EVASIONS CLASSIQUES … John Rutter.

 EVASIONS CLASSIQUES … John Rutter.


John Rutter est un compositeur anglais.
Il est né en 1945, à Londres.
Il fête ses 80 ans. 

John Rutter est avant tout considéré comme un compositeur pour chœurs et œuvre chorale.
Ce fil conducteur a tracé sa vie créative et il a créé de très nombreuses pièces à caractère liturgique.
Il a commencé sa carrière en s’immergeant dans la musique par le chœur au Clare College de Cambridge, dont, de choriste il deviendra progressivement chef de chœur de 1975 à 1979. Il créera d’ailleurs son propre chœur, les Cambridge Singers, en 1981, un ensemble dédié à la musique sacrée, idéal pour mettre en scène sonore, ses compositions.
« Carols of Choirs », écrit en collaboration avec David Willcocks est une référence de son travail créatif en ce domaine.
Mais reléguer ainsi un compositeur à ce qui fait son succès ou en tout cas le fait connaitre, c’est quelque peu minimal.
Il a également composé pour orchestre des pièces symphoniques absolument grandioses, influencées par le jazz, Broadway et ses comédies musicales.
Il a également composé des opéras pour enfants, un registre très particulier qui atteste de son savoir-faire dans le domaine de la gestion vocale.

A l’occasion de ses 80 ans un coup d’éclairage est mis sur son œuvre et il faut non s’en satisfaire mais s’en réjouir tant celle-ci est riche, variée et à portée universelle.
Ecouter la musique de John Rutter c’est ouvrir une porte cinématographique imaginaire, où l’on va créer soi-même l’univers féérique que sa musique nous suggère.
C’est se laisser immédiatement emporter par sa conception vocale - qu’elle soit réellement chantée ou instrumentalement chantée – de l’écriture qui lui donne une proximité sensorielle particulière, car sa musique s’adresse directement à nous, elle nous parle et nous (en)chante.

Vous souhaitez bien entendu en savoir plus et je vais, parmi les albums qui sortent et qui lui sont consacrés, en présenter trois, histoire d’aller un peu se bouleverser les usages d’écoutes classiques tout en ne frisant jamais, avec lui, la contemporanéité moderniste dont la muse souffle à bien des compositeurs en mal d’intellectualisme de venir s’offrir à elle.

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JOHN RUTTER : « Reflections » - Decca 2025.
Steven Osborne : piano
Royal Philharmonic Orchestra, direction John Rutter.

De chef de chœur à chef d’orchestre le pas est très souvent franchi (Abbado) et il n’est rien d’étonnant que de constater le compositeur présent, ici, à la baguette et au pupitre.
Voilà un album éblouissant qui permettra immédiatement d’apprécier la musique de John Rutter et de se familiariser avec son grand talent d’orchestrateur et sa belle inspiration créatrice.

Le premier titre, engageant, à l’orchestration immense, mirifique, magnifique … « Celebration Ouverture » promet d’entrée de bien belles découvertes.

Chez John Rutter les influences hollywoodiennes et de Broadway sont apparentes et même revendiquées. Et ce n’est pas pour déplaire que constater le presque unique Gershwin en zone de référence symphonique autre que par l’habituelle resucée de tant et tant de reprises par le jazz.
Ce jazz qui reste là, présent dans « l’esprit », dans la présentation, sorte de ligne d’horizon inévitable mais appréhendée autre.

Puisque je parle de Gershwin, je suis absolument ébloui par ce concerto pour piano finement exécuté par Steven Osborne, ce pianiste écossais né en 1971, au parcours riche en répertoire ratissant le classique sous toutes ses formes et formules.
Idéal ici.
En écoutant ce concerto c’est comme si le jazz de Gershwin s’était instantanément transposé « à l’anglaise ». Une désinvolture, un peu d’humour, des clichés bonne époque et des jeux de rôle instrumentaux qui agissent comme des personnages – un véritable moment de plaisir et de surprises d’écoutes, chargé de vraies-fausse références soumises à la facétie du compositeur (au passage remarquable orchestrateur), un jeu de chat-souris pour l’auditeur qui cherche, tente de… mais ne trouve et finit par se laisser absorber par ce déluge musical.
Un concerto composé en 1979 à la demande d’un festival anglais.
John Rutter quant à lui parle dans cette œuvre intitulée « Reflections » de ses références à Ravel et Ibert.


