VENTS CONTRAIRES ET SOUVENIRS DIVERS…
VERSION BLOG Life Sensations…
VENTS CONTRAIRES ET SOUVENIRS DIVERS…
FACE A
- 01.
« Yardbird Suite »
Anachronic Jazz Band – Album « Anthropology » (Universal/Decca)
Charlie Parker – Album « Savoy’s Charlie Vol2 » (Savoy)
Habitués que nous sommes à d’éternelles redites bop autour de l’original de
Bird on en oublierait presque que, finalement le jazz peut se jouer sous toutes
ses formes chronologiques… Alors au lieu d’aller vers l’avant, pourquoi pas…
faire machine arrière.
Le Jazz Dixieland me rappelle cette époque bénie où j’ai intégré un Jazz Band
de ce genre intitulé « le New Papys Hot Jazz Band ». Un jazz band
d’anciens donc, mené par Musse trompettiste inconditionnel d’Armstrong, de Bix.
Ces gars cherchaient un batteur pour leur formation nouvelle.
C’est George, je crois qui m’a branché sur cette opportunité. Il était trop
booké pour répondre favorablement à la demande.
J’ai tout appris avec eux…
Le jazz bien sûr et surtout ses fondements, sa culture, ses racines.
J’ai aussi appris à jouer une batterie sobre, minimaliste mais efficace et puis
avec eux on avait droit à tous les us de jeu (stop chorus, three time, after
beat, etc…).
Le Dutch Swing College Jazz Band était leur référent « actuel ».
On écumait les hôtels des grandes stations et on était accueillis avec luxe et
respect.
Pour être à la hauteur j’ai donc écouté tout ce pan d’ancien jazz, celui des
débuts et ai méthodiquement appris à le jouer.
En parallèle et curieusement d’ailleurs, un autre « ancien » m’a
embauché dans un mini band équivalent à celui du Duke Orchestra de la période
du Cotton Club, il m’a proposé ce poste là aussi vacant. Ce fut la
complémentarité de ma formation.
Depuis, me rappelant que ces « anciens » savaient transmettre leur
savoir faire, je n’ai jamais oublié d’en faire autant.
Charlie Parker, c’est pour moi et c’est resté la vraie jazz
attitude.
L’implication, l’audace, la non-compromission et le jusqu’au boutisme intègre.
Certains en ont fait, en France en particulier, intégrisme.
C’est dommage… et stupide.
C’est aussi pour cela que je me suis éloigné du milieu du jazz, car ils sont
devenus nombreux et véhéments, prétentieux et méprisants que ces « intégristes
du jazz ».
Il est, quelque part, leur idole – il est resté l’une des miennes mais je n’en
ai pas fait la même appropriation, je laisse son génie nous rappeler qu’il a
tout révolutionné et que ce langage bop véloce et presque baroque en fioritures
débridées on le retrouve en fait… partout.
Bird a révolutionné mon concept de la musique, il m’a montré un chemin et comme
Miles c’est resté là, comme une éthique.
-02.
« A Night in Tunisia »
Charlie Parker – Album « best of the Complete Savoy and Dial
recordings »
Chaka Khan « And the Melody Still Lingers on (Night in Tunisia) – Album
« What’ cha gonna do for me » (Warner).
Sortir du cadre d’un titre presque patrimoine du jazz avec son break solo
débridé et tellement bossé par les musiciens de jazz que c’en est tendinite
obligatoire pour en reprendre l’essentiel et le (dé)tourner funky/groove/jazz
fusion en invitant au passe Dizz lui-même et surtout Herbie… voilà bien le
grand art des grands…
« A Night in Tunisia » est, avec « Night and
Day » et « Blue Bossa » le titre que j’ai joué en premier
lorsque je me suis mis au piano « jazz », n’étant plus capable à la
batterie, pour des problèmes de condition physique de jouer le jazz rock, la
fusion ou encore le prog et avec une perspective de rester cantonné au
Dixieland – ce que j’adorais, mais ne pouvait remplir tout mon amour du jazz.
J’ai alors commencé lentement mais surement à apprendre « à désapprendre »
le carcan de l’écriture classique pour m’initier au jeu pianistique avec
grilles, impros et libération.
