire de son grand art) exprimer leurs personnalités complémentaires.
Quand la sauce prend…

04.
ART FARMER/BENNY GOLSON « It ain’t Necessarily so » - Album « Meet the Jazztet » - Argo 1960.
Art Farmer/Trompette, Benny Golson / Tenor Saxophone, Curtis Fuller/ Trombone, McCoy Tyner/ Piano, Addison Farmer/ Bass, Lex humphries/ Drums

On enchaine dans le lourd, un jazztet mode combo mené par Art et Benny.
Le thème de Gershwin passe de bugle en sax, soutenu par des arrangements cuivrés captivants de hargne mais aussi d’inventivité d’écriture. Le trait rythmique afin de tenir tout cela est enfoncé comme un clou de swing implacable qui n’est pas près de lâcher.
Fuller pousse le pion en grognant, Art joue avec la rythmique McCoy Tyner en incitatif point de dialogue, puis c’est son tour, dense, nerveux, précis…
La batterie m’éclate absolument sur ce titre, sans parler du jeu de basse intense.
Et dire que ça se termine en fade-out.
Une envie de swing ? C’est peut-être bien là qu’il va falloir creuser… et on trouvera vite de quoi satisfaire son appétit et se réjouir.

05.
JULIE LONDON « Blues in The Night » - Album « About the Blues » / Capitol-Liberty 1957.

Julie attaque a capella un tantinet au-dessous du ton, qu’importe, avec son charme à faire tomber l’assistance elle se récupère sans que presque rien n’y paraisse en un coup de cuivres et de revers d’harmonie.
A cette époque on n’avait pas de pitch en studio pour aseptiser tout ça et c’est bien là aussi le charme qui rend ces moments enregistrés et préparés à l’avance pour une acoustique parfaite véritablement somptueux.
Russel Garcia, conduit l’affaire de baguette de maestro et en est forcément l’arrangeur.
J’ai personnellement littéralement dévoré son bouquin sur l’arrangement, sorte de bible du genre et s’il faut un vérificateur de son savoir en la matière, ce titre pourra certainement le permettre.
Ici tout est taillé pour la mesure de la chanteuse, écrit afin d’installer sa voix, son charisme et même son physique et ce n’est pas le parallèle évident d’une certaine Jessika (cf Rogger Rabbit) en luxure jazzifiée qui dira le contraire.
Le rideau s’ouvre, le bon vieux Shure vintage est là, sur son pied fixe et plombé et voilà qu’apparait…

06.
WYNTON KELLY « Pfrancing » - Album « The Definitive Collection » / Profound 2022.

Wynton Kelly est l’un des pianistes au jeu hard bop véritablement cimenté dans le blues, qui a traversé et influencé nombre de musiciens (je pense par exemple à Kenny Kirkland et probablement à Diana Krall avec des similitudes de jeu passablement évidentes).
Ici il apparait sous son nom mais ce titre fait partie du répertoire davisien et a été d’ailleurs publié chez Miles.
Miles qui au cours de ce thème qui ne cesse en mode cadrage blues, de se répondre à lui-même.
On préfigure certainement chez Miles ce qui fera « Kind of Blue », cette quête, cette recherche qui va consister à amener le blues et son langage, ailleurs, à le présenter autrement sans pour autant le briser, juste le dévier et le faire évoluer.
Ici au ténor c’est Hank Mobley et le/son jeu vaut la chandelle. J’ai toujours beaucoup plébiscité ce saxophoniste.
Sinon le Miles Davis Quintet de l’heure des clubs est là, Chambers, Cobb et Kelly qui prend la parole en usant avec allégresse du phrasé bop avec toutes ces petites touches d’enluminures qui ajoutent à la seule appogiature une dimension plus véloce.
Miles survole, comme à son habitude, par un jeu quasi légato, chantant en place de réellement swinguant, plaçant de part et d’autre des aigus qui vont être incisifs, fulgurants, hargneux – un solo clair-obscur .
Du grand Miles.
Sans oublier qu’ici c’est Wynton qui lui rafle (presque) la mise en intervenant en plusieurs points au fil du titre.
Mais chacun a droit à sa part d’éclairage soliste et que ce soit Joe ou Jimmy, ce blues les fait littéralement briller…