Il faudra s’arrêter avec émoi sur ces miniatures pour orchestre et en particulier sur cette « Chanson Triste » à la mélodie somptueuse et chargée de sentiments.
En second lieu, ce sera le précieux « lullaby » à l’orchestration parsemée, minime qui n’a qu’un souci, mettre le chant instrumental en valeur et le faire passer d’instrument en instrument afin de lui donner plus de force, de réalisme. Et alors les cordes, comme un chœur, vont s’emparer d’une seconde partie et faire frémir en quelques mesures tout l’édifice musical.
« Dance to Your Daddy » repose sur une rythmique tant folklorique que de traits de personnalité humoristique. Une véritable image musicale entre tendresse et humeur cuivrée fanfaronnante.
Ce sont bien des « miniatures » et elles agissent comme tel.
Des instantanés de vie, de sentiments, d’émotions et de, certainement souvenirs sous-jacents.
Elles passent d’un trait, mais leur impact, lui, reste, comme justement, une évocation de moments de la vie.
De nos vies.


« City Scapes », initialement composé pour un orchestre junior et oublié pendant environ cinquante années se voit ici réaugmenté de sections par le compositeur.
Je pense au plaisir qu’eurent ces jeunes réunis en orchestre à jouer et créer une telle œuvre, pensée et conceptualisée à leur égard.
Le Broadway s’invite en clichés sous sa forme la plus représentative entre un Gershwin (encore lui) et quelques échappées martiales digne d’un Copland.
L’éternelle fonctionnalité rythmique 1..2..3. vient scander quelques sections pour une vision de « Big Apple » où chacun, chaque pupitre, presque chaque instrumentiste entre en possession d’un matériau instrumental et musical captivant à jouer.
« Lost City » où se dessine une architecture fantomatique exprimée musicalement avec une rare pertinence.
Entre Herrmann et une certaine « cathédrale engloutie » et semblant oubliée ou perdue qui ressurgit des profondeurs de l’âme.
« Flowers of Cities All » conclut en sublimation, en luminosité cuivrée, tel un hymne, tel un générique de film hollywodien, frais léger, effectivement fleuri, l’ouvrage.
Encore une œuvre qui devrait entrer de plein jeu dans le répertoire symphonique tant sa richesse culturelle et musicale est exprimée.
Une œuvre - alors que la mode est au concert symphonique de compositeurs de films (Zimmer, etc.) s’imposant à grand coups d’effets tant sonores que visuels – qui proposerait un pendant imaginaire faisant appel à l’esprit et non au téléguidage de celui-ci.
Sublime et rare.


« Elegy » va conclure ce très bel album, une pièce composée et initialement prévue pour être incluse dans une œuvre en quatre mouvements de forme sonate et destinée à être aussi autonome rapport à cet ensemble.
C’est donc solitaire qu’elle va conclure l’album, Steven Osborne vient égrener son piano ni concertant, ni réellement soliste bien que l’on souhaiterait que cette parité entre orchestre et piano puisse le faire croire – ici il contribue en tout réalisme à la seule dimension orchestrale et expressive de la pièce.


« Reflections » est bien plus qu’un hommage, bien plus qu’un kaléidoscope sous la forme d’une « compilation » de l’œuvre de John Rutter. C’est un album qui permet, œuvre par œuvre, de démontrer l’immense richesse de son inspiration, ses qualités d’orchestrateur, l’expression émotionnelle de sa musique …
C’est un album quelque peu initiatique qui ouvre un champ d’envie de connaitre réellement la musique de cet octogénaire à la carrière presque aussi confidentielle que conséquente, à la musique représentative d’une lignée de compositeurs, de styles et genres, d’usages d’écriture dont les influences ont guidé sa verve et son inspiration.
Avec « Reflections » on va découvrir un grand compositeur et l’inscrire de façon obligatoire dans son escarcelle « classique », ou même simplement « orchestrale », puis on la découvrira forcément « vocale », mais c’est pour les albums qui suivent.

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JOHN RUTTER : « In The Poet’s Garden » - Collegium 2025.
Roderick Williams, Melanie Marshall : lead vocals – The Cambridge Singers – Royal Philharmonic Orchestra (Catrin Finch – Harp) – Taplow Young Voices.
John Rutter : concuctor.

« Tout compositeur s'intéressant à la musique vocale et chorale puise son inspiration et son élan dans la poésie. Après la musique, les mots sont ma plus grande passion, et depuis ma plus tendre enfance, je prends plaisir à rechercher des poèmes qui semblent appeler une mise en musique. Cet album rassemble certaines de mes œuvres chorales récentes, où les mots ont été la première source d'inspiration, la musique en découlant » -  (John Rutter).