Ce fut long et fastidieux et sans mon fils aîné qui, lui prenait des cours de
piano jazz et m’aidait à avancer, c’eut été encore plus long.
Cette fois c’est le jeune qui montra à l’ancien comment faire…
La version de Chaka a longtemps été introuvable, le genre de vinyle qu’on
commandait à prix d’or en import à la FNAC. C’est mon pote de chambrée à
l’armée qui m’a fait découvrir cette version.
Il l’avait sur K7 et instantanément je l’ai dupliquée. L’aisance tant que la
virtuosité de ces musiciens m’a littéralement traumatisé et, jouer ainsi tant
drums que claviers, est devenu quelque part obsessionnel et m’a tracassé de
nombreuses années durant…
Ce gars connaissait énormément de groupes d’un jazz entre rock et fusion avec
souvent des incartades funky.
Il m’a fait franchir un cap important culturellement et cette ouverture m’a
permis dès la sortie de l’armée d’avoir une solide base de référence pour mon
métier.
« Bird and Bela in B »
Don Sebesky - Album « Three
Works » (Gryphon).
Sebesky, arrangeur fétiche de C.T.I est fan d’Igor, de Bela, de toute la
musique russe en fait… (et pas que). Il l’arrange (quelle difficulté d’ailleurs
que « d’arranger » un tel répertoire !) à toutes les sauces
jazz…
C’est Alain Manuel qui m’a fait découvrir Sebesky.
J’ai réalisé qu’en fait je connaissais bien cet arrangeur mais je n’avais
(chose très curieuse de ma part toujours à fouiner pour se renseigner sur les
zicos des disques) identifié l’homme nominativement.
Pourtant des albums CTI j’en ai écouté…
De là une forme boulimique certainement afin de rattraper cette bévue s’est
emparée de moi et j’ai placé cet artiste dans mes sommets référentiels tant en
écriture qu’en culture.
« Giant Box » est devenu un album de chevet.
Je parlerais un jour de mon rapport avec Stravinsky, je
m’attarde un peu sur Bartok.
Bartok, pendant les années 70 a été un compositeur incontournable par ses
pièces microcosmiques pour les jeunes pianistes tels que moi.
Le problème c’est qu’on ne faisait pas grand-chose pour nous le faire
apprécier, ou même comprendre…
C’était juste une approche « technique » et semblant aisée, car
minimaliste, le plus souvent.
Parler de double tonalité à des gamins n’ayant pas la moindre notion d’harmonie
si ce n’est instinctive avec un chemin cadentiel reposant sur le système tonal…
c’était loin, très loin de notre concept.
Faire jouer des mesures asymétriques, qui plus est, souvent avec la croche
comme référence, ce pour des rythmiques issues du répertoire populaire relevait
du même « éloignement », alors que déjà, la mise en place d’un 4
temps avec le temps fort n’était pas spécialement acquise ou que jouer le sens
rythmique d’une simple valse de Chopin restait là encore technique mais sans
rapport direct avec la danse.
Puis, ou mais, car il faut toujours un déclic…
Ce fut le Concerto pour Orchestre, en cours de classe à horaire aménagés et
présenté par Mr Tissot, professeur référent de notre classe. Là, comme à chaque
fois qu’il faisait découvrir une œuvre, un mouvement artistique, un
compositeur… tout a basculé et Bartok d’obscur est passé évident.
Il ne faut jamais oublier que les enseignants sont bien souvent les éléments
déclencheurs de nombre de choses qui feront notre futur.
Mr Tissot en a déclenché des « choses » auprès de la bande de
passionnés de musique ignares que nous étions…
Jamais je ne le remercierais assez.
-04.
« Around Bartok Bagatelle #4 » - « Bagatelle op6, sz38 :
N°4 Grave »
Richie Beirach/Gregor Hubner/George Mraz – Album « Round About
Bartok » (ACT Music)
Ferenc Bognar – Album « 14 Bartok Bagatelles, Work for piano solo,
Vol1 » (Camerata Tokyo)
Tous les sujets sont bons à développer… Richie Beirach est un pianiste trop
peu mis en avant, pourtant chacun de ses albums est un magnifique projet.