07.
BEN SIDRAN « It Didn’t all Come True » - Album « Bop City » / Antilles 1983.

On va enchainer avec un titre où le jeu up de batterie pourrait presque être comparé, similaire, apportant ce sentiment de levée permanente qui accentue l’idée de swing vers les seconds et quatrièmes temps de la mesure.
Eddie Gomez, magistral, Peter Erskine, redoutable d’aisance et Ben, gai suiveur de Moses Allison, au solo bordélique que ne renierait pas un Monk, au jeu fait de bribes de récup’, au drive sous le chant difficile à réfuter.
L’album « Bop city » à sa sortie valait plus que le détour et ce gars, issu quelque part d’un mode FM teinté largement Calif’, mais avec un penchant affirmé jazz - sorte de Nougaro américain capable de mettre du texte sur des standards initialement instrumentaux – a vraiment percé chez nous dans la sphère des amateurs du jazz.
Je l’ai vu et écouté en concert, à Vienne.
Grand moment qui m’a réellement positionné une « image » de ce que pourrait ou devrait être une idée du piano bar jazz. Le gars arrive, pépère, jambes croisées, il ajuste le micro et sur une rythmique d’une parfaite cohésion pour asseoir son propos, il va enchainer tel un chapelet de culture les titres, parlant tranquille avec le public, buvant un coup, chantant, improvisant, laissant d’un regard, la place à ses comparses…
Une « attitude » musicale adoptée par la suite.

08.
CHRIS STANDRING Trio and Orchestra « Autumn in New York » - Album « Wonderful World » / Ultimate Vibe Recordings 2021.

Je ne connaissais absolument par ce guitariste avant de chercher, afin d’augmenter mes écoutes d’interprétations de ce standard qui me touche beaucoup et me rappelle mon propre passage automnal à NY.
Des trios avec des invités de marque, sorte de carré VIP du jazz actuel.
Erskine, H.Mason, G.Gascoyne, R.Brecker…
Un album classifié smooth jazz, une manie, certainement dès qu’on entre dans une « ambiance » où le jazz n’a pas besoin spécialement d’envoyer du gras.
Une orchestration en contre chants de cordes où le terme somptueux pourrait être des plus appropriés et un jeu guitaristique des plus enveloppants.
L’album propose un florilège de standards tout genres assimilés et n’hésitera pas à puiser à côté en reprenant par exemple du Donald Fagen (« Maxine »).
On est bien, là… et dans une playlist, ce moment aéré est vraiment rafraichissant.

09.
NICKI PARROTT « April in Paris » - Album « From New York to Paris » / Arbors 2018

Après l’Automne à NY revenons attendre le printemps à Paris…
On a coutume de ce thème par Count (dont on retrouve les poncifs ici) ou Bird, ce survol du swing par le triolet de noires en fait un thème ouvrant sur rythmique la possibilité d’expression et d’horizon.
Nicki Parrott qui joue la basse et chante, a à son actif un certain nombre d’albums et une belle carrière.
Elle est peu connue chez nous mais terminer avec elle permettra qui sait, d’aller la découvrir plus durablement, autrement que placée dans une playlist (et pas qu’ici) …
Une admirable curiosité dans cet album, la présence de Gil Goldstein à l’accordéon… mais je ne vous dis pas dans quel titre, ce sera peut-être bien l’occasion d’écouter la dame.

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Ah, j’entends le clic de fin de la face…
Allez, je vais voir si le nettoyage de la platine a réussi à remettre l’autoreverse en route.
Sinon, il va falloir que je laisse mon apéro et que j’aille tourner la K7.
La flemme… cette playlist m’a installé en mode confort(able).

