SI VOUS AIMEZ LE JAZZ … (05) ... (end)
SI VOUS AIMEZ
LE JAZZ … (05)
Dernières playlists pour accompagner votre été de jazz.
Puis on changera … de style.
PLAYLIST 09
01.
BEN WEBSTER « For Heavens Sake » - Album « Plays Ballads »
/ Storyville 1968.
Mais quel charmeur !
On commence donc en sensualité, d’un trait de piano et c’est parti.
Si vous cherchez qui sont les accompagnateurs, sachez que… je n’en connais
strictement aucun, cet album ayant été enregistré au Danemark, par la radio
danoise.
Hugo Rassmussen est à la contrebasse (j’ai déjà croisé son nom, me
semble-t-il), Bjarne Rostvold à la batterie, Ole Molin à la guitare, Ole Koch
Ansen au piano et il m’apparait utile de les citer afin de les sortir de
l’ombre du streaming où ils n’apparaissent nullement.
Curieux comme cette prise de son somme toute très rudimentaire met tout de même
chaque pièce du groupe d’accompagnateurs en juste place sur l’échiquier spatial
du son.
La guitare est peut-être la plus surprenante à cibler, mais une fois cela fait,
elle prend toute sa dimension de soutien vertébral alors que le piano tricote
autour de la mollesse assumée de Ben et que basse/batterie installent le tapis
rythmique, sans heurts, sans efforts, sans éclat.
De cela émane une douceur suintante, une torpeur assumée, une
« atmosphère » où les volutes de fumée s’envolent tranquillement
insistant sur des dessins imaginaires disparaissant comme par magie.
On est bien, au calme… on enchaine.
02.
ERIC GALE « Killing me Softly with this Song » - Album « The
Essential Eric Gale » / CTI-Legacy 1973.
Ou comment s’amouracher de… et transmuter un bon gros tube pleurnichard de la
pop semi soul …
Pleurnichard mais cependant tellement bien composé (tant mélodiquement
qu’harmoniquement avec cette petite fin hispanisante, idéale pour le jeu
guitaristique et pour les usages du jazz).
De sacrés moyens sont mis en œuvre ici, un orchestre symphonique somptueux où
vient s’insérer une écriture éclatante et contrastante de cuivres de Big Band,
une rythmique fastueuse (piano Bob James et les amis de Stuff) et un casting
CTI dont les noms sont rutilants.
La guitare d’Eric Gale sous cet écrin exprime une forme de paix, de coolitude
absolue et se « pose » sur le son de cette intelligente
orchestration.
Et cette chanson vient au fredonnement, comme ça, sans insistance et en délicatesse.
03.
ROB SILVERMAN QUINTET « Take five » - Album « Take five, a
tribute to Dave Brubeck » / AH Jazz 2013.
Quand un batteur d’empare du célébrissime titre à cinq temps (123/12) de Dave
Brubeck au solo légendaire propulsé initialement par Joe Morello, on est
« attentif ».
Bon, il a su s’entourer (Marienthal, Brecker, Patitucci) déjà avec eux c’est un
gage de niveau.
« Take Five » n’est pas spécialement un standards beaucoup joué…
On m’incite ou me demande parfois à/de le jouer dans les groupes auxquels je
participe (surtout de la part des batteurs et en second lieu des
saxophonistes). J’avoue ne pas trop aimer me prêter à ce jeu, la musique de
Dave Brubeck suppose une connaissance, une implication et même là, pourquoi
pas, un véritable projet, comme ici avec cet album en mode
« tribute ».
Quand on écoute cette version il va être compliqué de s’extraire de l’esprit la
version initiale, originale et tellement subtile de l’album de Brubeck, tant
celle-ci est inscrite dans la mémoire de l’amateur de jazz.
Alors, certes le jeu est ici quelque peu schématique, voire lourdingue, ce qui,
au regard des protagonistes n’est finalement pas une grande surprise, habitués
qu’ils sont à entrer dans le jus de façon directe, franche et sans détour.