Restons avec Bela, donc…
Concernant Bartok, presque tout je l’ai dit plus haut.
Concernant Richie Beirach, voilà un pianiste et un musicien que j’ai découvert
plutôt tardivement mais qui m’a directement captivé.
La particularité de son jeu plutôt européen pour un américain, tout en restant
dans la lignée de Bill Evans…
Et puis ses duos avec David Liebman, ça me l’a fait directement adopter.
-05.
« V2 Schneider »
Philip Glass – American Composers Orchestra – Album « Heroes
Symphony » (Decca)
David Bowie – Album « Heroes » (Parlophone)
Partir de l’essence de l’original et la réinventer en minimalisme répétitif
« american school » …
respect…
Il m’est bien évidemment plus simple et direct de me
remémorer l’arrivée de l’album « Heroes » de David Bowie dans nos
sphères estudiantines.
Les débats étaient houleux avec mon ami Fred (encore lui…), voisin de tablée de
cours, devenu très vite ami d’un temps d’études.
Il caricaturait à merveille, j’écrivais.
On a eu vite fait de créer le journal d’étudiants d’une poignée de parutions.
Il avait versé dans le punk puis une certaine new wave et je restais accroché
au prog, tout en commençant sérieusement à m’imbiber de jazz. E.C.M était l’une
de mes portes d’entrée.
Un soir, on réussit tout de même à se mettre d’accord – « The idiot »
d’Iggy fut le passage frontalier, Bowie et ses nouvelles directions berlinoises
le pays d’accueil où l’accord ne pourrait être rompu.
« Heroes » est l’hymne de toute l’une de mes époques. Sa version live
de « Stage » m’a fait pleurer.
Quant à Philip Glass c’est bien plus tard, mais avec un immense intérêt que
« Einstein on the Beach » est venu d’un trait bouleverser nombre de
mes idées musicales.
Mathématisme et art… répétition et conceptuel… obstination…
Cela a été la suite de mes addictions envers Tangerine Dream, K.Schulze ou
encore Ash Ra.
Faire de la musique « scientifique », voilà ce qu’il me semblait
impossible et qui m’apparaissait comme tel ici avec un transport émotionnel que
j’eusse été incapable d’imaginer auparavant.
-06.
« Engulfed Cathedral » / « La Cathédrale Engloutie » -
Claude Debussy
John Carpenter – Album « Escape From New York » (Silva Screen)
Monique Haas – Album « préludes Book & » (DG)
L’un des préludes de Debussy les plus emblématique…
D’un côté une version fantomatique pour la B.O de ce film d’un futur pas si
éloigné désormais… (tant en comportements politiques qu’en mode sociétal), de
l’autre Monique Haas qui est à mon sens l’un des plus grandes interprètes de
cette école française du piano.
Debussy et ses préludes furent l’un des immenses choc
musicaux et pianistiques de ma prime adolescence.
« Bruyères » puis « Feuilles Mortes » m’ont été posés sur
le pupitre, le premier à l’occasion d’un examen (il reste d’ailleurs encore en
titre lors de ces passages de niveau), le second pour compléter le premier, par
mon professeur de l’époque Mr Neveux, qui m’a apporté la musique dans les
doigts en une petite année avant d’entrer à L’IRCAM et l’ensemble inter
contemporain.
Il n’y a pas de hasard dans une vie.
Il est là où il devait être – j’ai profité de son enseignement philosophique de
la musique en un éclair. Il est parfois quelques mois qui valent plus que des
années.
Le premier choc face à ces partitions est qu’elles sont écrites, avec une
logique qui de fait, échappe… sur trois portées – puis l’on se met à assembler
les pièces musicales de ce puzzle chargé effectivement d’impressions et alors
cet agencement s’éclaire et il apparait que c’était la meilleure des solutions
pour la compréhension du « sujet » musical, que d’écrire ainsi.