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PLAYLIST 06.

01.
OLIVER NELSON « One For Phil » -  Album « More Blues and Abstract Truth » / Impulse 1964.

Présenter un album sans y jouer mais être dépositaire du concept, de l’écriture, des arrangements, c’est plutôt rare.
L’obsession face au langage du blues et l’envie de le faire évoluer est décidément l’invitée de nombre d’albums et dans l’esprit de nombre d’artistes en ces sixties.
Parmi les nombreux interprètes de cette quête d’absolu (B.Webster, P.Adams, T.Jones…), ici c’est Phil Wood, à l’alto, sorte de transfuge autoproclamé de Bird, qui colle au propos et qui le magnifie.
Encore un album à découvrir…
Décidément ces playlist ont de nombreuses ramifications…

02.
SCOTT HAMILTON « ‘Round Midnight » - Album « Scott Hamilton plays Ballads » / Concord Jazz 1996.
John Bunch-piano, Chris Flory-guitar, Phil Flanigan-bass, Chuck Riggs-drums.

Je viens d’ouvrir le placard où ont été rangés les éternels quasi illustres inconnus, à l’exception du leader, que j’ai un tantinet écouté, sans jamais m’intéresser outre mesure.
De mesure il est question ici.
Le standard incontournable de Monk est traité avec retenue, volupté, aisance et une forme de sensualité due au jeu volontairement plein d’air et assis dans le grave du ténor d’Hamilton.
Le solo de Bunch serait presque d’entrée tellement classiquement dispensable qu’on penserait à le zapper, pourtant il est en parfaite osmose avec l’esprit dégagé ici et le retour de Scott Hamilton venant chercher cette fois ses aigus peu lumineux puisqu’on est mode nocturne le prouve.
La « fameuse » coda où le leader va jusqu’au bout du souffle et du son de son ténor parachève ce moment finalement délicieux qui m’a donné l’envie d’aller écouter plus attentivement cet album dédié aux balades, chacune étant tout aussi remarquablement amenée sur le plateau du désir.

03.
SONNY CLARK « I Cover the Waterfront » - Album « Late Night » / UMG 1979.

Le pianiste Hard Bop par excellence a-t-on pour habitude de présenter Sonny Clark.
Il suffira également de parcourir son CV et c’est sûr il figure dans la setlist haute des recrues (Mingus, Dinah Washington, Coltrane, D.Gordon, A.Blakey… la liste est bien trop longue pour figurer ici à l’occasion d’un seul titre).
Sonny Clark c’est quelque par l’ADN des sessions Blue Note, c’est le style « maison »…
Il a été oublié puis remis à l’honneur, Bill Evans ne cachant pas l’influence de celui-ci dans son jeu.
Il est décédé à l’âge de 31 ans d’une crise cardiaque.
Le redécouvrir afin de perpétuer son approche tant esthétique que pianistique, voilà qui m’apparait plus qu’utile et essentiel.
En solo comme au gré de ses multiples participations, partenariats, collaborations

04.
DUKE JORDAN « Yesterdays » - Album « Duke Jordan » / Signal 1957.

« Yesterdays » figure parmi ces thèmes /standards qui ont ma préférence, ce depuis que je l’ai découvert, il y a fort longtemps chez Getz (« Voyage ») ou encore chez Soloff (« Yesterdays »).

Serait-ce ici le doux velours moelleux du saxophone baryton de Cecil Payne, banquette de molesquine (en référence curieusement placée ici à Souchon), sur laquelle l’on aime à se vautrer ?
Serait-ce ici l’enfin capacité de délicatesse d’Art Blakey (chose inhabituelle) et la prise de basse de Percy Hearth ?
Ou tout simplement le solo de Duke Jordan  avec ce style tout aussi oldies que ce vieux et approximatif piano, dont l’accord malgré un effort certain ne tiendra pas au-delà des sessions, sorte d’évidence.
Est-ce justement cette évidence d’urgence à enregistrer avec un budget qui apparait comme des plus serrés ?
C’est probablement tout cela plus le talent des musiciens qui rend cette version sensible et attachante, intimiste et doucereuse.