Intéressant de voir comment un batteur « actuel » va s’y prendre pour
recomposer le solo de Morello, sorte de graal du langage drummistique jazz et
l’option choisie, même si là encore elle apparaitra pour certains inappropriée,
tient le pavé.
Patitucci est égal à lui-même, c’est-à-dire que son pattern hypnotique amplifie
l’assise et il est le point central de cette version, l’endroit vers lequel
tous s’accrochent, s’appuient.
Il offrira d’ailleurs un solo pur Patitucci, aux aigus percutants et chantants.
Le jeu pianistique de Michael Silverman est des plus intéressants et tranche
avec l’usage Brubeck, sans pour autant sans éloigner fondamentalement (sinon,
on perd l’essence de « Take Five »).
Marienthal assure le coup même s’il n’est pas ici des plus inspirés,
reconnaissons-le.
Ce qui tranche véritablement c’est le solo de Randy Brecker, d’une part parce
que la trompette (un bugle semble-t-il ici) sort de nos habitudes dans ce
contexte et que comme toujours il va chercher ailleurs que vers l’évidence.
Le solo de batterie est intéressant à plusieurs degrés, actuel tant que
souhaitant réinjecter le patrimoine il est, qui plus est, court, permettant un
moment presque éclair qui s’inscrit parfaitement dans le jeu des protagonistes.
Bon, je passe sur l’exposé du thème, franchement trop articulé à mon gout, mais
la subjectivité reste de mise face à ces pointures.
Et dans une playlist, une autre vue de « Take Five », ça donne le
change.
04.
RANDY BRECKER « My Funny Valentine » - Album « The Stars of Jazz
#2 » / Arkadia 2022
Randy Brecker / Trompette, Ted Rosenthal / piano, Dean Johnson / Bass, Ron
Vincent / drums.
On reste avec Randy Brecker pour ce moment subtil, intime qui sied tant à ce
titre sublime. On pensera bien entendu à Chet, mais là n’est pas le propos
comparatif, Randy Brecker est une entité musicale et instrumentiste en soi et
quand un musicien de cette trempe prend en compte un tel standard, on sait que
le « moment » sera si ce n’est grandiose, en tout cas majestueux.
Ici, Randy est au centre de « l’action », puis il va céder le terrain
à Ted Rosenthal pour un solo dénué de toute virtuosité pianistique mais d’une
grande élégance, quasi debussyste ou evansien si l’on préfère, s’en référant au
jazz.
Alors on en oublierait presque le thème, juste évoqué, jamais réellement imposé,
sournoisement paraphrasé, subtilement détourné, possédé...
Un beau moment.
05.
WOODY HERMAN & his Orchestra « Laura » - Album « The
essential Woody Herman » / Columbia 1945 (original recording).
Un petit tour vers le passé, où l’emprise de la clarinette dans le jazz était
primordiale.
Qui plus est, dans cette version originale, on admirera le chant quasi lyrique
de crooner de Woody Herman lui-même. Il chante comme il joue la clarinette,
finalement.
L’âpreté du Big Band, la douceur de l’accompagnement rythmique, le contraste
sonore, la délicieuse interprétation, le final somptueux vibraphone/trombone...
C’est en noir et blanc…
Et c’est éminemment bon que d’ouvrir cette page du passé.
06.
LIONEL HAMPTON « Muskat Ramble » - Album « The Complete Victor
Sessions » / RCA-BMG 1937
On va rester dans le passé et avec le vibraphone.
Qui dit vibraphone dit quelque part, sur les cinq doigts de la main :
Lionel Hampton (Milt Jackson, Mike Manieri, Gary Burton, Bobby Hutcherson).