J’ai par la suite – et par moi-même – travaillé nombre de ces préludes,
laissant de côté certains dont la capacité technique m’était impossible… plus
par paresse que non aptitude d’ailleurs. Et j’ai cherché dans ces accords aux
modes ouverts, aux sonorités suspensives, dans ces mélodies antiques, dans ces
plans organisés en tableaux une vérité, une réponse à ce qui fait de la musique
image, sensations et donc, impression…
Et, au fond du premier recueil, voici cette cathédrale, engloutie, comme l’ont
été ces villages entiers sacrifiés pour les barrages hydroélectriques –
reposant au fond des eaux et gardant en eux sous un calme translucide et
intemporel la vie d’antan.
Une des images les plus extraordinaires et les plus fascinantes en suggestion
que me donne encore ce prélude. Un prélude au rêve, à l’imaginaire, à
l’intemporel.
« Escape in NY » est un film que j’ai vu un bon nombre de fois. Il
correspond à une certaine idée de SF que j’ai adorée dès que mon père m’a mis
entre les mains des bouquins SF et Fantasy. Je les dévorais et pendant mes
trajets en métro, j’alternais entre mes « devoirs » de musique et les
lectures de ces univers où la ville devenait alors un tentacule futuriste dans
laquelle j’aimais errer en divaguant avec mon esprit d’enfant. Je parle de
cette époque où j’avais dans les 9-12 ans.
Dès sa sortie, j’étais allé au cinéma voir, « Escape ».
NY devenue une prison murée au sein de laquelle une « autre » société
se réorganisait. Cet enlèvement, ce héro coincé par une administration – futur,
urbanisme glauque, personnages déjantés et incontrôlables, pluie éternelle…
Une musique d’un synthétisme happant et puis là, détourné, cette cathédrale.
Irréel !
Pour en finir avec Debussy ici, Michelangeli a détrôné Claude Helffer qui
pourtant restait mon accroche de référence. Il l’a aussi fait avec Monique Haas
qui reste inégalée, tant qu’oubliée…
je l’ai découverte chez Ravel et je me suis immédiatement dit que si elle
jouait Ravel ainsi alors dans Debussy elle devait être exceptionnelle…
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FACE B
-01.
« Alabama Song » - Kurt Weill
Das Palas Orchester & Max Raabe – Album « Charming Weill » (RCA
Red Seal)
The Doors – Album « The Doors » (Elektra)
Seul Jim était convaincu de reprendre ce titre que l’ensemble du groupe
considérait comme « eine gross polka » - il avait raison… Weill a été
adapté à toutes les sauces, ce qui prouve son universalité.
Kurt Weill, je l’ai découvert alors que je cherchais un
ensemble de musiques pour illustrer un projet musical scolaire avec de
l’expression corporelle à l’appui. C’est par les versions orchestrales dirigées
par Atherton que j’ai ouvert la porte de cet univers tant populaire que
contemporain, tant immédiat que complexe, désuet, rétro et savant à la fois.
De là j’ai directement foncé chez Carla Bley et ai réussi à la mieux
comprendre, pour l’admirer.
De là, j’ai instantanément été addict de Rota et des films (de tous les films)
pour lesquels il composa.
Et l’art déco, cette « belle époque » revêtirent une connotation
sonore, il faut parfois illustrer la musique.
Adolescent, je ne supportais pas les Doors.
Ça m’énervait…
Impossible de comprendre l’engouement de ma copine d’alors pour Morrison, du
moins le personnage et la médiatisation dont il était l’objet.
Mais le temps passe et agit et un beau jour j’ai passé le cap.
De la « compil » j’ai immédiatement acheté tous leurs albums, ai fait
de Manzarek une sorte d’idole claviériste et des autres comparses Dennsmore /
Krieger des vétérans indestructibles.
Et j’ai bossé comme tout pianiste se doit de le faire, l’intro de Riders… que
j’utilise encore souvent comme « citation ».
-02.
« Baby Alone in Babylone » / « Symphony N°3 in F Major – III
Poco Allegretto »
Jane Birkin – Album « Birkin/Gainsbourg - Le Symphonique »
(Parlophone)
Brahms / Orchestre Révolutionnaire et Romantique – Album « Symphony N°3
/Gesang / Nanie » (SDG).
Serge le plus génial récupérateur ou re-conditionneur dirait-on maintenant
de géniales mélodies, de classicisme classieux… Et que cette symphonie est
belle !