05.
LOU DONALDSON « Caracas » - Album « Good Gracious » / Blue Note 1963.
Grant Green-guitar, John Patton-organ, Ben Dixon-drums, lou Donaldson-alto saxophone.

C’est qualifié de « soul/jazz ».
On s’embarque binaire latino et pourtant curieusement l’ordre va mener la troupe vers un swing mitigé, obligeant Green à réviser la copie groove dans laquelle il désirait probablement et furtivement nous emmener.
La fonction rythmique va alors se schématiser, se radicaliser pour créer une sorte de boucle dans laquelle l’orgue s’enferme.
Green comme de coutume offre un subtil solo guitaristique.
Donalson surfe sur cette vague et est déjà parti (cf pochette) draguer la magnifique créature de ses rêves qui, enthousiasmée par cette rythmique obsessionnelle, a chopé, au passage, en dansant, son dernier album certainement posé à l’entrée du club pour la vente. Il fera bonne figure lors des futures soirées mondaines qu’elle ne manquera pas d’organiser.
Patton reste collé à sa basse et va ouvrir le champ du plein jeu de son orgue afin d’un rappel en block-chords quelque peu gospélisant.
Dispensable tant que vraiment agréable.
A vous de choisir.

06.
EDDIE DANIELS « East of the Sun (West of the Moon) » - Album « Collection » - GRP 1987.

Ce titre est initialement sorti sur GRP dans l’album « To Bird With Love », un album devenu difficile à se procurer.
Eddie Daniels, c’est la clarinette jazz à son plus haut degré d’expression, une sorte de renouveau de l’instrument qui aurait pu, ou dû lui redorer un blason empoussiéré par l’attrait du saxophone.
D’ailleurs combien d’élèves, au conservatoire commencent par la clarinette pour ensuite bifurquer directement vers le saxophone.
Entouré de la fine équipe GRP (Patitucci, Hersch, Kellaway…) avec en sus le drumming admirable d’Al Foster, cet album, si vous arrivez à le trouver (« to bird … ») est une véritable madeleine jazz.
Eddie Daniels y exprime véritablement Bird, sur une texture fin eighties jazz – le DX7 et la modulation FM sont présents en claviers – soutenu et magnifié par une rythmique de rêve.
Ce  « East of the Sun » l’un des rares exemples extraits de l’album atteste de la qualité non seulement de jeu du clarinettiste qui adoucit jusqu’aux aigus les plus habituellement criards, qui feule quand nécessaire, qui chante plus que coutume dans son instrument et lui donne une caractéristique expressive devenue par la suite tellement raréfiée.

A chaque fois que je sors cet album (que je n’ai qu’en K7), je sais que je vais passer un moment des plus apaisants et chargé de jazz.

07.
DUKE ELLINGTON and JOHNNY HODGES ORCHESTRA « Let’s Fall in Love » - Album « Side by Side » / Verve 1959.

Le patron et son bras droit, non dos à dos, mais côte à côte, le genre de facéties ellingtoniennes dont ces deux là étaient friands.
L’orchestra est plutôt un combo et s’empare de ce standard désinvolte et mélodieux.
Chacun y va de son petit solo de genre, chevauchant au trot ce swing imperturbable.
Le moment Hodges est délice, comme toujours, tellement in et tellement out.
La rythmique Wendell Marshall/Jo Jones, pilier des écritures d’Ellington, tient tout ce beau monde par la bride en insistant à peine sur un mi-shuffle tendancieux dont tous s’amusent.
Duke, quand à lui s’est mis avec son favori : Strayhorn.
Tout cela respire le swing (mais je l’ai déjà dit et Ellington est le sommet du swing c’est donc une évidence) et la bonne humeur, si ce n’est la bonhomie.
Tout cela est bien bon pour un avant dernier titre…