Sorte de zazou débridé, également batteur, mon père en était fan et j’avais
peine à adhérer à ce délire bien trop souvent exprimé, sorte de réminiscence en
version concert des spectacles initiés par le Cotton Club, sorte de
démonstratif libéré, semblait-on croire…
Mais il faut toujours… un jour.
Et un jour j’ai eu à diriger en Big Band un des titres de cet artiste et
forcément, vu de « l’intérieur », cela a changé, pas tout, mais
presque.
Et ravi mon père de voir que l’on inscrivait du Hampton au répertoire.
Voilà pour la petite histoire.
La seconde est que ce titre je l’ai énormément joué en jazz New orléans,
Dixieland, etc. lorsque j’était batteur de ce style si fun et si particulier à
la fois.
Et il me reste une affection toute particulière tant pour ce répertoire, que
pour ces « anciens » (génération donc je suis aujourd’hui, eh oui la
roue a tourné) qui, à l’époque m’ont accueilli à bras ouverts et tout appris,
mais vraiment tout appris pour jouer, aimer, comprendre, diriger, apprécier… le jazz.
L’école était encore la scène, et la transmission se faisait, avec et grâce à
eux. Et je sais ce que je leur dois et le rappeler - comme ici l’écrire - c’est
aussi leur rendre hommage et les remercier.
Ici comme toujours dans le jeu fast de cette époque la polka n’est finalement
pas si loin…
C’est enlevé, dansant, festif, jovial et insouciant et bien entendu ça sonne
entre deux guerres tel que l’idée en a été faite.
Chacun prend son petit solo, Lionel, au final dialogue avec l’orchestre
pertinemment écrit pour ce moment bien préparé.
On se régale et ça met du baume au cœur.
07.
STAN GETZ « Medley : Tenderly/Autumn in New York/East of the
Sun » - Album « Hamp and Getz » / Norgran 1955.
Stan Getz and Lionel Hampton with : Lou Levy, Piano / Leroy Vinnegar, Bass
/ Shelly Manne, drums.
La rencontre des géants au sommet d’une montagne appelée jazz. Chacun est monté
de son côté mais arrivés en haut, leur rencontre respectueuse devient
immédiatement amicale.
J’aime le format du medley, analogie de style, de forme, voire de tonalité,
enchainement de « tubes » d’un artiste … qui permet d’éviter de
retomber dans le systématisme de intro-thème-solos-thème-coda…
C’est assez peu courant que ce procédé au milieu des années 50 mais ce
florilège de ballades toutes aussi fines les unes que les autres et qui plus
est, interprétées par ces artistes éminents du jazz, ravira… de
« Tenderly » (que pour ma part j’associe souvent à
« Misty »), en passant par « Autumn in New York »,
véritable pierre précieuse du répertoire pour conclure par « East of the
Sun », lumineux…
Allez on boucle la couleur vibraphone…
08.
HOLLYWOOD BOWL ORCHESTRA « Fleurette Africaine » - Album
« Prelude to a kiss – The Duke Ellington Album, feat Dee Dee
Bridgewater » / Universal 1996.
Je me souviens parfaitement de mon engouement pour cet album dès sa sortie.
J’étais en pleines retrouvailles avec la musique de Duke que j’inscrivais au
répertoire du Big Band de plus en plus abondement jusqu’à imaginer un projet
autour de sa musique.
« Fleurette Africaine », on le trouve dans le trio mythique
Duke/Mingus/Roach- l’un des albums essentiels de la discothèque de l’amateur de
jazz.
Le voici traité de façon absolument admirable entre orchestre symphonique et
rythmique jungle acoustique – une version qui aurait certainement fait se pâmer
Duke de bonheur tant l’unification de ces deux axiomes est réussie.
La musique de Duke est empreinte d’universalité et peut véritablement s’offrir
à l’imagination, à la re-création, à l’orchestration la plus pluraliste
imaginable.
Elle n’a pas vraiment de limites.