Quand, à la sortie de cet album, je m’y suis arrêté je n’ai guère cherché, honnêtement, plus loin que me laisser simplement envouter par la musique qu’il présentait.
Envouté par cette magnificence, effectivement poétique, de la prise du pouvoir vocal, qu’il soit soliste et surtout d’écriture chorale.
Sans argument, juste pour le plaisir d’une trame d’apparence de comédie musicale, c’est juste ce qui m’a immédiatement plu dès les premiers titres.
Là encore jazz, symphonisme typiquement américain ou même anglo-saxon, Broadway, Hollywood, une écriture vocale de chœurs trempée dans la liturgie, des réminiscence ravéliennes et d’école française – bref ce tout en un qui fait qu’on est en territoire connu, presque confortable mais qui incite à la découverte avec et autour de toutes ces influences.
Je m’en suis donc imprégné, naturellement, agréablement, sans la moindre façon, juste attiré par la magie musicale que l’œuvre dégage.

Mais il faut ensuite en savoir un peu plus…
Ce que j’ai fait – car avant « Reflexions » cette œuvre a été ma première entrée, donc découverte réelle et attentive du compositeur John Rutter, c’est dire si c’est récent.
Cet album étant sorti en … octobre de cette année.

Il faudra quelques recherches et liens dépassant la présentation par le compositeur lui-même pour saisir l’essence de cette œuvre, suite de chants chorals où la poésie est inspiration et où la volonté est de mettre la musique au service du mot poétique.

James Weldon Johnson, poète afro-américain, pionnier de la lutte pour les droits civiques, dont  « I’ll Make me A World » semble la pièce la plus conséquente et ambitieuse de cet album, déployant des moyens orchestraux, chœur et solistes est quelque part le cœur du projet.
Le récit de la création issu de la Genèse y est raconté avec son approche poétique.
La musique de John Rutter reste, pour une grande part, liée à la liturgie et il est rare que dès qu’il touche au vocal, il s’en éloigne réellement.
Cela apporte une dimension spirituelle qui en toute logique s’impose émotionnellement à l’écoute.

« I’ll Make me a World » a le pouvoir d’ouvrir l’album et il est évident que la mise en scène orchestrale et vocale de la pièce installe, instantanément, sous un chant comme sorti du plus profond du negro spiritual, des racines spirituelles du gospel, la « couleur » et la profondeur du propos souhaité par le compositeur.
En introduction les solistes posent le récit puis viennent les chœurs, subliminaux, somptueux, d’une rare richesse et d’une rare perfection d’exécution.
La musique semble en apesanteur, irréelle, hors de la temporalité.
Cette longue pièce avoisinant les vingt minutes prend immédiatement un pouvoir hypnotique sur l’auditeur et sa progression incluant les rythmiques séculaires d’un jazz lointain installé dans la tradition, les accroches obligatoire d’une écriture comme sortie de Porgy and Bess et le symphonisme liturgique anglican place l’écoute en mode fascinatoire, curieux où chaque section est une surprise.
On pourrait en rester là tant le foisonnement créatif de la pièce offre de possibles.
Et la réécouter sans cesse – ce que j’ai fait.

Mais avançons.
Et osons franchir ce premier cap dans lequel l’on se suffirait à rêver, confortablement et s’imprégner du sens poétique déclaré ici.

« London Town » est une suite chorale écrite à partir de plusieurs poésies, dont une de Rutter.
On y trouve un poème traditionnel, d’autres de Delphine Chalmers, Sir Walter Raleigh, Rudyard Kipling, William Wordworth.
Cette suite écrite en  2019 a été dédiée à une amie chère à John Rutter, June Keyte, cheffe d’un chœur d’enfants basé dans le nord de Londres.
C’est une célébration de la ville de Londres, à l’écriture là encore tant simple, naïve que de multiples détours et méandres insoupçonnés, que l’écoute progressive, au gré de ces six poèmes musicaux vont nous faire visiter.
Cela agit comme un parcours féérique à travers la ville, sous le regard émerveillé de l’enfance.
Un côté disneyien accrochera un fugace instant notre référent imaginaire.
Lewis Caroll…

La harpe, aérienne.
Ces chœurs d’adultes qui soutiennent, dialoguent avec, participent à … l’écriture très présente de ces chœurs juvéniles écrits avec un véritable sens permettant à ces enfants l’aisance du chant sans une harmonisation complexe, celle-ci n’intervenant que dans les moments clés de la mélodie où elle peut se diviser sans que l’exécutant n’ait à réfléchir afin de trouver le chemin mélodique sous-jacent, cette division semblant un choix immédiat et naturel.
Un art.
Cet orchestre soigneusement écrit et contrasté pour que la poétique musicale chantée irise le spectre d’écoute.
Ces voix, toujours ces voix…
Une sorte de magnificence s’autorise là, soigneusement présentée, finement ciselée au gré de présentations aux rythmes divers, supportant en souplesse la musique (« the river’s tale »).
Céleste.