Quand, au milieu des années 80, mon nouveau boulot de
professeur de formation musicale (solfège…) m’est littéralement offert, à la
suite d’un remplacement devenu poste, il me faut replonger dans la musique
classique.
Pour autant, j’aime déjà à faire des liens, écouter du rock, du jazz et
expliquer… la musique.
A cette époque - et c’était heureux car l’oreille avait une place prépondérante
dans l’enseignement musical là où aujourd’hui l’on ne forme plus que des
lecteurs sourds, ce même à la note qu’ils lisent – la dictée musicale prenait
une place importante dans l’heure de cours et il fallait trouver des mélodies,
des œuvres susceptibles d’être utilisables pour cela.
Certaines permettaient la dictée à plusieurs voix, et il fallait faire une
réduction au piano afin de rendre l’exercice usuel pour les élèves.
Certains professeurs écrivaient tout simplement leurs dictées, mini
compositions en soit.
Je le faisais, parfois mais je préférais faire découvrir une œuvre d’autant
qu’après avoir gratté le papier à portées, on écoutait l’œuvre et bien sûr on
débattait.
Cette symphonie de Brahms a fait partie, en son entier, de ces préparations
pédagogiques et je revois encore la tête des élèves quand je leur fis découvrir
la version de Jane Birkin… un grand moment… certainement un choc pour eux,
dont, qui sait, certains parlent encore.
-03.
« Pièces de Clavecin en concert, II. La Boucon (Air gracieux) » /
« Usage de Faux ».
Jean Philippe Rameau/Les Dominos – Album « Concerts en sextuors »
(Ricercar)
Louis Sclavis Sextet – Album « Les Violences de Rameau » (ECM)
Un souvenir… une master classe avec Didier Raulin présentant son travail
conceptuel autour de Rameau. Un moment de véritable plongée artistique et
conceptuelle.
Rameau…
Ma première commande de composition pour l’image, par Kim.
On se rencontre à Lyon, il me parle de son court métrage, m’explique son idée,
sa philosophie de la musique dans le cinéma.
On sympathise, vraiment.
On va chez lui et là il me sort tout une caisse de vinyles fantastiques et
parmi ceux-ci, cet « exemple » de détournement musical avec Rameau
joué par Bob James, seul avec son barda synthétique.
Kim voulait une musique entre Weill et ce baroque, cette élégance, ce
raffinement.
Bob James a réussi là cette mixité.
Gamin, parmi les disques qui étaient juchés sur l’étagère des disques « de
la maison », il y avait ce disque format trente-trois médium de la guilde
où était jouée la musique de Rameau.
Mon père n’aimait pas ce disque mais je l’écoutais souvent… il y avait
d’ailleurs ce tambourin que l’on chantait en solfège dans la méthode du solfège
récréatif. Je le chantais avec le disque, à tue-tête en mettant le nom des
notes comme des paroles.
J’ai réalisé bien plus tard que, dans la méthode, il était transposé…
Mon père n’aimait pas Bach, côté religieux oblige, et en fait le baroque dans
son ensemble, certainement pour les mêmes raisons qui pourtant étaient
impérieuses aux compositeurs que de répondre aux commanditaires de la foi
chrétienne.
Dès l’enfance je sais que j’ai retenu Rameau dans un coin de mon esprit pour
qu’il devienne plus tard aux côtés de Haendel l’un de mes compositeurs préférés.
L’avantage d’avoir été chef d’un Big Band relativement connu en son temps a été
que, quand le conservatoire de Chambéry a ouvert son dpt jazz on était invités
à toutes les master classes et que, même, l’établissement en organisait pour
nous.
Raulin présentait « Les violences de Rameau », par un bel après-midi.
Nous n’étions pas vraiment nombreux à venir discuter avec lui, mais Rameau/Jazz
et puis Sclavis et son côté barré bien parallèle à Barthelemy que je suivais
avidement, j’avais envie de savoir de quoi il en retournait. Cela reste l’une
des plus enrichissantes rencontres de ma vie, sur le plan artistique
entendons-nous.
J’ai gobé tout ce qu’il était possible d’emmagasiner et comprendre de ce
concept où le baroque-improvisation-universalité musicale-écriture et
réappropriation se scindaient en un projet incroyable, inédit, déviant tant que
vraiment contemporain.