La musique de Duke est une ouverture d’esprit et d’âme en elle-même et ses
célèbres suites témoignent, par exemple, de sa volonté d’inscrire le
« sérieux » tant que le patrimoine originel du jazz dans une écriture
aux modèles de forme empruntés à l’histoire et au classique.
Ce thème, là encore assez peu joué ou exploité (mais il y a tellement de
musique-s chez Duke, à jouer) est une aquarelle, un paysage, une couleur, une…
petite fleur.
09.
DAVE BRUBECK « Three to Get Ready » - Album «Time Out » /
Columbia 1959.
On finit cette playlist avec Dave Brubeck et ce thème de Haydn, célébré par
Claude Nougaro « Le Jazz et la Java », et par là devenu un autre
standard que de jazz, mais le chanson disons à texte, française.
Retour à l’original détourné par Brubeck donc, puisqu’au départ il s’agit de
musique classique et détourné afin de jouer avec le temps, la mesure, la
décomposition rythmique…
Aux manette Joe Morello, dont on a parlé plus haut et dont on admirera le jeu
tout en dentelle et en expression, sans parler de l’inventivité.
Ce gars surfe dans les mesures changeantes comme un parisien avec les
changements de lignes de métro.
Desmond est éternellement beau à écouter, son légato est émouvant.
Brubeck distille la connaissance, le jeu, le pastiche, l’humour et le jazz avec
le talent qu’on lui connait et il ne faudra jamais oublier Eugene Wright,
contrebassiste du sens qui permet à un tel projet consistant à prendre en
compte l’asymétrie rythmique chère à Stravinsky, Bartok et autres… pour la rendre (à l’écoute du moins, car la jouer c’est une autre affaire, surtout
ainsi avec tant de décontraction) limpide, évidente, amusante et jamais
réellement sérieuse…
Quand le jazz est là, me dois-je de dire.
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PLAYLIST 10 (the end).
01.
GROVER WASHINGTON JR. « Little Black Samba » - Album « Come
Morning » / Elektra 1981.
Allez on commencera plus festif, déhanchement oblige sur cette presque samba.
Grover préparait son énorme tube et commençait sérieusement à flirter avec la
pop s’entourant des redoutables Marcus Miller et Steve Gadd pour ce faire.
Les chœurs syncopés, sautillants, le contexte soliste sax tellement revenu
« à la mode » aujourd’hui sur groove, DJ, etc.
Le batteur Grady Tate sort de son cadre et chante ce succulent moment.
Des claviers imitatifs caraïbéens pour brouiller les pistes authentiques et
surtout donner l’aspect estival souhaité.
Le public avait retenu la version également magistrale du « Jammin’ »
de Bob dans cet album – dommage, ça aurait pratiquement fait la pige à la
Lambada…
02.
EMILY REMLER « Coral » - Album « Transitions » / Concord
1984.
Emily Remler, guitare / Eddie Gomez, basse / Bob Moses, drums / John d’Earth,
trumpet.
Il est des albums qui ont une valeur personnelle.
Ce « Transitions » en fait, pour ma part, partie.
La poésie féminine qui s’en dégage est particulière, puis Emily est partie,
loin de nous.
Elle avait tellement de cartes en mains, adulée par Pat Metheny lui-même,
propulsée de tournées en festivals avec les plus grands de son temps, Emily
Remler avait tout pour une carrière immensément prometteuse.
Et pourtant…
Mais voilà, le destin en a décidé… autrement.
Il suffira simplement de prêter l’oreille à ce standard, rare, composé par Keith
Jarrett qu’elle aborde avec un toucher d’une finesse inouïe et qu’elle propose
ici.
C’est un peu, encore une fois comme si le temps « prenait son temps »
et sa distance, comme si un arrêt sur musique pouvait se faire afin de fixer ce
moment unique et beau.
Emily Remler n’est plus et depuis trop longtemps.
Elle nous a laissé peu de traces enregistrées, mais ce peu n’est, finalement,
pas rien.