08.
CHET BAKER « The Song is You » - Album « Peace » / Enja 1982.

On a commencé la K7 par Chet et on la terminera donc également avec lui.
Un standard parmi la pléthore de ceux que l’on joue et que Chet joue avec la connaissance des paroles ce qui additionne l’intensité de son jeu.
Et cette fois une formule originale, inusitée, inhabituelle et qui de fait ouvre la liberté de jeu mais aussi d’espace, de par sa texture même.
David Friedman, responsable de cette sensation est aux vibraphones et marimbas, Buster Williams à la contrebasse et Joe Chambers à la batterie.
Ce surprenant concept de trio apporte une dimension à ce titre mais également au jeu de Chet qui s’infléchira plus legato, compensant le manque de sustain harmonique que suggère le marimba.
Buster Williams offre un solo qui devrait être mémorable, Friedman est léger comme un papillon et Joe Chambers, en fin de parcours rappelle dans une série de 4-4 (alternance de quatre mesures entre soliste et batterie qui se fait généralement avant le reprise du thème, comme ici) qu’il reste l'un des fondateurs du jeu moderne de la batterie.
La coda tout en poésie de ce thème terminera dans le même esprit ces deux faces de playlist.

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Une playlist où se côtoyaient et s’enchaînaient sans heurts et avec un réel respect, mentors, figures connues et des inconnus, ou du moins de artistes que l’on n’écoute que trop peu.
J’espère que la succession de ceux-ci vous permettra d’aller les écouter plus précisément si l’envie et le temps vous en disent.
J’arrive donc à six faces pour trois K7.
J’en ai encore deux dans les tiroirs…
Je vous sors ça sous peu.

Belle journée, soirée, nuit même (selon le moment où vous ouvrirez cette chronique) à vous et merci d’être encore ici pour lire, partager et aimer la musique avec moi.


Commentaires

  1. Cc Chris,
    La K7 a été l'un de mes principaux supports d'écoutes dès qu'elle est sortie.
    Elle permettait de nombreux avantages.
    t'empruntais des disques en médiathèque, à des potes, etc. tu mettais ça sur K7...
    le côté pratique du petit magnéto K7, puis du radio K7 souvent stéréo, puis bien sûr la révolution du Walkman et ensuite l'autoradio K7... bref c'était vraiment LE support itinérant idéal et côté budget...
    bon, personnellement j'ai très peu usé de la possibilité de réeffacer à outrance, préférant considérer ça comme finalement une K7 othèque...
    Puis est arrivé le multipistes à K7 et nombres de mes maquettes, démos et même supports pros ont été réalisés avec ce puissant outil, ce qui m'a permis rapidement dès que la MAO est arrivée avec les PC d'être familier avec ce fonctionnement de home studio. Avec un Fostex 4-8 pistes K7 tu pouvais déjà avoir un véritable home studio.
    Et puis j'ai bcp enregistré les émissions jazz direct depuis les festivals l'été ce qui m'a permis d'avoir des enregistrements de concerts, parfois j'étais même public de ceux ci (Vienne souvent).
    Et la K7 c'était aussi pour mes cours un outil idéal pour faire écouter aux élèves.
    J'ai gardé pas mal de celles ci et j'ai ai aussi bazardé un paquet, car d'abord j'avais énormément de doublons entre vinyle, K7, CD... et puis il faut à un moment donné faire un peu de place...
    Je le regrette parfois, mais j'ai tj ma platine (une Technics autoreverse) et il m'arrive régulièrement d'écouter qqs bons vieux enregistrements...

    Je n'imaginais même pas qu'on en vendait encore...
    ça semble tellement incroyable que cela...