« Dancing Tree », autre suite vocale a été composée à la demande des St Charles Singers, dirigés par Jeff Hunt – un chœur basé dans l’Illinois.
Cette suite repose sur la poésie de Charles Causley, un poète du XXe siècle.
John Rutter considère ses textes poétiques à la simplicité d’expression et de vocabulaire comme une véritable cadeau pour le compositeur en quête de poésies à mettre en musique.
La harpe de Catrin Finch est, dans ce recueil musical composé en 2024 un élément fondamental qui, au centre de l’écriture permet un arc d’élargissement expressif pour le chœur.
Là encore, on est fasciné par cette pertinence d’écriture, cette facilité à mettre en avant le propos poétique par la simplicité mélodique qui est le cœur de ce qui fait que cette musique touche instantanément.


« Three Shakespaere Songs » a été écrit entre 2017 et 2022 à la demande de plusieurs chœurs avec lesquels John Rutter a coutume de travailler.
Mettre cet auteur en musique n’est jamais une mince affaire.
Il est tellement représentatif de la culture anglo-saxonne, ayant dépassé la nation pour être immensément populaire et culturellement incontournable.
Il a - en son temps – œuvré avec Purcell.
John Rutter ne l’a pas oublié et le revendique ici.
Pas d’orchestre, pas d’accompagnement harmonique – juste le chœur, sublimé par une écriture là encore, tant simple qu’immédiatement touchante.
Un moment qui fait oublier la seule idée de chorale et qui sublime cette écriture dédiée aux voix.


« When Music Sounds », sur un poème de Walter De La Mare, va conclure, pianistiquement emporté par une allusion à Bach et son célèbre prélude en do, ce parcours vocal rare, autre et qui est empreint d’une intense émotion, les voix, écrites ainsi, ne pouvant que directement toucher l’auditeur et sa sensibilité.

L’écriture de John Rutter, présenté comme un spécialiste de l’harmonie vocale et de son arrangement prend dans cet enregistrement toute sa définition.
Il est reconnu tel et sait également s’entourer par des ensembles d’une formidable cohésion vocale, d’une rare collectivité expressive.
Evitant la sensiblerie, penchant aisé tant que niais que nombre de chorales s’ingénient à exprimer bien trop souvent, sa musique tant que ses interprètes vont vers un essentiel qui n’est nullement complexe, il s’agit juste d’exprimer avec foi et ferveur, sans la moindre exagération, l’axe mélodique qui porte l’importance du texte poétique.
Cela semble tant logique qu’évident – pourtant une telle musique, par sa simplicité (qui n’est que d’apparence) inciterait à la surenchère.
Un écueil évité avec expérience, connaissance et sens musical exprimé.

J’ai lu que le compositeur avait de nombreux détracteurs, du fait justement de cette expression simple qui émane de sa musique à laquelle de nombreuses étiquettes sont accolées.
Son engagement liturgique, les multiples commandes y compris pour des célébrations de la famille royale engendrent forcément de telles critiques, sommaires, dénuées de sens réaliste face à l’œuvre et non l’engagement spirituel du compositeur.
John Rutter est une personnalité musicale connue et reconnue en son pays et aux Etats Unis.
Il mérite largement de dépasser ces frontières anglo-saxonnes – et si, à l’occasion de son 80e anniversaire, avec la sortie de plusieurs enregistrement mettant en évidence sa musique, cela pouvait enfin se faire… ce serait pour les amateurs de musique classique intemporelle, une bien belle nouvelle tant que découverte.

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JOHN RUTTER : « Visions (2016) – Requiem (new recording) » - Collegium 2016.
Cambridge Singers, Aurora Orchestra direction John Rutter.