Il suffirait de temps à autre de s’en rappeler et de l’écouter pour qu’elle
sache qu’elle a contribué, en si peu de ce temps, à l’autre idée de la guitare
jazz.
03.
CHUCK MANGIONE « Song for a Latin Lady » - Album « Journey to a
Rainbow » / Columbia 1983.
Il a ses suiveurs mais aussi ses détracteurs.
Il n’est plus ou pas vraiment représentatif d’une idée restreinte et même se
voulant élargie, du jazz.
Chuck Mangione est un éminent représentant du bugle, ce « clairon » à
pistons, au son velouté et onctueux.
Chuck Mangione surfe généralement sur son « époque », sur les
décennies, capable de s’entourer des plus grands, ou comme ici de produire un
album où il joue même les claviers (alors qu’il a, tout de même, Chick Corea
dans son carnet d’adresses), soutenu par une section rythmique anecdotique (ce
qui n’implique pas qu’elle soit passable, bien au contraire).
Mais Chuck Mangione est un compositeur souvent ambitieux capable de proposer
des concepts/suites d’une écriture empreinte au classique où les modes Majeurs
et mineurs harmoniques ont la part belle et où l’épique s’invite en jazz
attitude et mode(s) souvent, c’est le cas ici, latinisants (souvenez-vous du
« Romantic Warrior » de Return to Forever).
Il a donc une certaine fascination pour les aspects hispanisants et latinisants
du jazz et en use, comme ici, abondamment, pour un résultat des plus attractifs,
en somme.
Et puis, Chuck Mangione est un sacré soliste, généralement mélodique, aisé à
suivre, ne cherchant ni l’esbrouffe, ni les passages en force.
Il préfère broder la mélodie que déchirer les tympans avec des concours d’aigus
– c’est parfois bien plaisant, que cela.
Il reste donc simple, agréable à écouter, abordable pour tous et, au sortir il
a toute sa place dans une playlist jazz, car, après tout, qu’est-ce d’autre ici
? ...
A noter l’excellent solo de soprano de Chris Valada, pas criard, ce qui change
de l’usage souvent intempestif de cet instrument.
04.
STANLEY CLARKE, BIRELI LAGRENE, JEAN LUC PONTY « Too Young to go
Steady » - Album « D-Stringz » / Impulse ! 2015.
La surbrillance d’un standard encore assez peu courant (mais écoutez ce qu’en
fait un Keith Jarrett, par exemple) par une réunion de podium de gagnants.
Trois noms, trois grands du jazz, trois sommités tous jazz confondus, car même
si Bireli a souvent cette étiquette manouche (ça reste presque le cas ici), sa
palette ne s’y cantonne pas.
Ecouter Ponty dans ce contexte hors de son barda électrique et synthétique
s’image comme une bénéfique récréation et l’on se souvient qu’il reste(et
restera) un des violonistes de jazz issus de cette culture profondément
française les plus importants de l’histoire de cette musique.
Quand à Stanley Clarke, lui aussi a repris la grand-mère et il la fait chanter
avec ferveur.
C’est la récré, on redevient gosses et on a sorti les jouets du passé.
C’est les (petits) enfants qui vont être ravis.
05.
ELIANE ELIAS « Paulistana » - Album « Paulistana » / Blue
Note 1993.
Pour ces débuts solistes Eliane ne chante pas encore (mais elle chante tout ce
quelle joue à n’en point douter), mais déjà, son jeu pianistique si sincère
envers le Brésil s’impose tel un sceau, une marque sa fabrique.
Personnellement j’ai puisé dans cet album l’essentiel des fonctionnalités
rythmiques pianistiques brésiliennes, qui va au-delà par exemple de celle de
Tania Maria, déjà très référentes et influentes.
Ici c’est en douceur mais avec présence que cela se fait.