Je suis parti de là en bredouillant un vague merci à F.Raulin et j’ai filé
m’acheter tout ce que trouvais de Sclavis et de Rameau…
-04.
« Farandole / L’arlésienne Suite N°2 »
Bob James – Album « Restoration : The Best of Bob James »
(evosound)
Orchestre de l’Opéra Bastille/ Myung-Whun Chung – Album « Bizet / Carmen
suite, l’arlésienne suites » (Decca).
Bob James adore le classique et l’arranger (lui aussi a fait Rameau
d’ailleurs) alors au gré de ses albums on va trouver nombre de thèmes bien
connus et traités jazz, fusion, peu importe en tout cas le niveau est largement
supérieur à… Ekseption…
Et Myung-Whun Chung est un chef extraordinaire précis puissant…
Que j’ai pu fredonner, gamin, ces notes des mélodies
populaires de l’arlésienne.
C’était tant enjoué qu’enfantin… en cours, forcément on chantait ça en canon…
Je le faisais en lisant Daudet et la Provence colorée prenait une saveur
authentique d’imaginaire d’enfant. Comme ces petits films qu’on appelait
feuilletons – je feuilletais ces histoires rocambolesques, dramatiques,
humoristiques avec une BO parfumée, savoureuse et joyeuse.
Puis cette musique est devenue « d’étude », son savoir orchestral,
analyse, avec la richesse des timbres, de cette couleur intermédiaire concluant
un romantisme déjà bien français et tourmenté différemment et amorçant un
impressionnisme faisant appel à tant de sens.
Myung-Whun Chung a, si mes souvenirs sont exacts, fait débat à l’opéra
Bastille, un opéra faisant lui-même débat rapport à Garnier.
Le public de l’opéra est un ramassis d’aigris suffisants et de sclérosés se
désirant privilégiés.
Il accepte le n’importe quoi se voulant représentativement futuriste, mais va
ergoter sur la demi-mesure de telle œuvre, légèrement sortie de la frontière
habituelle, par un chef.
Ce chef, je l’ai découvert chez Messiaen et il m’a transporté.
Comme ici.
Comme dit juste avant Bob James a une culture musicale classique qu’il ne renie
pas et même il s’autorise souvent à arranger dans des version jazz, jazz-rock
ou fusion-smooth des thèmes du répertoire. Son « Ludwig » dans
« Foxie » est juste incroyable de cette faculté rare à jazzifier le
classique. Ici Bizet passe à cette sauce – on appréciera, ou pas…
Les goûts sont divers, la musique elle, universelle.
-05.
« Emotional Rescue »
Rolling Stones – Album « Emotional Rescue » (Polydor)
La fièvre du samedi soir version Stones. Dès 1.40 Charlie n’en peut plus et
accélère un tantinet.
Le disco c’est pas leur truc, mais disons qu’après « Miss You » côté
royalties ça a dû en payer des trucs…
J’adore débattre sur les Stones.
Balancer des trucs genre « ils restent le plus grand groupe de rock au
monde », etc…
J’ai toujours eu un rapport « complexe » avec les Stones et une
admiration sans limites.
Je ne sais pas vraiment dire quelles époques je pourrais bien préférer, en fait
je m’en fous.
« Black and Blue » relayé enfin à la télé et suivi de concerts
retransmis a bousculé mon petit confort d’ado. Mick se vautrant sur un espace
scénique qu’il envahissait en chantant « Hot Stuff » et en faisant la
nique au cameraman, ‘tain, ça m’a marqué !
Je me souviens de cette fille, Sylvie, dont tous les mecs rêvaient…
Elle m’aimait bien, on discutait souvent aux interclasses.
Ils enrageaient – mais franchement, s’ils avaient su que notre seul kiff
c’était de parler des Stones, ils se seraient vit mis à les écouter au lieu de
Patrick Juvet.
Pour eux y’avait là une réelle opportunité – mais les années TV Guy Lux ça
cloisonnait déjà les esprits.
Je l’ai revue nombre d’année après, par hasard et on a parlé de quoi ?...