Comme troisième album afin de découvrir l’œuvre de ce compositeur voici son célèbre « Requiem », réenregistré en 2016 – il fut composé en 1985. Une œuvre post romantique dit-on, très proches de ce que Fauré avait souhaité faire avec son Requiem.
Pureté mélodique, simplicité des formes, évidence orchestrale, axe vocal prépondérant.
A ce « Requiem » enregistré dans l’église All Hallows à Gospel Hawks, à Londres s’ajoute une suite biblique où le soliste de son orchestre, Kerson Leong est mis en valeur, l’ensemble opérant comme un concerto pour violon avec chœur et orchestre.
Rutter voulait réenregistrer son œuvre maitresse, ce Requiem, en y mettant à profit son expérience et usant des nouvelles techniques d’enregistrement numérique afin de lui donner un nouvel éclat.

L’album s’ouvre avec « Visions », suite biblique en quatre mouvements centrée à Jérusalem et il ne suffira que de quelques mesures pour se laisser immédiatement conquérir par cette écriture sainte, par ce jeu concertant avec un soliste d’une immense expressivité, par ces réminiscences traditionnelles yiddish sous-jacentes et surtout par ces voix angéliques qui rendent le sujet admirable. L’impact qualifié de post romantique de cette œuvre est immédiat.
« Visions » possède une rare intensité quasi dramatique, à l’expression mélodique qui ne sait faiblir et qui emporte avec elle une charge émotionnelle des plus rares.
Peut-être est-ce bien là l’une des raisons qui font que John Rutter a de nombreux détracteur… Cette facilité d’inspiration mélodique, allant vers le simple, le « beau » instantané sans recherche autre, sans ajouts contorsionnistes – s’inspirant directement du texte liturgique, de la tradition, du patrimoine.
En le mettant au centre.
Ce manque d’audace apparent, revendiqué quelque part pour l’usage élémentaire et sans détours du « beau », dans sa plus pure exposition musicale possible.

Une fois transportés par la magie féérique de « Visions », nous voilà face à cette messe de Requiem, un poncif de l’écriture musicale liturgique dont peu de compositeurs se sont affranchis.
Il y a peu, j’écoutais – surpris – celui de Schnittke.
Il est certain que l’entrée dans cette œuvre via Schnittke nécessite… une « préparation ».
Et comme beaucoup j’ai du mal à dépasser celui de Mozart.

Concernant celui de John Rutter, à l’introduction rapidement dramatique, on va pouvoir retrouver ce qui fait, finalement, sa pâte, son schéma d’écriture.
Certes, l’orchestration est plus massive que dans les œuvres présentées jusqu’ici.
Forcément plus solennelle, à l’ampleur affirmée quand cela s’avère utile.

Le chœur est maitre du jeu et encore une fois c’est autour de son harmonisation absolument captivante que tout va s’organiser. Un peu comme ces grandes messes de J.S Bach, compositeur que Rutter a obligatoirement étudié.
J’admire la part soliste dramatique accordée au violoncelle dans le second mouvement « Out of The Deep » dans laquelle le chœur va venir insidieusement s’imbriquer pour reprendre sa place centrale.
Certes, tout cela est bien « tonal », quelque peu modal, parfois, mais jamais véritablement moderniste en écriture.
John  Rutter reste, éducativement, religieusement, spirituellement, trempé dans cette volonté mélodique de pureté qui permet de toucher les âmes, sa musique est le vecteur, ses mélodies le chemin, les couleurs de son orchestration l’enluminure.
On estime que ce « Requiem » est son œuvre la plus symbolique, la plus représentative de sa carrière.
Si l’on considère tant son attachement à l’écriture vocale-orchestrale que liturgique, il est effectivement fort probable que ses « fans » (car il en a) aient mis cette œuvre sur un piédestal.
« Pie Jesus » et son soliste enfant que relaie un chœur en respons est d’une absolue pureté.
« Agnus Dei » sur fond de timbales et à la progression douloureuse ne peut laisser insensible et va, par son écriture chorale définitivement exceptionnelle et d’une incroyable densité m’imposer une attraction désormais ineffaçable pour sa musique.
« Lux Aeterna » me laisse en suspens – le temps s’est encore arrêté…

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A l’heure d’un Noël approchant, il faut savoir que John Rutter, à la tête de cet ensemble vocal d’une rare perfection tant de justesse que d’interprétation a enregistré nombre de chants qui sont inscrits dans la tradition de ce moment sacré, familial, de partage, universel.
Je vous laisse aller découvrir ce qu’il a enregistré dans ce domaine car, au regard de ces trois albums exceptionnels, chargés d’œuvres vocales mais aussi orchestrales qui le sont tout autant, il semble évident que son approche vocale de Noël soit une fort belle découverte.
J’ai bien sûr fait cette démarche.

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A très bientôt.









 

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