On n’avait pas trop prêté attention à Eliane quand elle était chez Steps Ahead,
sa part soliste étant congrue, mais là, on se rend compte qu’on est face à un
high level tant pianistique que musical (ce « Paulistana » est de sa
composition).
Portinho à la batterie et Marc Johnson à la contrebasse poussent ce titre vers
le feu d’artifice de cuivres synthétiques qu’elle balance en final.
Ce titre… j’ai un souvenir particulier avec lui, le souvenir d’une journée de
recording d’émission documentaire sur l’accordéon où l’instrument en multiples
styles et genres était représenté par d’emblématiques accordéonistes.
Et nous avions eu la lourde mais captivante charge de jouer ce titre pour
l’instrument M.I.D.I détourné pour le jazz-fusion.
Le souvenir et la musique reliés, mais ici on a l’habitude.
06.
JANE MONHEIT « I’m Thru With Love » - Album « Come Dream With Me »
/ N-Coded Music 2001.
Un aveu, j’ai réellement découvert ce standard cette année.
Face à un tel standard devant lequel il y a tant de possibles, je me suis d’abord
penché sur ce qu’en fait Keith Jarrett – il faut toujours mettre la visée en
haut.
Puis je l’ai décortiqué dans tous les sens, afin qu’en trio (où je faisais
également les basses en main gauche) – chanteuse, batteur et moi-même – ce côté
oldies, empreint de nostalgie et d’une certaine désinvolture soit efficient.
Alors, transposé pour le chant, je me suis lancé dans une introduction entre
sentimentalisme de goût kitch et interjections jazz et, chose étrange, l’un des
programmateurs d’une émission jazz est venu directement m’interviewer (Radio Mozaïk)
à la sortie de prestation lors d’un festival (Musiques du Muy et d’ailleurs) et…
il a illustré cette interview de cette intro qu’il a même fait écouter deux
fois aux auditeurs… il a enregistré l’intégrale du concert.
Ce décorticage m’a donné également l’idée de le faire travailler, ce titre,
mais dans sa tonalité originale plus aisée en tessiture pour le piano, à un de
mes élèves passant l’entrée en classe de jazz pour un conservatoire prestigieux
dont je tais le nom ici.
Cela lui a particulièrement réussi puisqu’il a été reçu, sans la moindre
hésitation du jury.
Donc, parfois, on fait une rencontre avec la musique et un temps de vie
(quelques mois), cette rencontre prodigue de formidables bénéfices musicaux,
personnels et humains.
Je chéris désormais ce standard et ne manque pas de l’exprimer dès que le mot
jazz apparait et forcément dans la playlist ultime, il me fallait l’inscrire.
Et l’inscrire avec la grande classe de cette chanteuse absolument parfaite
accompagnée, excusez moi du peu, par Mr Kenny Barron lui-même.
Autrement dit, la crème…
07.
LIZZ WRIGHT « Walk With me, Lord » - Album « Salt » / Verve
2003.
Kenny Banks est à l’orgue, Brian Blade à la batterie et produit l’album, Doug
Weiss à la contrebasse et John Hart à la guitare.
Lizz Wright c’est la foi, la croyance, la ferveur faite chant.
Une adoration subliminale qui passe par la musique, le gospel, le negro spiritual,
la soul et… le jazz.
Lizz Wright habite de cette foi incommensurable tout ce qu’elle chante,
exprime, vocalise.
Lizz Wright ne chante pas…
Elle prie.
Alors tout ce qui sort de son vocal est sublimé par cette intention, cette
volonté, cette présence, cette âme.
Alors, écouter Lizz Wright c’est passer de la vie terrestre à cette transe inhérente
à l’état de grâce dans lequel elle est dès que son chant entre en jeu.