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  2. Je préfère ne pas regarder le retard sur tes publications et donc à mon rythme.
    Chet Baker : Enthousiaste sur ce titre parmi ces derniers, et c’est bien de donner encore l’occasion de l’écouter… Jouer. J’ai été chercher JUJU que j’ai un peu (Beaucoup ?) oublié. Et retour chez Chet tellement plus…cool ? Et ton commentaire qui accompagne de mots notre écoute ? Sans bien savoir qui a dit « Ecrire sur la muisque c’est comme danser sur l’architecture » je trouve ici la preuve du contraire. Même si je necompr
    Billie Holiday : Moins attardé car je connais ce titre, 1952 l’enregistrement d’après Kaserio qui m’avait proposé l’album en 2013. M’en souviendrais je de ta définition poético-technique « « note bleue », tierce hésitant entre Majeure et mineure, ce qui posera le fameux #9, un accord qui mélange les deux tierces dans un voicing de treizième) »
    Bill Evans : J’avoue me laisser subjuguer par l’harmonica de THIELEMANS, un son joué comme ça me rend triste mais tout en appréciant, sûrement l’effet premier de « macadam Cowboy » de Barry
    Art Farmer : Heureusement que tu insistes sur basse et batterie, à la première écoute je pensais que c’était plutôt « convenu »… C’est l’aspect soutenu ?
    Julie London : Je me force à réécouter le titre avec ton commentaire sur le ton, mais avant j’ai craqué pour savoir : « Basin Street Blues » elle ne loupe pas la reprise tout en dessous de main (j’ai pas le vocabulaire technique de ce moment magique où on entend « Basin street is the streeettt…. » Après rrécoute, toujours non, je ne suis qu’envouté. Pas la bonne oreille
    Wynton Kelly : Ensuite je me suis égaré sur les versions de « Someday My Prince Will Come » dont celle de M. Kelly, en tout cas un bon moment y compris avec le « Pfrancing »
    Ben Sidran : Je suis passé un peu à côté car dès que j’ai entendu Chris Standring j’ai été conquis par l’onctuosité, peut-être qu’à déjà connaître la mélodie je peux m’attarder sur le jeu enrobant, généralement c’est le Saxo qui me fait cet effet-là, comme Don Byas dans « Laura »
    Nicki Parrott : finalement j’ai répondu à ta demande, j’ai été cherché l’album … et donc une envie chassant l’autre, me voici avec « I Love Paris » …. Sans regret je me laisse porter par des interprétations sans heurts. Belle découverte.
    A bientôt pour l’autre face

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    1. Merci d'être passé ici.
      J'aime bien ces "voyages" musicaux qui fonctionnent au gré des humeurs.
      Cette face propose plein de déviances rapport à des artistes disons, connus.
      On est rarement déçus avec ce genre de sorties de route pour ce qui est du jazz, c'est souvent juste une question de label, de promo etc.
      Souvent les gars enregistraient en sortie de club, en pause hebdo, ...
      Avec le groupe, les moyens du bord et la qualité sonore pouvait ou non être au rendez vous...
      Mais la qualité musicale est toujours là.
      En revanche j'aurais du mal à en dire autant pour le rock, même si là encore on va trouver des pépites oubliées, bien souvent c'était mieux de les oublier, ou de ne les connaitre...
      Hier j'ai encore fait "l'effort" avec un album rock passé sous ombre... Je suis allé au bout, histoire de me dire ne pas passer à côté de ... mais au sortir, peu d'engouement, peu d'intérêt et finalement trop peu de musique.
      Allez t'as plus qu'à attaquer la face B
      Merci

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    2. ""l'effort" avec un album rock passé sous ombre" Des noms, des noms... pour comparer, peut-être pour défendre ou contre-proposer?

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    3. Un album de Black Sabbath, avec Ian Gillan - c'est d'ailleurs parce que je voulais écouter Gillan dans ce contexte que j'ai tenté l'aventure.
      Son brouillon, Gillan qui est à côté de la musique proposée (son chant aux teintes toujours bluesy ne colle pas)... bref j'ai fait le tour complet afin d'en extraire un minima de substance, alors que généralement Balck Sabbath je valide volontiers, mais là, rien n'y a fait.

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