Y’a des fils conducteurs à la vie…
Bref, j’attaque Stones et c’est comme une poussée d’adrénaline de gosse, ces
riffs de Keith au cordeau, inimitables, Mick qui harangue, couine, se dandine,
Charlie et son jeu si particulier (retrait du coup de charley quand l’after
beat caisse claire intervient et jeu en prise tambour… rarissime) avec ses
breaks qui semblent accélérer, Will et maintenant Daryl en piliers souriants et
Ron qui semble surgir d’une planète dont lui seul a les clés.
Des tubes, des albums rarement inutiles et qui sont souvent chargés au-delà de
ces tubes, de petites pépites…
Bref les Stones ça reste la fête rock et c’est bien pour ça que je les aime et
quand ils s’essaient, comme ici, à la mode, au sortir, ils restent Stones alors
j’adhère.
Direct, immédiat et même quand ils pensent faire des fioritures ils sont loin,
très loin de nombre d’autres qui se perdent en inutilités.
-06.
« Baba Yaga »
ELP – Album « Pictures at an Exhibition » (BMG)
Les Siècles/François Xavier Roth – Album « Les Tableaux d’une
exposition-La Valse / Moussorgski-Ravel).
ELP fleurons du prog a toujours aimé récupérer la musique russe pour la
récupérer en pièces symphoniques rock, ce qui a fait dire à Manoeuvre (qui n’en
n’est jamais à une connerie près) que le prog c’est en fait du classique avec
des gros amplis…
Je laisse là notre zozo soit disant rock national à ses spéculations et je me
dis qu’en 69 pour sortir du répertoire Moussorgski et le balancer ainsi avec
une telle hargne, c’était n’en déplaise… rock.
Ce n’est pas demain que je vais renier le prog.
Il a été la passerelle entre les études classiques et l’addiction au rock et
Yes, ELP, Genesis puis UK ou Asia et bien sûr les obligatoires KC ou VDGG sont
et demeurent là, en première ligne, même si parfois cette ligne s’est décalée
sur le côté.
Cet album de ELP, j’ai pourtant mis énormément de temps à en saisir la
dimension.
Elle aurait pu paraitre évidente car tous mes potes l’adulaient et perso, je ne
m’y retrouvais pas.
Jouer de façon électrique et rock, l’intégralité d’une pièce classique je crois
que ça m’apparaissait saugrenu, ou inutile. Mon père était scandalisé. J’étais
perplexe.
Je me nourrissais à « Tarkus » ou le chef d’œuvre « Brain Salad
Surgery », mais là…
Puis il y eut ce concert avec un pianiste montant classique qui joua, dans ce
village où j’habitais et dont la venue fut l’un des grands (et certainement
unique) évènements culturels, ces tableaux en les expliquant.
Alors j’osais ressortir ce disque oublié dans les étagères à vinyles, alors
j’achetais le dvd de ce concert et le mur, qui m’empêchait de saisir le
pourquoi du comment ELP transcendait le truc, volât en éclats.
Et cette énergie poussée par ces trois-là, a redimensionné Moussorgsky et a
placé sa musique là encore, au-delà de toute frontière, barrière, comme juste…
musique.
Et d’ailleurs, si tu ne sais pas que c’est Moussorgsky, avec ces orgues qui
surgissent de partout, on s’embarque vite dans ce tourbillon…
Concernant François Xavier Roth, il représente pour moi ce nouvel état d’esprit
(identique quelque part à l’école baroque) qui veut sortir des sentiers battus
par les habitudes, le séculaire, la « tradition ». Il revoie les
sujets, leur insuffle un son d’époque (instruments d’époque), une lecture en
retour aux sources, immense et qui plus est, bien souvent live.
Voilà, j’ai complété la compil’ qui est sur le blog participatif Blog | Les
rubriques en vrac du rock.
En le visitant vous y trouverez d’autres compilations, bien rock bien variées,
bien copieuses, reflets de personnalités et goûts tant différents que
complémentaires, car l’essentiel c’est le partage et aussi l’échange cordial et
respectueux d’idées.
C’est le cas chez eux, c’est pourquoi j’aime à m’y rendre et comme là (re) ou
découvrir de quoi alimenter ma boulimie musicale quotidienne, plaisir tant que
boulot.
A très vite.
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