Comme Billie, quelque part, Lizz Wright entre directement dans le panthéon des chanteuses
subliminales du jazz – une estimation forcément très subjective, mais quand on
a vécu cette transe, à Harlem, comme j’ai eu la chance de le vivre et qu’enfin,
on rencontre la connexion avec cette puissance expressive par le simple biais d’une
chanteuse…
On s’accroche désormais de façon pérenne au souvenir de cette sensation unique.
08.
DIANE REEVES « One for My Baby » - Album « Good Night and Good
Luck, inspired by the Motion Picture » / Concord 2005.
L’un des fleurons dépressifs de Sinatra que ce titre de bar de fond de ruelle,
d’impasse, où l’on viendra épancher son âme meurtris et étancher sa soif de
whisky, avant de partir.
Sur cette contrebasse de Robert Hurst qui installe la solitude, Diane, va
commencer à attiser l’ultime flamme avec l’entrée à peine perceptible de Jeff
Hamilton à la batterie.
Tout va s’installer avec l’arrivée de Peter Martin, pianiste qui vient s’installer
vite fait, histoire de faire jouer l’instrument planqué au fond du bar, en
bout de comptoir.
Un duo chant/contrebasse absolument renversant.
De ceux qui rappellent véritablement le Fever de qui ? D’Elvis bien sûr…
09.
VANESSA RUBIN « Love for Sale » - Album « Langage of One »
/ Telarc 1999.
George Colligan, piano, Billy Higgins, batterie, Richie Goods, basse, Henry Johnson,
guitare.
Il est donc l’heure de conclure cette dernière playlist, par un standard ici des
plus usuels, de Miles à Chet, par exemple.
Le jeu est funny, Vanessa sort du cadre pour improviser autour du texte en un semi-scat
classieux.
C’est enlevé, up, soutenu par un motif qui s’installe en tête, c’est surtout
idéal pour conclure ces 10 playlists que je me suis vraiment amusé à dédier au
jazz.
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Des pointures, des inconnus, des oubliés… mais le jazz (et le rock, la pop, le
classique même et tant d’autres « genres ») en est truffé.
Alors on les déniche et aujourd’hui rien n’est plus aisé…
Le streaming, bien sûr, où il suffit de taper un nom, un titre et alors c’est
open bar…
Les réseaux, qui sont l’une de mes sources actuelles favorites (en particulier
les disquaires newyorkais, londoniens et japonais) avec des passionnés qui
dénichent des trucs pas possibles, souvent en vinyles et les partagent.
Bref, j’espère que ce tour d’horizon estival 2024 au gré du jazz vous en aura
fait écouter, découvrir et apprécier.
Cela fait quelques décennies que j’ai toujours, K7 à l’appui fait des « compil’s »,
des playlist, histoire que la route puisse s’agrémenter de fantaisie, de
diversité, de plaisir.
Avec le principe du streaming et des playlists qu’on peut créer soi-même à l’infini
j’ai été plus que servi…
Et comme toujours j’ai aimé à partager avec vous, ces successions de titres et
artistes.
La suite ?...
j’sais pas encore à ce jour, mais, bien sûr…
Et peut être bien que pour l’été je vais rester sur ce format playlist avec du
rock-pop et aussi pourquoi pas, du classique.
Allez, bonne… ah oui… soirée.
Pax, c'est énorme, massif, je ne dis rien, je reste silencieux, mais je prends des notes comme j'ai dit au Toine (en plus de son conseil de livre). Écouter, trier, garder.. parce qu'à mon niveau il faut bien que je me faufile et capte l'essentiel. Un jour je pourrais faire le malin et me permettre l’opulence. En attendant, merci pour tous ces conseils précieux.
RépondreSupprimerthx vincent,
Supprimery'a de quoi découvrir et surtout partir hors des sentiers communément battus, tant qu'à faire autant découvrir...
bonne pêche jazzy...
de rien,
RépondreSupprimerc'est sur insta, des noms comme charliemsn, jazzbums, hamajazzy, bref ils sont en réseaux et proposent souvent des trucs pas possibles...